Alors que le débat public fait rage autour des propos tenus par le dirigeant chinois Xi Jinping à Vladimir Poutine – selon lesquels l’espérance de vie humaine pourrait atteindre 150 ans au cours de ce siècle –, plusieurs entreprises de biotechnologie chinoises alimentent les spéculations selon lesquelles cet objectif de longévité pourrait être atteint prochainement. Leurs déclarations ont relancé l’attention portée au controversé Projet 981 des dirigeants , un programme dont on soupçonne depuis longtemps qu’il vise à prolonger la durée de vie des élites du Parti communiste chinois (PCC).
Selon les médias américains, Liu Qinghua, directeur technique de Lonvi Biosciences, a balayé le scepticisme entourant la remarque de Xi Jinping sur les « 150 ans », affirmant : « Vivre jusqu’à 150 ans est tout à fait réaliste. Cela deviendra réalité d’ici quelques années. »
Liu Qinghua a ajouté que les progrès en matière de longévité sont rapides. « D’ici cinq à dix ans, plus personne ne mourra du cancer », a-t-il affirmé.
Fondée en 2022, Lonvi Biosciences a installé un laboratoire dans un complexe commercial de Shenzhen et a mis au point une capsule anti-âge à base d’extraits de pépins de raisin. Des recherches antérieures menées par des scientifiques de Shanghai ont montré qu’un composé naturel présent dans les pépins de raisin, la procyanidine C1 (PCC1), pouvait ralentir le vieillissement chez les souris et prolonger leur espérance de vie de 9,4 %.
Lonvi présente son produit comme faisant partie d’un « système de santé global », affirmant que, combiné à de saines habitudes de vie, il pourrait permettre de vivre jusqu’à 100, voire 120 ans.
Le marché chinois de la longévité en plein essor
Certains n’en sont pas vraiment convaincus. Les détracteurs soutiennent que la durée de vie humaine est fondamentalement déterminée par des limites naturelles et que toute tentative de la prolonger artificiellement « défie l’ordre naturel des choses ».
L’entreprise Time Pie, basée à Shanghai et initialement spécialisée dans les compléments alimentaires, organise désormais des conférences scientifiques et publie un magazine intitulé « Vieillir lentement, bien vivre ».
Son cofondateur, Gan Yu, explique que la longévité était autrefois un sujet de niche réservé aux Américains fortunés, mais que de plus en plus de Chinois y portent désormais un intérêt certain et disposent des moyens financiers nécessaires.
Lors d’une récente conférence internationale à Shanghai, des scientifiques chinois et étrangers ont présenté des recherches sur le vieillissement, tandis que des vendeurs promouvaient des crèmes au collagène, des élixirs à base de plantes, des chambres cryogéniques et des caissons d’oxygène sous pression – autant de solutions présentées comme des moyens de ralentir le vieillissement.
Une autre entreprise shanghaienne, Rui Jian Future, affirme que « la technologie peut stopper le vieillissement ». Elle invite ses clients à tester sa « boîte magique anti-âge » – une chambre refroidie à -128 °C. Les participants, selon les témoignages, n’y restent que quelques secondes avant de se précipiter dehors, tremblant de manière incontrôlable.
À Chengdu, la société de santé Chunshang exploite ce qu’elle qualifie de « plus grand hôpital de longévité » au monde. Ce projet promeut un concept baptisé « Île Immortelle », décrit comme un complexe médical de luxe proposant des analyses sanguines et des soins préventifs. Son fondateur, Li Dale, a refusé de préciser l’emplacement de cette île, se contentant d’affirmer qu’il s’agirait d’un « lieu exotique dédié à la longévité ».
Parallèlement, Immortal True Dragon Fund, un groupe d’investissement basé à Singapour et dirigé par le ressortissant chinois Wang Boyang, explore les opportunités commerciales offertes par la cryoconservation, l’impression 3D d’organes et le « remplacement du corps tout entier » – des concepts qui, selon certains critiques, pourraient soulever des questions d’éthique.
Le Dr David Barzilai, fondateur de Barzilai Longevity Consulting aux États-Unis, a souligné que les traitements dont l’efficacité a été prouvée chez l’animal sont rarement transposables directement à l’homme.
Il a cité l’exemple de la rapamycine, un composé qui prolonge significativement la durée de vie des souris, mais dont les effets sur les adultes en bonne santé restent incertains.
Barzilai a fait remarquer que si Pékin accorde une priorité croissante à la recherche sur la longévité, « une forte volonté politique ne garantit ni la qualité de la recherche ni le succès des applications cliniques »
L’ombre du Projet 981 des dirigeants
L’intérêt croissant pour la lutte contre le vieillissement a ravivé le souvenir d’une vidéo virale sur WeChat de 2019 faisant la promotion du Projet santé des dirigeants 981, qui prétendait pouvoir prolonger la durée de vie des hauts dirigeants du Parti jusqu’à 150 ans. La vidéo a été rapidement supprimée.
Selon des descriptions publiées précédemment en ligne, le Projet 981 des dirigeants a été lancé en 2005 et comprenait trois sous-programmes :
● Projet de Promotion de la Santé (Jeunesse Éternelle)
● Projet de Régénération (Rajeunissement)
● Projet de Longévité à 150 Ans (Prolongation de la durée de vie)
Le projet impliquait des institutions telles que l’Hôpital Général de l’Armée populaire de libération (Hôpital 301) et l’Académie des Sciences Médicales Militaires.
Les archives publiques montrent que le Groupe 981 Santé Technologie a été fondé dans le district de Haidian à Pékin en mars 2014, avec Zhao Wei comme président et Zhang Bo comme directeur général.
Ses filiales comprennent le Centre médical 981 Beijing Santé, 981 Santé Technologie (Hainan) Co., Ltd., et le Centre 981 de prévention et de traitement des tumeurs.
Les supports promotionnels vantaient « des décennies d’expérience dans les soins de santé d’élite », affirmant avoir traité « plus de 3 000 membres de haut niveau » depuis 2004. Les slogans publicitaires sur Douyin étaient les suivants :
- Une santé de fer jusqu’à 88 ans, une longévité jusqu’à 150 ans, ce n’est plus un rêve
- Découvrez 981 : une vie renouvelée pour l’élite
- Pour ceux qui recherchent la jeunesse éternelle
Indignation publique face aux questions d’éthique
Les commentaires sur les réseaux sociaux ont exprimé de l’inquiétude. Un internaute a écrit : « Quelqu’un a appelé pour se renseigner sur les greffes d’organes ; le personnel lui a demandé de quel âge il voulait les organes ! Ces organes sont-ils cultivés comme des poireaux ? »
Un autre a déclaré : « Vous utilisez la vie des jeunes pour prolonger celle des personnes âgées et puissantes, ce qui viole les lois de l’univers. »
D’autres ont remis en question la moralité de tels programmes, écrivant : « Qu’est-ce qu’un “client de haut niveau” ? Toute vie a la même valeur. »
Le juriste australien Yuan Hongbing a déclaré au journal The Epoch Times que, depuis l’ère maoïste, le PCC a maintenu un système de santé secret pour ses hauts dirigeants. Il a décrit le Projet 981 comme une « version améliorée » de ce réseau sous Jiang Zemin et Hu Jintao, liant son évolution à l’expansion du secteur chinois de la transplantation d’organes.
Yuan a affirmé que ce programme poursuit un double objectif : générer des profits pour les cercles du pouvoir élitistes et fournir des organes aux hauts responsables du Parti, tout en étant utilisé pour influencer les élites étrangères par le biais de faveurs médicales illicites.
L’Organisation mondiale pour enquêter sur la persécution du Falun Gong (WOIPFG) a cité des données des médias d’État chinois montrant qu’après le début de la persécution du Falun Gong par le PCC en 1999, le nombre de transplantations d’organes en Chine a considérablement augmenté.
Les données de WOIPFG, basées sur des reportages des médias d’État chinois, indiquent qu’entre 1999 et 2006, le nombre de transplantations hépatiques a explosé, passant de 135 cas en deux décennies à plus de 15 000 en seulement huit ans.
Des défenseurs des droits humains alertent sur le fait que désormais ce trafic d’organes s’étend au-delà des pratiquants de Falun Gong pour inclure des citoyens ordinaires, en particulier des jeunes, des enfants et des nourrissons. Les millions de disparitions signalées chaque année plongent des familles à travers la Chine en quête de réponses dans le désespoir.
Rédacteur Yasmine Dif
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