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Monde. Jimmy Lai et  la loi sur la  sécurité nationale de Hong Kong

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La Haute Cour de Hong Kong a rendu son verdict

Le 15 décembre 2025, la Haute Cour de Hong Kong a rendu son verdict dans l’affaire contre Jimmy Lai, fondateur de Apple Daily et ancien président de Next Digital, pour violation de la loi sur la sécurité nationale de Hong Kong et sédition. Ce procès historique pour atteinte à la sécurité nationale est intervenu au lendemain de l’annonce de la dissolution du Parti démocrate de Hong Kong.

La Haute Cour de Hong Kong a rendu son verdict dans l’affaire contre Jimmy Lai, pour violation de la loi sur la sécurité nationale de Hong Kong et sédition, le déclarant coupable des trois chefs d’accusation. Ce procès pour atteinte à la sécurité nationale a duré 156 jours. Le verdict a été rendu au lendemain de l’annonce de dissolution du Parti démocrate de Hong Kong, le 14 décembre. C’est un symbole fort qui révèle la double atteinte aux libertés politiques et de la presse à Hong Kong.

De nombreuses organisations de défense de la liberté de la presse et des groupes hongkongais à l’étranger considèrent ce verdict comme un coup fatal porté à la liberté de la presse à Hong Kong et appellent à une mobilisation internationale accrue.

Jimmy Lai reconnu coupable, le prononcé de la peine se fera en 2026

Trois juges désignés pour les affaires de sécurité nationale : Esther Toh, Alex Lee et Susana Maria D’Almada Remedios, ont déclaré à l’unanimité Jimmy Lai coupable de deux chefs d’accusation de « complot en vue de collusion avec des forces étrangères ou extérieures pour mettre en danger la sécurité nationale » et d’un chef d’accusation de « complot en vue de publier des écrits séditieux ». 

Le jugement de 855 pages décrit Jimmy Lai comme le « cerveau » de l’opération, l’accusant d’avoir voulu déstabiliser le gouvernement du Parti communiste chinois (PCC) et d’avoir poursuivi ses activités clandestinement même après l’entrée en vigueur de la loi sur la sécurité nationale.

L’affaire est ajournée au 12 janvier prochain pour l’examen des circonstances atténuantes et le prononcé de la peine. Jimmy Lai encourt la réclusion à perpétuité. Ce verdict historique en matière de sécurité nationale fait suite à la dissolution officielle du Parti démocrate la veille, les deux événements se déroulant à moins de 48 heures d’intervalle, symbolisant ainsi le double recul des libertés politiques et de la presse à Hong Kong. 

Parallèlement, le récent incendie meurtrier du tribunal Wang Fuk a mis en lumière la corruption et le manque de contrôle des autorités, soulignant une fois de plus l’insertion de Hong Kong dans un système calqué sur celui de la Chine continentale. Cela confirme que le principe de : Un pays, deux systèmesn’est plus qu’un leurre.

Un verdict qui questionne sur la liberté de la presse à Hong Kong 

Jimmy Lai et la loi sur la sécurité nationale de Hong Kong
Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a condamné cette détention comme étant une « persécution honteuse ». Ce Comité a souligné que le seul « crime » de M. Lai était de diriger un journal et de défendre la démocratie. (Image : wikimedia / 海彥, Voice of America / Domaine public)

Jimmy Lai, aussi connu sous le nom de Lai Chee-ying, est le fondateur d’Apple Daily et l’ancien président de Next Digital. Âgé de 78 ans, il est détenu depuis plus de cinq ans (soit plus de 1 800 jours). Il a été principalement placé en isolement. De plus, sa santé s’est rapidement détériorée. Ainsi, il souffre de diabète, d’hypertension et de problèmes cardiaques. Il présente aussi une perte de poids, un décollement des ongles et des caries dentaires.

Le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire avait statué en 2021 sur les conditions de sa détention : précisant qu’elle était « illégale et arbitraire ». Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a condamné cette détention comme étant une « persécution honteuse ». Ce Comité a souligné que le seul « crime » de M. Lai était de diriger un journal et de défendre la démocratie.

Reporters sans frontières (RSF) a qualifié le verdict de « condamnation à mort pour la liberté de la presse ». L’Association des médias de Hong Kong à l’étranger a qualifié l’affaire de « liquidation politique à outrance ». Elle a critiqué la criminalisation de la liberté d’expression et le remplacement des jurys par des juges désignés : ce qui porte gravement atteinte à la crédibilité du système judiciaire. L’association a exhorté les gouvernements de Hong Kong et du centre du pays à respecter la Loi fondamentale et la Déclaration conjointe sino-britannique, et à abandonner les accusations injustifiées. Elle a appelé à une responsabilité internationale en matière de droits humains.

Des groupes de Hong Kong à l’étranger établissent un lien entre l’affaire de Jimmy Lai, la dissolution du Parti démocrate et l’incendie du palais de justice Wang Fuk. Ils y voient des symboles du déclin général des libertés à Hong Kong. L’incendie du palais de justice Wang Fuk s’est déclaré le 26 novembre et a duré pendant plus de 43 heures, faisant au moins 160 morts (dont un pompier), 79 blessés et 6 disparus. C’est l’incendie le plus meurtrier à Hong Kong depuis près de 80 ans.

Déclenché par des matériaux d’échafaudage inflammables utilisés pour des travaux de rénovation, le feu a rapidement ravagé sept bâtiments, révélant des pratiques de corruption liées à des ententes illicites, des systèmes d’alarme incendie défectueux et des manquements réglementaires. Dès 2024, les habitants s’étaient plaints en vain des risques encourus. Cet incident illustre aussi l’absence de liberté de la presse, les médias indépendants n’ayant pu exercer de contrôle, à l’instar des incendies survenus à Urumqi pendant la pandémie ou des projets de valorisation des résidus de tofu à Wenchuan, dans le Sichuan.

Lien Canada-Hong Kong : le Canada ne devrait pas faire affaire avec le PCC

Andy Wong, président de Lien Canada-Hong Kong, a qualifié le jugement d’« absurde » dans une interview accordée à Vision Times. Il a dénoncé des preuves fragiles et des affaires de sécurité nationale « condamnées sans exception », transformant ainsi le pouvoir judiciaire en instrument politique. Ce jugement ne vise pas seulement Jimmy Lai personnellement, mais sonne le glas de la liberté de la presse et marque la fin de l’ère des médias indépendants.

Selon lui, l’affaire Lai et la dissolution du Parti démocrate sont des événements à la fois coïncidents et symboliques. Ils annoncent conjointement la « fin » des libertés politiques et de la presse à Hong Kong. Dès l’affaire des « 47 personnes » et l’arrestation de Jimmy Lai, les libertés étaient déjà en péril. Il ne s’agit plus que du point de non-retour. La dissolution du Parti démocrate signifie la fin de la participation modérée des pro-démocratie, le Conseil législatif ne comptant plus que sur la voix des « patriotes » pour gouverner Hong Kong.

Andy Wong a déclaré que la liberté de la presse à Hong Kong est « pratiquement perdue ». Après la fermeture d’Apple Daily et de Stand News, le journalisme d’investigation a disparu. L’incendie de Wang Fuk Court est dû à un manque de surveillance : les risques liés au bâtiment (comme la manipulation des appels d’offres) ayant été longtemps ignorés. Les médias indépendants étrangers comblent ce vide. Ils rassemblent des preuves dans les archives publiques et informent Hong Kong sur la réalité des faits, tout en avertissant les gouvernements démocratiques : Hong Kong n’est pas différent de la Chine continentale, le principe Un pays, deux systèmess’étant effondré.

Lors des élections du Conseil législatif du 7 décembre, Andy Wong a décrit ce dernier comme une « assemblée législative de patriotes » sans véritable débat et sans place pour l’opposition. Après l’incendie, aucun législateur n’a osé réclamer justice. Les Hongkongais ont besoin d’une défense des droits similaire à celle de la Chine continentale, utilisant l’espace limité pour se protéger. Il a exhorté les Hongkongais restants à garder espoir et à rester unis, en tirant le meilleur parti de l’espace restant pour se prémunir contre les dangers.

L’Association Lien Canada Hong Kong fait pression depuis longtemps sur le gouvernement canadien pour qu’il sanctionne les responsables hongkongais et appelle à la prudence dans les échanges commerciaux entre Hong Kong et la Chine continentale. Elle met en garde contre les risques élevés d’accusation de « collusion avec des forces étrangères ». Le Canada devrait diversifier ses échanges commerciaux avec l’UE, le Japon, la Corée du Sud et l’Asie du Sud-Est, sanctionner les responsables de Hong Kong et défendre les droits de la personne.

Le groupe continuera de faire pression pour une enquête transparente sur l’incendie. Andy Wong a souligné que l’affaire Lai, la dissolution du Parti démocrate et l’incendie meurtrier de Hong Kong sont autant de symboles du déclin des libertés. La communauté internationale ne peut rester les bras croisés, a-t-il affirmé.

L’intégrité de Jimmy Lai est admirable

Jimmy Lai et la loi sur la sécurité nationale de Hong Kong
Kwan Cheuk-chung, coprésident de l’Association torontoise pour la démocratie en Chine (TADC), a exprimé son inquiétude quant à la santé de Jimmy Lai lors d’une entrevue accordée àVision Times, qualifiant de « véritable abus » contre l’humanité cinq années d’isolement cellulaire pour un homme de près de 80 ans. (Image : wikimedia / Iris Tong / Domaine public)

Kwan Cheuk-chung, coprésident de l’Association torontoise pour la démocratie en Chine (TADC), a exprimé son inquiétude quant à la santé de Jimmy Lai lors d’une entrevue accordée à Vision Times, qualifiant de « véritable abus » contre l’humanité cinq années d’isolement cellulaire pour un homme de près de 80 ans.

Il espère que la peine tiendra compte du temps déjà purgé, en imposant cinq ans et demi afin que Jimmy Lai soit « libéré », ou en appliquant une « libération conditionnelle pour raisons médicales ». Il prédit que Pékin évitera que Jimmy Lai ne meure en prison pour échapper à la condamnation internationale comme ce fut le cas pour Liu Xiaobo, et pourrait faire preuve de clémence. Il exhorte les États-Unis à faire pression pour obtenir une libération inconditionnelle : autrement, une peine de 10 ans serait insupportable.

Kwan Cheuk-chung a salué la décision de Jimmy Lai de rester à Hong Kong malgré les risques, la qualifiant de « sacrifice désintéressé » pour la liberté et de témoignage de son intégrité remarquable.

Il s’est dit quelque peu surpris par la dissolution du Parti démocrate, mais l’a profondément regrettée. Face au blocage de toutes les voies par le gouvernement, cette dissolution est devenue un acte désespéré de « survie ». Elle reflète une grave détérioration du climat politique, ne laissant aucune place à l’opposition.

Kwan Cheuk-chung a comparé l’incendie du palais de justice Wang Fuk aux catastrophes survenues en Chine continentale, causées par la corruption et le manque de contrôle. Hong Kong est « continentalisée », la presse, l’État de droit, les droits de l’homme et la liberté d’expression y ont disparu. Le principe Un pays, deux systèmesest mort. Dans ces vieux bâtiments dangereux, sans médias indépendants, les tragédies sont difficiles à éviter.

Kwan Cheuk-chung a souligné que TADC continuera de se faire entendre, plaidant pour la libération de Jimmy Lai et des enquêtes indépendantes sur l’incendie, tout en exerçant une pression internationale accrue.

Un verdict politique

Le Comité pour la liberté à Hong Kong (CFHK) a publié une déclaration cinglante le 15 décembre, qualifiant le verdict de « manœuvre politique déguisée en justice » et de « fraude judiciaire », affirmant qu’il ne s’agit pas seulement d’une persécution de Jimmy Lai, mais aussi de la destruction totale de la réputation de Hong Kong en tant que centre mondial de l’État de droit.

Mark Sabah, directeur du CFHK pour le Royaume-Uni et l’Europe, a souligné que le traitement infligé à Jimmy Lai, citoyen britannique, témoigne de la faiblesse de la politique du gouvernement britannique à l’égard de la Chine. Il a exhorté le Premier ministre Keir Starmer à faire de la libération de Jimmy Lai une condition sine qua nonde sa visite en Chine en janvier prochain : faute de quoi il devrait la reporter. Il devrait aussi imposer immédiatement des interdictions de voyager et des gels d’avoirs aux trois juges de la sécurité nationale impliqués, et exiger la démission de tous les juges étrangers en poste à Hong Kong.

Le directeur de CFHK aux États-Unis, Jonathan Stivers, a souligné que le seul « crime » de Jimmy Lai est d’avoir défendu les valeurs de liberté. Il a exhorté l’Administration Trump à demander immédiatement des comptes aux responsables chinois et hongkongais et à accélérer l’adoption de la loi sur la certification des bureaux économiques et commerciaux de Hong Kong et de la loi sur les sanctions judiciaires à Hong Kong : afin de mettre fin à l’influence extraterritoriale du PCC.

CFHK a réaffirmé que la communauté internationale doit se tenir aux côtés de Jimmy Lai et de tous les prisonniers politiques face au contrôle autoritaire de Pékin.

Ce verdict était attendu souligne CKHK, mais il met en lumière la chute du système judiciaire hongkongais et l’effondrement de la liberté de la presse. L’organisation poursuivra ses actions à l’échelle mondiale, en sanctionnant les personnes impliquées et en respectant ses engagements envers Hong Kong.

Rédacteur Charlotte Clémence

Source : Jimmy Lai Convicted in Landmark Hong Kong National Security Case

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