La Lorraine, région singulière dont l’histoire mouvementée ne laisse guère indifférent, va retenir notre attention quelques instants. Souvent ses relations avec la France ont connu bien des soubresauts jusqu’à la réunion définitive en 1766. Revenons sur cet épisode riche en enseignements.
De la Lotharingie à la Lorraine

Les origines de l’actuelle Lorraine qui fait désormais partie de la région Grand Est remontent à une époque lointaine. L’appellation Lorraine a pour origine le terme Lotharingie, « nom du royaume légué en 855 à Lothaire II par son père Lothaire, l’un des petits-fils de Charlemagne. » peut-on lire sur le site herodote.net. Le royaume de Lotharingie correspond à la partie nord appelée Francie médiane. L’ancien nom de Lotharingie est peu à peu abandonné pour être remplacé par « Lorraine » à compter du Xe siècle. En 959 la Lorraine, intégrée à l’empire germanique, se scinde en deux parties distinctes à ne pas confondre, la Haute- Lorraine, correspondant à la Lorraine actuelle et la Basse-Lorraine, située aux abords de l’Escaut, du Rhin et de la Moselle, appartenant à Godefroy de Bouillon, chevalier franc et duc de Basse-Lorraine.
Les duchés de Lorraine en quête d’indépendance
Les duchés de Lorraine ne cessèrent d’attirer la convoitise des grandes puissances, la France et le Saint-Empire romain germanique. L’histoire retiendra qu’à partir du Xe siècle, le duché de Lorraine entre « dans la sphère germanique ».
Les duchés de Lorraine ont dû non seulement gagner leur indépendance face à ces états suzerains mais aussi face au puissant et ambitieux duc de Bourgogne Charles le Téméraire. Ce dernier paya de sa vie ses rêves de conquête. Il voulait annexer le duché de Lorraine : il fut trouvé mort devant Nancy en 1477, vaincu par le duc de Lorraine, René II et ses alliés suisses révoltés contre lui.
Les relations France-Lorraine : entre pressions et négociations
En 1552, Henri II, deuxième fils de François 1er et Claude de France, signe un accord avec les princes protestants allemands, adversaires de Charles Quint. En tant que roi de France, il accordera son soutien à ces derniers à condition de pouvoir occuper les Trois-Évêchés : Toul, Metz et Verdun. « Ainsi les Français s’infiltrent-ils en Lorraine. Ils n’en sortiront plus. » souligne le rédacteur de herodote.net à ce propos.
Au siècle suivant, en 1648, le cardinal Mazarin achève la « négociation », obtenant le rattachement à la France de ces Trois-Évêchés auxquels il faut ajouter le duché du Luxembourg français et le duché de Carignan. Il s’agit de l’épisode connu sous le nom de traité de Westphalie où la France, en effet, tira son épingle du jeu.
Comment la Lorraine devient française
C’est avec un certain sens de la négociation que le duché de Lorraine, objet de tant de convoitise, fut rattaché à la France.
Stanislas Leczinski,(1677-1766) roi de Pologne très éphémère, n’aura régné que très peu de temps dans son pays qu’il dut quitter dans des conditions difficiles. Il devint entre-temps le beau-père de Louis XV, sa fille ayant été choisie parmi 99 princesses d’Europe pour être l’épouse du roi. Louis vole au secours du souverain déchu, en errance prolongée : par le traité de Vienne signé le 3 avril 1735 il est stipulé que Stanislas obtient le duché de Lorraine en viager. En d’autres termes, à sa mort, le duché de Lorraine reviendra à la France.
Dans le même temps, François III, le duc de Lorraine en titre, doit renoncer à son duché et se voit attribuer en échange le duché de Toscane. Le 23 février 1766, la Lorraine est devenue effectivement française.

Le roi Stanislas, dernier duc de Lorraine, le moins lorrain des ducs mais le plus populaire
Dans sa résidence de Lunéville, le roi Stanislas était à la tête d’une cour très brillante où il recevait les plus grands noms de la littérature comme Montesquieu et Voltaire à tel point que ce dernier a écrit :« On ne croyait presque pas avoir changé de lieu quand on passait de Versailles à Lunéville ».
Sous l’impulsion de ce roi bon vivant et fort cultivé, la ville de Nancy se vit dotée d’une magnifique place, la Place Stanislas qui fait jusqu’à ce jour la fierté des habitants de la ville. Cette place est classée, rappelons-le, au patrimoine mondial de l’UNESCO. Les nombreuses actions du roi Stanislas lui ont valu le surnom de « bienfaisant ».
Ainsi ce roi polonais que rien ne prédisposait au titre de duc de Lorraine, considéré comme le moins lorrain des ducs, fut aussi le plus populaire d’entre eux.
Il mourut à l’âge de 89 ans des suites d’un accident. Sa mort fut suivie du rattachement de la Lorraine au royaume de France, le 23 février 1766, comme l’avaient voulu Louis XV et son ministre.
Selon la Revue des Deux Mondes, le comte d’Haussonville, homme politique, essayiste et écrivain français, confiait dans l’une de ses œuvres au sujet de l’évènement du 23 février 1766, où la Lorraine devient française : « Ainsi, tour à tour occupée de vive force, ou momentanément rendue à ses souverains légitimes, la Lorraine n’a jamais cessé d’être, soit le théâtre des entreprises violentes des rois de France, soit l’objet de leurs incessantes négociations. »
Les conflits franco-prussiens de 1870-71, les deux guerres mondiales de 1914-18 et 1939-45 ont mis à mal l’intégration de la Lorraine et ravivé les éternelles rivalités entre la France et l’Allemagne. La Lorraine moderne, située aux frontières de la Belgique, du Luxembourg et de l’Allemagne, avec son dynamisme et son riche patrimoine culturel, est résolument tournée vers un avenir apaisé, ancré en France et en Europe.
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