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Culture. Au-delà de la fête du même nom, qui était réellement Saint Valentin

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La Saint Valentin reste pour beaucoup une fête romantique célébrée le 14 février. Toutefois il est assez rarement fait état de Saint Valentin qui aurait vécu dans la Rome antique et aurait été un martyr. Certains parlent aussi de trois saints du même nom. Mais dans les faits, il est surtout fait mention de Valentin de Terni qui aurait vécu au IIIe siècle. Alors, qui était ce Saint Valentin ?

Saint Valentin aurait été un prêtre thaumaturge

Valentin de Terni est décrit comme : « un jeune prêtre thaumaturge d’environ 18 ans, dont le corps fut découvert dans les catacombes de Saint-Hippolyte en 1831, sous le pape Grégoire XVI, avec l’inscription " Valentinus in pace " », par le site Nominis, le site des Évêques de France consacré à la vie des Saints du calendrier. Depuis un siècle, les reliques de Saint Valentin sont dans l’église de Saint-Rémy de Montignies-sur-Sambre, une région wallonne de la Belgique.

Dans La Légende Dorée, ouvrage en latin écrit au XIIIe siècle par le dominicain et archevêque Jacques de Voragine, la vie de Valentin de Terni est un peu plus détaillée. On apprend que ce jeune prêtre avait des dons de thaumaturge, et était réputé pour ses miracles et ses guérisons surnaturelles. Le domaine de la thaumaturgie couvre essentiellement le champ du religieux et se traduit souvent par des miracles, voire des résurrections. Ce don de thaumaturge est relié directement à Jésus-Christ, aux prophètes qui ont accompagné la venue du Christ sur Terre, mais aussi aux saints et à certains rois de France et d’Angleterre.

Au-delà de la fête du même nom, qui était réellement Saint Valentin
Saint Valentin baptisant Sainte Lucilla, tableau de Jacopo Bassano. Valentin de Terni est décrit comme étant : « un jeune prêtre thaumaturge. Son corps a été découvert dans les catacombes de Saint-Hippolyte en 1831 ». (Image : wikimedia / Jacopo Bassano (Jacopo da Ponte) / Domaine public)

Au IIIe siècle dans la Rome antique, le christianisme était encore persécuté. Souvent vue comme une religion voulant « miner l’ordre social et former un État dans l’État », ou de nuire « à la santé publique en détournant les adeptes des médecins attitrés au profit des promesses illusoires de guérison » : comme l’a précisé l’anthropologue Nathalie Lucas.

Dans une des versions de la vie de Valentin de Terni, c’est justement cet aspect qui aurait attiré l’attention des gouvernants romains. Le site Hérodote donne cette vision en abordant la guérison miraculeuse d’un membre de la famille du philosophe romain Craton : « Valentin de Terni fut sollicité pour guérir le fils d’un philosophe romain, Craton. S’étant acquitté de sa tâche avec succès, il obtint de Craton et de sa famille qu’ils se convertissent à la foi chrétienne. Mais le préfet de Rome l’ayant appris le fit alors décapiter ».

Le site Nominis cite une autre version : « L’empereur Claude voulait interdire le mariage, afin que plus d’hommes soient envoyés à la guerre. Informé que Valentin mariait les chrétiens, le préfet Placide ordonne son arrestation, le fait flageller et décapiter sur la Via Flaminia à Rome ».

Il ne semble pas y avoir de réels liens entre ces différentes versions. Les éléments inchangés restent le nom du Saint, Valentin, qui est souvent suivi par de Terni ou de Rome. Car les historiens relient ces deux noms, ou appellations, à un seul homme : un jeune prêtre possédant des dons de thaumaturge. Mais aussi celui d’un « préfet » qui serait à l’origine de la décision de décapiter Saint Valentin.

Au-delà de la fête du même nom, qui était réellement Saint Valentin
Tableau représentant Saint Valentin en prière. Il est dit que quand l’empereur Claude lui a demandé de renier sa foi, Valentin lui aurait répondu : « Si tu connaissais la grâce de Dieu, tu ne parlerais jamais ainsi, mais tu renoncerais aux idoles pour adorer Dieu, qui est au ciel ». (Image : wikimedia / David Teniers III / Domaine public)

Deux vies…, mais un seul Saint Valentin

Bien que le site Hérodote apporte sa vision de Saint Valentin, l’hagiographie de La Légende Dorée offre des informations assez fiables, selon les historiens. L’ouvrage précise qu’il s’agit d’un prêtre, à qui l’empereur Claude demanda de renier sa foi. À cette demande, Valentin lui aurait répondu : « Si tu connaissais la grâce de Dieu, tu ne parlerais jamais ainsi, mais tu renoncerais aux idoles pour adorer Dieu qui est au ciel ». Tout au long de l’interrogatoire les réponses de Valentin finissent par troubler l’empereur.


Il est dit que l’empereur Claude se serait adressé à ceux qui étaient présents en ces termes : « Romains, leur dit-il, écoutez comme cet homme parle avec sagesse et droiture », relate La Légende dorée. Mais le préfet, voyant que l’empereur Claude se laisse convaincre, l’en dissuade et confie Valentin à la garde d’un soldat. Celui-ci l’emmène chez lui. Valentin soigne sa fille qui était aveugle et convertit toute la maisonnée. Ce qui n’infléchit pas le cours de l’histoire : l’empereur le fait décapiter, en 280.

Que ce soit le site Nominis ou La Légende Dorée, la mort par décapitation a donc été la fin réservée à Saint Valentin : soit après avoir converti la famille du philosophe Craton ou celle du soldat qui avait sa garde, lors de son incarcération.

Deux vies de Saint Valentin qui semblent différentes. Mais non, apprend-on dans le Martyrologe romain qui date du XVIe siècle et a été traduit en français dans son édition de 1705. Cet ouvrage qui regroupe la liste des saints, bienheureux et martyrs reconnus par l’Église apporte un certain éclairage. « Les plus anciens exemplaires du martyrologe de S. Jérôme, expliquent l’ouvrage, le marquent ainsi : A Terni sur le chemin de Flaminius à soixante et quatre milles de Rome, S. Valentin, sans spécifier s’il était Prêtre (…) ». Ce serait cette confusion dans l’hagiographie qui aurait donné naissance à cette légende de deux saints portant le nom de Valentin : un Saint Valentin de Rome et un Saint Valentin de Terni.

L’ouvrage précise effectivement, en vieux français, que : « Ce qui a fait diviser ce Saint en deux, sont les deux diverses vies qui lui ont été dressées dans les siècles postérieurs : l’une de son Église de Rome, l’autre pour celle de Terni : la première le fait prêtre, martyrisé et inhumé ce jour-ci au Faubourg de Rome sur le chemin de Flaminius, la seconde le fait Évêque de Terni et martyrisé près cette ville ».

Mais comment un martyr décapité a-t-il pu devenir l’emblème de la Saint Valentin et de l’amour, tel que conçut au niveau terrestre, mais aussi commercial ?

Au-delà de la fête du même nom, qui était réellement Saint Valentin
Depuis un siècle, les reliques de Saint Valentin sont conservées dans l’église de Saint-Rémy de Montignies-sur-Sambre, une région wallonne de la Belgique. (Image : wikimedia / Jmh2o / CC BY-SA 3.0)

De Saint Valentin à la Saint Valentin

Le site Nominis précise que : « Saint Valentin est reconnu comme étant le patron des amoureux, de la jeunesse et des épileptiques mais aussi des voyageurs et des apiculteurs ».

Selon les diverses informations, c’est le pape Gélase qui a fixé sa fête au 14 février par un décret (en latin) publié en 495. Mais le lien avec l’aspect romantique que va revêtir cette fête n’apparaît pas encore à cette époque. Un média catholique suisse propose deux hypothèses vérifiables. La première est en lien avec l’église d’Orient et la seconde fait référence à la mythologie romaine.

Pour la première hypothèse il est dit que : « Le 14 février, les Eglises orientales fêtent " l’Hypapante " (la Sainte Rencontre) qui commémore la présentation de Jésus au temple, 40 jours après sa naissance (le 6 janvier pour les orthodoxes). La liturgie du jour reprend l’image biblique de la fiancée céleste. On serait alors passé à la fiancée terrestre et à une fête profane ».

Pour la seconde, on apprend que : « Dans la Rome antique, le 14 février était nommé les Lupercales ou festival de Lupercus, le dieu de la fertilité, représenté vêtu de peaux de chèvre. Les prêtres de Lupercus lui sacrifiaient des chèvres. Après avoir bu du vin, ils couraient dans les rues de Rome et touchaient les passants en tenant des morceaux de peau de chèvre à la main. Les jeunes femmes s’approchaient volontiers, car être touchée ainsi était censé rendre fertile et faciliter l’accouchement. Cette solennité païenne honorait Junon, déesse romaine des femmes et du mariage, ainsi que Pan, le dieu de la nature ». De cette mythologie, certains y voient l’origine de la « christianisation de cette fête païenne ».

Le site Hérodote transmet quelques informations qui complètent un peu ces deux hypothèses. Ainsi apprend-on que les « Anglais du Moyen Âge ont fait de Valentin le saint patron des amoureux car sa fête coïncide, paraît-il, avec le début de la saison des amours chez les oiseaux. Ainsi sont nées les " valentinages" : ces danses paysannes où les couples se constituent par tirage au sort. Cette tradition, attestée par le poète Chaucer en 1381, a gagné ensuite la France. En 1401, le roi de France Charles VI le Fou lui donne un singulier prolongement en choisissant le jour de la Saint Valentin pour fonder une " cour d’amour ", c’est-à-dire un cercle poétique destiné à prolonger la tradition médiévale et aristocratique de l’amour courtois », précise ce site.

L’Église catholique fera de Saint Valentin le patron des amoureux en 1496. Aujourd’hui, elle invite tout un chacun à envisager ce sentiment amoureux d’une manière plus vaste et plus profonde : « La Saint Valentin nous invite à rendre grâce pour le sentiment amoureux que Dieu fait souffler sur notre monde depuis la nuit des temps. Directement ou indirectement, aucun de nous n’est étranger à cette force de vie qui fait participer l’homme au dessein de Dieu et que chacun de nous est appelé à célébrer ! »

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