Les sept nécessités de la vie quotidienne en Chine, telles que décrites sous la dynastie Song, étaient : « le bois de chauffage, le riz, l’huile, le sel, la sauce soja, le vinaigre et le thé ». Aussi insignifiant qu’il puisse paraître, le thé était un élément fondamental de l’existence, qui a donné naissance à une culture durable autour du thé : la riche culture du thé en Chine.
Découvert en Chine il y a plus de 5 000 ans, le thé possède une riche histoire, marquée par l’évolution des coutumes et des applications. Le simple fait de prendre une tasse de thé après un repas est une tradition culturelle importante, qui a inspiré le couplet :
Une tasse de thé printanier rassure temporairement un invité,
une vie simple et pure inspire l’immortalité.

Selon la légende chinoise, Shennong « le Divin Agriculteur », a découvert le thé il y a environ 4 800 ans, lors de son parcours dans le monde humain visant à découvrir des plantes médicinales et à aider les gens à rester en bonne santé. Il a été dit que Shennong était doté d’un ventre transparent, ce qui lui permettait de constater les effets de chaque plante qu’il ingérait.
Un jour, il goûta le feuillage d’un arbuste à fleurs blanches et persistantes, et l’observa remuer et purifier son estomac. Les feuilles lui laissaient également un goût frais et pur. Comme les feuilles agissaient comme une pratique médicale, il les appela 察 cha (examiner), qui plus tard a été changé en 茶 cha (plante amère). Convaincu que le thé était un cadeau des dieux pour sa bonté, il utilisait les feuilles pour se détoxifier chaque fois qu’il goûtait à des plantes toxiques.
Un jour, il fut confronté à 72 poisons en une seule journée et utilisa le thé comme antidote. Le thé neutralisait non seulement les poisons, mais avait également un effet stimulant. Cette plante bénéfique fut cultivée et, au fil du temps, son utilisation s’étendit bien au-delà de la médecine. D’une boisson rafraîchissante consommée quotidiennement à une offrande spirituelle de rang cérémoniel, rejoignez-nous pour découvrir l’évolution fascinante de la culture du thé et ce qu’elle peut nous apprendre.
L’évolution du thé dans la culture traditionnelle chinoise

Au début, le thé était une concoction amère de feuilles cueillies, bouillies dans une théière. On l’appelait 粥茶 zhōu cha, ou thé en bouillie. Sous les dynasties Qin et Han, les feuilles de thé étaient pressées en « galettes » et cuites au four pour leur conservation. Les galettes sèches étaient réduites en poudre, puis mélangées à d’autres ingrédients secs comme des oignons verts, du gingembre et des écorces d’orange pour obtenir un 茶烤 kǎo cha, ou thé cuit, plus savoureux.
Sous la dynastie Tang, Lu Yu, après des années de recherche, écrivit le 茶經 Cha Jīng (Sūtra du Thé ou Classique du Thé), détaillant les méthodes de culture et de récolte du thé : de sa préparation à sa dégustation. Il a façonné ainsi le premier Tao du thé. À cette époque, le thé était infusé dans des bols à partir d’une fine poudre obtenue en broyant et tamisant les galettes.

Grâce à ce statut raffiné, la culture du thé prospéra et le « boire du thé » se transforma en « dégustation du thé » au sein de la haute société. Le thé devint une offrande cérémonielle lors des banquets du palais, des temples et des réunions d’érudits. De tels événements exigeaient un thé de haute qualité, de l’eau de source pure et un service de thé haut de gamme, le maître du banquet préparant lui-même le thé pour honorer les invités. Dès réception, les invités prenaient le temps d’admirer l’arôme, la saveur et la qualité de leur thé avant de discuter, de contempler le paysage ou de composer de la prose ou de la poésie.

La consommation du thé s’est simplifiée sous la dynastie Ming, où les feuilles de thé en vrac étaient infusées directement dans des théières ou des tasses. Le rythme effréné de la vie moderne a apporté l’apparition des sachets de thé, des thés instantanés et des mélanges de plantes médicinales, la plupart des gens ont tendance à « boire » plutôt que de « goûter » leur thé. Mais cela s’écarte du véritable Tao du thé.
Lao Tseu a dit : « Le Tao peut être appelé Tao, mais ce n’est pas un Tao ordinaire » et « Le Tao est vaste et est partout, à vos côtés ». Le Tao consiste à suivre la nature, comme le dit le Nombre d’Or : « Le mandat du ciel s’appelle la nature. Suivre la nature s’appelle le Tao. »

Dans Cha Jing, Le Classique du Thé, Lu Yu, également connu sous le nom de « Sage du Thé », a réfléchi à la relation entre le thé et le Tao.
La culture du thé et le Tao
À première vue, le Tao du thé englobe l’étiquette, les pratiques, les méthodes, les techniques, les arts et l’essence – six aspects qui permettent de comprendre l’esprit du Tao du thé. Si ces techniques constituent l’objectif principal, le but ultime est d’en saisir l’esprit.
Tous les phénomènes, y compris la rotation cosmique, les cycles de vie humaine et les changements dynastiques, peuvent être considérés comme obéissant à la loi de création, de stagnation, de dégénérescence et de destruction du Tao. Les anciens Chinois considéraient le Tao comme profond et solennel. En le suivant, on pouvait retrouver sa nature originelle et pure, et se réunir au Divin.

Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui considèrent le Tao comme une superstition, indigne d’être suivi. Autrefois, c’était une pratique méritoire dans tous les domaines, y compris la dégustation du thé. Honorer la riche culture du thé en Chine peut servir à préserver et à transmettre la culture traditionnelle chinoise. Comme Liu Zhenliang l’a énuméré dans ses Dix vertus du thé, le thé aide à « pratiquer le Tao » et à « affiner ses aspirations ». Alors, quel est le Tao du thé ?
La tranquillité intérieure

Le Tao du thé valorise l’harmonie, le calme, la satisfaction et la véracité, car seule la tranquillité intérieure permet d’atteindre la bienveillance désintéressée. Reflétée à l’extérieur, elle est une sérénité douce qui permet de savourer la vie. En dégustant du thé, il faut se libérer du poids de la peur et de l’anxiété pour apprécier pleinement l’apparence, la saveur, le parfum et la forme du thé. Ainsi, on peut réfléchir à la vie, cultiver son tempérament et savourer le contentement.
Comprendre le concept de l’amertume
La saveur amère et pourtant agréable du thé incite à réfléchir à l’amertume et à la douceur de la vie. Le bouddhisme enseigne que chaque étape du cycle de la vie, ainsi que les griefs, les séparations et les désirs inassouvis, apportent de la souffrance. On dit : « La mer de souffrance est sans limites, pourtant, d’un coup de barre, on peut regagner le rivage ». Le thé nous aide à accepter l’ordre naturel de l’amertume et de la douceur, à trouver la joie dans l’adversité. Et, grâce à cette compréhension, transcender le monde terrestre de la souffrance.
Accepter la simplicité

Sen no Rikyu, maître japonais de la cérémonie du thé du XVIe siècle, a un jour conseillé : « … Sachez que la nature du thé n’est rien d’autre que de faire bouillir de l’eau pour faire du thé ». Cela résume le Tao du thé : comprendre la vie et l’univers par la simplicité quotidienne.
De même, la cultivation dans le bouddhisme et le taoïsme implique l’éveil aux grands principes par la pratique ordinaire. Des dictons anciens nous conseillent de bien nous conduire, car même la plus petite bonne action accumule la vertu, tandis que commettre la moindre faute peut entraîner le malheur.
La riche culture du thé et le lâcher prise

Le Bouddha a enseigné que l’éveil exige de se libérer des attachements, notamment les soucis, la réputation, les intérêts personnels, les désirs et tout ce à quoi on s’accroche dans la vie. Nous souffrons parce que nous ne pouvons pas nous en détacher. Lâcher prise apporte paix, réconfort et clarté ; et le monde apparaît soudain plus lumineux et plus beau. La dégustation du thé met également l’accent sur l’abandon des préoccupations quotidiennes pour détendre l’esprit et être présent dans l’instant présent.
放下亦放下 (Fàngxià yì fàngxià)
何處來牽掛 (Hé chǔ lái qiānguà)
做個無心人 (Zuò gè wúxīn rén)
笑談星月大 (Xiào tánxīng yuè dà)
Lâchez prise, lâchez prise
De quoi faut-il s’inquiéter ?
Soyez un avec peu de soucis
Admirez la magnifique lune et les étoiles.
Le Tao du thé consiste à cultiver l’esprit et le tempérament. En dégustant du thé, on réfléchit sur l’amertume, la simplicité et la clarté pour mieux comprendre la vie et s’éveiller aux principes profonds de l’univers.
Rédacteur Charlotte Clémence
Source : From Mundane to Medicinal, Ceremonial and Spiritual – Exploring China’s Rich Tea Culture
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