Histoire. L’origine de la fête de la Mi-Automne : voyage au cœur d’une tradition millénaire

Chaque 15ème jour du 8ème mois lunaire, des millions de familles chinoises se réunissent pour célébrer la fête de la Mi-Automne. Mais connaissez-vous l’origine de la fête de la Mi-Automne ? De l’Antiquité aux dynasties Ming et Qing, cette célébration ancestrale a traversé les siècles, portant en elle les valeurs de gratitude, de piété filiale et d’harmonie céleste qui fondent la civilisation chinoise.

De l’Antiquité à la dynastie Zhou (1046-256 av. J.-C.) : des rites impériaux antiques aux célébrations populaires

Le Zhouli (周礼, Rites des Zhou) précise dans le commentaire de Zheng Xuan : « L’Empereur doit honorer le soleil à l’équinoxe de printemps et la lune à l’équinoxe d’automne ». Les Empereurs de l’Antiquité honoraient donc le soleil au printemps et la lune en automne. Pourquoi vénérer ces astres ? Le Guoyu (国语) l’explique : « Pour honorer respectueusement les divinités ».

L’équinoxe d’automne correspond au 15^ème jour du 8^ème mois lunaire, également appelé « Mi-Automne » (zhongqiu 仲秋). Cette période marque les récoltes automnales. La coutume populaire « d’honorer la lune à la Mi-Automne » célébrait les moissons et remerciait également les divinités de la terre pour une année de climat favorable et de paix familiale. C’est pourquoi on l’appelait aussi « fête des moissons ». Ces rituels impériaux et populaires constituent les racines anciennes de cette tradition, transmise jusqu’à nos jours.

Époque Wei-Jin (220-420)

Le Jinshu (晋书, Livre des Jin) mentionne Yuan Hong « admirant la lune par une nuit d’automne ». Yuan Hong était un lettré, historien et homme politique de la dynastie Jin de l’Est (東晉, 317-420). Cette mention montre que ce n’est qu’à partir de cette époque que naquit véritablement la coutume d’admirer la lune lors des soirées automnales.

Fin de la dynastie Sui (581-618)

À la fin de la dynastie Sui (581-618), les armées rebelles se soulevèrent contre le régime. En l’an 617, le 15^èmejour du 8^ème mois lunaire, le chef rebelle Pei Ji inventa des « galettes » rondes comme provisions militaires, inspiré par la pleine lune. Cette innovation résolut le problème du ravitaillement et attira de nombreux insurgés à sa cause. C’est l’origine primitive de la coutume de manger des yuebing (月饼, gâteaux de lune) le 15 du 8^ème mois lunaire.

L’âge d’or de la dynastie Tang (618-907)

Après la fondation de la dynastie Tang (618-907), ces galettes rondes devinrent une récompense offerte par la cour aux soldats et fonctionnaires chaque 15^ème jour du 8^ème mois. Parallèlement, la cour et le peuple perpétuèrent la tradition « d’honorer la lune à la Mi-Automne » : les familles se réunissaient pour dîner ensemble, honorer la lune, vénérer les ancêtres et remercier le Ciel et les aïeux pour leur protection. 

La « Mi-Automne » fut officiellement établie comme fête, appelée « fête de la Mi-Automne », fixée au 15^ème jour du 8^ème mois lunaire. Le Tangshu (唐书, Livre des Tang) mentionne expressément « la fête de la Mi-Automne du 15^ème jour du 8^ème mois ».

L’ouvrage Kaiyuan Tianbao Yishi (開元天寶遺事, Anecdotes oubliées des ères Kaiyuan et Tianbao) de Wang Renyu (王仁裕, 880-956) décrit : « Par une soirée de Mi-Automne, l’Empereur et sa noble épouse contemplaient la lune près de l’étang Taiye ». Les familles impériales et les lettrés Tang appréciaient donc particulièrement d’admirer la lune lors de ces soirées. À cette époque, les gens se réunissaient en famille, dînaient ensemble, honoraient la lune, vénéraient les ancêtres et l’admiraient, mais seules la famille impériale et les hauts fonctionnaires consommaient les galettes rondes.

Fin de la dynastie Yuan (1271-1368) : quand les gâteaux de lune devinrent symboles de résistance

Une autre légende entoure l’origine de la fête de la Mi-Automne et de ses gâteaux emblématiques. À la fin de la dynastie Yuan (1271-1368), l’oppression ethnique, les taxes écrasantes et les catastrophes naturelles successives plongèrent le peuple dans la misère et exacerbèrent les tensions. Les Han, ne supportant plus la tyrannie Yuan, se soulevèrent en masse. 

Face à la surveillance stricte des troupes gouvernementales, Zhu Yuanzhang (朱元璋, 1328-1398), pour coordonner les insurgés, utilisa une stratégie de son conseiller Liu Bowen (刘伯温, 1311-1375) : cacher des messages « soulèvement le 15^ème jour du 8^ème mois » à l’intérieur de galettes distribuées aux chefs rebelles. Le soulèvement réussit et, le 15 août 1368, Zhu conquit Dadu, la capitale Yuan (aujourd’hui Beijing). Les Mongols se retirèrent dans les steppes. 

Zhu Yuanzhang ordonna des célébrations générales, nommant ces galettes yuebing (gâteaux de lune) et organisa de grands banquets. Dès lors, les gâteaux de lune devinrent un mets incontournable de la fête de la Mi-Automne, avec des recettes de plus en plus raffinées et des variétés toujours plus nombreuses.

Dynasties Ming (1368-1644) et Qing (1644-1912) : l’apogée d’une grande fête traditionnelle

Ce n’est qu’aux époques Ming (1368-1644) et Qing (1644-1912) que la fête de la Mi-Automne devint l’une des grandes fêtes traditionnelles chinoises, au même rang que le Nouvel An chinois lunaire, la fête de Qingming (清明节), la fête de Chongyang (重阳节) et la fête des Bateaux-Dragons (端午节). 

Selon le Jinling Quanshu - Zhengde Jiangning Xianzhi (金陵全书-正德江宁县志) de Huang Zuo (黄佐, dynastie Ming), un document administratif local de Nanjing datant du début du XVIe siècle qui témoigne des pratiques culturelles de l’époque, lors de la soirée de Mi-Automne, chaque famille se réunissait pour dîner, honorer la lune en priant pour les bénédictions, vénérer les ancêtres pour leur protection, admirer la lune et déguster des gâteaux de lune en célébrant la réunion familiale.

Sagesse de vie : les valeurs éternelles de la Mi-Automne

La fête de la Mi-Automne nous rappelle l’importance des réunions familiales, de la gratitude envers le Ciel et les ancêtres et de la contemplation des cycles naturels. Ces traditions millénaires continuent d’enrichir la vie des familles chinoises à travers le monde, transmettant de génération en génération les valeurs de piété filiale, d’harmonie et de respect du divin qui sont au cœur de la culture traditionnelle chinoise.

Dans un monde moderne souvent agité, cette fête ancestrale nous invite à lever les yeux vers la lune, symbole d’unité et de plénitude et à nous souvenir que certaines valeurs transcendent le temps : la reconnaissance, la famille et la connexion avec le Ciel.

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