Histoire. Nicolas-Jacques Conté, un inventeur exceptionnel et prolifique au service des autres

L'inventeur et producteur des crayons modernes Conté, que nous utilisons encore aujourd'hui, fut à la source de nombreuses autres recherches, créations ou améliorations. Nicolas-Jacques Conté ne ménagea pas sa peine au service de la France, dans cette période tumultueuse de la fin du XVIIIe siècle.

Nicolas-Jacques Conté, dessinateur et peintre autodidacte, créateur de crayons modernes

En 1794, les armées de la toute nouvelle République française menaient des offensives sur de nombreux fronts. Cependant l'Angleterre imposait à la France un strict blocus maritime, empêchant l'approvisionnement de nombreux produits. Et le crayon de graphite, indispensable aux artisans et artistes, autant qu'aux officiers, ingénieurs et topographes militaires, commençait à manquer . Car il était fait jusqu'ici d'un graphite (élément minéral naturel) très pur, extrait des mines du comté de Cumberland en Angleterre.

Confrontée à une possible pénurie, l'Agence des mines sollicita Nicolas-Jacques Conté, mécanicien, physicien et chimiste, pour trouver une alternative au graphite anglais. Conté était un inventeur aux nombreuses compétences, déjà bien connu dans les domaines du dessin, de la peinture et de l'aérostation. Il avait, selon la bonne formule du mathématicien Monge « toutes les sciences dans la tête et tous les arts dans la main ». En peu de temps, Conté réussit à créer et mettre au point une mine de crayon à base de graphite ordinaire et d'argile, cuite à haute température.

Ce crayon moderne était d'un coût peu élevé grâce à deux avantages, le graphite ordinaire était très abondant et la fabrication pouvait être industrialisée. Selon la température de cuisson et la proportion de graphite et d'argile, la mine était plus ou moins dure et plus ou moins grasse. Elle était protégée par deux demi-cylindres de cèdre ou de genévrier. Rapidement, le crayon Conté fut réputé pour sa qualité et son utilisation pratique. 

Quelques années après la création de ce crayon moderne, Nicolas-Jacques Conté mit au point des crayons à mines nues, remplaçant ceux faits en « pierre d'Italie ». Il réussit à produire des couleurs fixes et inaltérables, répondant ainsi aux attentes des peintres. Ces crayons d'art et pastels furent les ancêtres des Carrés d'aujourd'hui. La qualité des produits et l'étendue de la gamme des produits Conté conquit les artistes amateurs ou étudiants en Beaux-Arts, ainsi que les plus grands maîtres de la peinture. 

Quand Conté meurt en 1805, son fils et son gendre prirent le relais et fondèrent la société Conté-Humblot et compagnie. « La démocratisation de l’écriture puis l’école obligatoire de Jules Ferry permettent aux ventes de s’envoler et à l’entreprise de se développer », indique le site inpi.fr dans l'article À l’heure de la rentrée, découvrez l’histoire du crayon Conté. Le site culture.cnam.fr, dans l'article Nicolas-Jacques Conté, constate : « Cette invention reste aujourd’hui encore incontournable dans les ateliers d’artiste comme dans les trousses d’enfant ».  

« Comme dans toutes ses autres inventions, Conté ne pensa jamais à ses intérêts personnels. Il fallut toute l'insistance de ses amis pour le déterminer à prendre, en 1795, le privilège de la fabrication des crayons », peut-on lire sur le site internet Wikipédia, dans l'article Nicolas-Jacques Conté.

Les capacités d'apprentissage et d'innovation hors pair de Nicolas-Jacques Conté

Issu d'une famille modeste, Nicolas-Jacques Conté naquit en 1755 dans un petit village de l'Orne. Il perdit son père très jeune et fut élevé par sa mère. Dès sa petite enfance, il montra un esprit passionné, inventif, créateur. Selon l'article Conté (Nicolas-Jacques) du site france-pittoresque.com, « Il n’avait pas douze ans qu’avec un mauvais couteau il se façonnait un violon fort passable ». Avec un simple charbon de bois aiguisé, il dessinait. Plus tard, il fabriqua ses propres couleurs pour peindre. Son père était jardinier, il demeura, lui, cultivateur, durant plusieurs années, et l'agriculture lui fut un champ pratique d'application et d'expérimentation pour nombre de ses premières inventions.

Heureusement, le jeune Nicolas-Jacques fut remarqué et encouragé par l'évêque de Séez et la Mère supérieure de l'Hôtel-Dieu, à peindre pour cet établissement, et ses peintures ornent encore aujourd'hui l'église de l'hôpital. Il se fit aussi portraitiste et les gens appréciaient et achetaient ses portraits rapides, ressemblants et aux couleurs contrastées. Il se maria et ses œuvres purent subvenir aux dépenses du ménage. En parallèle, il prenait des cours de physique, de mécanique, d'anatomie et de chimie.

Pendant la Révolution française, la France fut attaquée par des forces armées étrangères. Conté fut sollicité et se retrouva à la tête d'une équipe de savants, dans le but d'améliorer le fonctionnement des aérostats (ballons dirigeables) et les rendre plus efficaces dans les opérations militaires. Conté et ses collègues firent de nombreuses expériences pour tester différents éléments des aérostats. 

Une nuit, affairé à une expérience concernant les effets de différents gaz sur différentes enveloppes d'aérostats, Nicolas-Jacques fut victime d'un accident. Une porte laissée entrouverte suffit pour qu'un léger courant d'air entraînât un gaz hydrogène jusqu'à une lampe. L'explosion fut terrible, tous les instruments et fioles de verre volèrent en éclats. Conté en reçut sur toutes les parties du corps. Son œil gauche, gravement atteint, perdit la vue.

Conté participa à la fondation, avec le mathématicien Vandermonde et le physicien Le Roy, du Conservatoire national des arts et métiers. Cet établissement permettait de rassembler en un seul endroit les modèles des outils et machines de l'époque et les nouvelles inventions.

Un créateur et un organisateur impressionnant au sein de l'expédition d'Égypte

Nicolas-Jacques n'en avait pas fini avec les inventions, les créations et les adaptations. Il fut appelé à rejoindre avec d'autres savants, l'expédition scientifique qui accompagnait la campagne militaire d'Égypte menée par le général Bonaparte et ses successeurs de 1798 à 1801. Cette campagne militaire avait pour but de conquérir l'Égypte et une partie de l'Orient, dans une lutte de pouvoir pour contrer les ambitions coloniales de l'Angleterre, particulièrement en Inde.

Conté allait trouver en Égypte un champ plus vaste pour mettre en œuvre ses talents d'invention et d'organisation. Il fut impressionnant par toute l'aide qu'il put apporter à beaucoup de personnes dans des domaines très variés.

À Alexandrie, que les Anglais menaçaient de conquérir, il fit construire en deux jours, au Phare, des fourneaux à boulets rouges. Ce qui permit d'éloigner les Anglais et donna le temps de fortifier la place. 

Au Caire, il vint à la tête d'une armée d'habiles ouvriers, qu'il avait en partie formés. Cependant, l'outillage et les machines envoyés de France avaient disparu. Il fallut tout créer, à commencer par les outils eux-mêmes. Toutes sortes d'outils, de machines et de procédés de fabrication apparurent, jusqu'ici inconnus en Égypte. Une bonne partie des industries et des arts de l'Europe furent improvisés dans ce pays par l'intelligence encyclopédique de Conté.

Avec bienveillance et simplicité, il visita les manufactures des Égyptiens autochtones. Il dessina leurs costumes, leurs machines. Il enseigna parfois aux ouvriers des procédés plus faciles ou des améliorations à leur portée. Il souhaitait que les habitants profitent aussi de ses travaux.

Napoléon le décrivit ainsi: « …Conté, qui était à la tête des aéronautes, homme universel, ayant le goût, les connaissances et le génie des arts, précieux dans un pays éloigné, bon à tout, capable de créer les arts de la France au milieu des déserts de l'Arabie ». 
De retour en France, il fut l'un des fondateurs de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale. Son but était de rassembler les génies de la France, soutenir leurs idées, financer leurs projets pour rattraper et concurrencer l'industrie britannique. Au sein de la Société d'encouragement, Conté occupa le rôle d'expert chargé de proposer, évaluer, promouvoir les projets industriels novateurs.

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