Le 15 août est le plus souvent associé en France aux jours fériés qui viennent émailler le calendrier de moments de repos ou de week-ends prolongés pour le plus grand bonheur de nombreux travailleurs. Mais pour la communauté chrétienne, ce jour est avant tout un temps sacré du calendrier liturgique. Ainsi pour les catholiques il représente la « montée au Ciel de Marie » la mère de Jésus. Ce jour est connu sous le nom de l’Assomption de Marie. C’est un temps liturgique fort, marqué par des messes et des processions.
Mais que signifie réellement le terme Assomption et pourquoi ce jour est-il considéré comme un jour férié en France ?
L’Assomption de Marie est avant tout un dogme issu du catholicisme
Le mot latin assumptio vient du verbe ad-sumere « prendre pour soi », ou « tirer à soi », précise le site Liturgie et Sacrements. Il serait à l’origine du terme Assomption qui est un terme créé par l'Église catholique pour définir la « glorification de la Mère de Dieu ».
Pour autant, ce terme d’Assomption n’a pas été utilisé à l’origine. L’Église chrétienne a tout d’abord développé la certitude que Marie, la Mère de Jésus, avait été « glorifiée dans son âme et son corps dès la fin de sa vie. Très tôt les chrétiens ont célébré cette glorification de Marie sous le nom de la Dormition de sommeil, puis sous le nom de l’Assomption de Marie. C’est cette Assomption que le pape Pie XII a proclamée, le 1er novembre 1950, dogme de foi : c’est-à-dire une vérité qui s’impose à la foi de tous les catholiques. Pie XII l’a fait en ces termes : " Marie, l’Immaculée Mère de Dieu toujours vierge, après avoir achevé le cours de sa vie terrestre, a été élevée en corps et en âme dans la gloire céleste ". Ce qui est promis à l’ensemble des hommes justes pour la résurrection générale a été accompli à Marie dès la fin de sa vie terrestre », précise le site Liturgie et Sacrements.
Ce terme Dormition vient du latin dormitio, « sommeil, sommeil éternel, mort ». C’est un mot utilisé dans le vocabulaire chrétien, pour se référer à la mort dans un état de paix spirituel des saints et des personnes pieuses fidèles. (…) Il est souvent associé à la mort de Marie, Mère de Jésus. Le terme de Dormition de la Theotokos (la Mère de Dieu) est toujours utilisé par l’Église d’Orient pour dépeindre la mort de la Vierge Marie et la montée de son corps au ciel.
Dès le Ve siècle, dans le but de vouloir étendre la religion chrétienne à l’Europe, l’évêque Cyrille d’Alexandrie (375-444) remplace une fête romaine dédiée aux victoires de l’empereur Auguste, les Ferri Augusti, par la célébration de la Sainte Vierge. Cependant, c’est l’empereur byzantin Maurice (539–602) qui mettra en place la fête de la Dormition de la Vierge Marie à la date du 15 août, pour commémorer la consécration d’une église dédiée à « la Vierge montée au ciel ».
Le 15 août, moment festif marqué par de nombreuses processions
Le 15 août est aussi un moment festif marqué par de nombreuses processions. Mais pourquoi avoir choisi cette date du 15 août ?
Tout d’abord une explication liturgique. « Quand on reprend l’histoire, l’explication la plus probable du choix de la date du 15 août a son origine dans la tradition ancienne, racontée notamment dans le Transitus B.M. Virginis, selon laquelle le corps de Marie aurait été enseveli près de Jérusalem, dans une grotte de la vallée de Josaphat (Cédron). Au concile de Chalcédoine, en 451, l’évêque de Jérusalem, Juvénal (421-458), raconte que ce tombeau est trouvé vide trois jours après l’ensevelissement, puis que l’empereur Théodose (379-395) y fait bâtir une église où les pèlerins affluent très vite. À son retour du concile, le même Juvénal réaménage les lieux et le 15 août correspondrait à la date de la dédicace – l’inauguration – de l’église agrandie. Un siècle plus tard, l’empereur byzantin Maurice (582-602) continue la construction et, pour diverses raisons, impose la date dans tout son empire. Appelée la Dormition de Marie puis bientôt l’Assomption, (…), la fête devient vite populaire et s’étend au monde latin », explique le Père Laurent de Villeroché, sur le site Église catholique en France.
Mais aussi une origine royale. « En 1637, le roi Louis XIII, sans héritier après vingt ans de mariage, demande à ses sujets de faire dans chaque paroisse, le 15 août, une procession, afin d’avoir un fils. Lorsqu’il eut la certitude d’avoir un enfant, il décida, en signe de reconnaissance, de consacrer la France à la Vierge Marie : le 10 février 1638, il déclare prendre la Vierge comme protectrice et patronne du Royaume et demande que, chaque année, le jour de la fête de l’Assomption, on fasse dans chaque église mémoire de la consécration de la France à Marie à la grand-messe, puis une procession solennelle après les vêpres. L’édit est enregistré par le Parlement », précise le Père Laurent de Villeroché.
Une tradition bien ancrée dans les villes de France
C’est ainsi que les villes de France ont maintenu cette tradition. « Le 15 août, fête nationale depuis 1638, le demeure jusqu’à la fin de l’Empire. Certes Napoléon Ier, né le 15 août 1769, fait du 15 août la Saint Napoléon, mais elle redevient l’Assomption à la Restauration », relate le Père Laurent de Villeroché.
Les villes françaises ont leurs traditions pour honorer dignement la Vierge Marie. La procession est de rigueur pour toutes les villes et permet aux catholiques d’exprimer leur foi et leur reconnaissance à la Vierge Marie et aux non-croyants d’assister à ces manifestations, ou de participer aux évènements festifs mis en place par chaque commune ou région.
Par exemple, au Puy-en-Velay cette année, lors des fêtes du 15 Août, l’évêque a invité les fidèles à prier pour la paix : « Avec Marie, confions le monde à Jésus, Prince de la paix ». Lors d’une interview dans L’Éveil de la Haute-Loire, il a expliqué sa volonté de prier pour la paix : « Tout le monde invoque la paix, on le voit en Ukraine, mais sans y parvenir. D’où l’importance d’une vie spirituelle, pas forcément religieuse. On ne décide pas tout politiquement, socialement, économiquement. Il y a quelque chose d’autre qui peut nous aider dans les moments les plus difficiles. Chacun d’entre nous doit avoir une réflexion sur le sens de la vie, la fragilité de notre existence ».
À Lyon, c’est à la Basilique Notre-Dame de Fourvière où chaque année une procession aux flambeaux se déroule le 14 août au soir. Elle rassemble des centaines de pèlerins. « Cette fête commémore l’entrée de la Vierge Marie dans la plénitude de la vie éternelle. Pour les catholiques, la mère de Dieu symbolise, par sa vie, l’idéal chrétien. Elle en est l’exemple à suivre. Parce qu’elle était si proche de son Fils, elle est aussi Mère de tous les hommes, attentive à chacun. C’est pourquoi les chrétiens aiment tant la prier et se savent écoutés d’elle », précise le site de la Basilique.
La ville de Nice fête comme chaque année l’Assomption. Mais pour cette ville la Vierge Marie est aussi patronne des marins ce qui donne une dimension à cette célébration qui comprend aussi la bénédiction et la parade des pointus : du nom donné par des marins bretons à ces embarcations de 6 à 8 mètres à la poupe et la proue pointues.
De la vie terrestre à la gloire céleste
Mais pourquoi « l’Assomption de Marie » ? « De même que grâce à Jésus, l’humanité est entrée en Dieu, de même Marie a été assumée corps et âme dans la gloire de Dieu, sans attendre la résurrection finale, où tous, nous ressusciterons (I. Co 15, 52). Marie est bien " la première en chemin " comme nous le chantons », précise le site Église catholique.
Car, « Elle a été la première et la plus grande disciple du Christ en étant la croyante la plus parfaite. Elle a été associée à sa place de Mère à la mission et à l’œuvre du Christ, qui était de donner aux hommes la victoire sur le péché et sur la mort », explique le site Liturgie et Sacrements.
Pour autant, bien que Marie soit fêtée par l’ensemble du monde chrétien, seuls les catholiques reconnaissent ce dogme de l’Assomption de Marie. Les Protestants se basent sur les écrits bibliques et de ce fait ne reconnaissent pas le dogme de l’Assomption qu’ils assimilent le plus souvent à de l’idolâtrie. Cette fête reste pour eux la simple fête de Marie. L’Église orthodoxe a maintenu le terme de Dormition de la Mère de Dieu en précisant que Marie a été « élevée par Dieu jusqu'au Royaume céleste du Christ dans la plénitude de son existence, spirituelle autant que corporelle ».
Car, entre Dormition et Assomption, la différence majeure se tient dans la conception de la nature humaine de Marie qui a été préservée ou non de la corruption liée au péché originel.
En effet, la Vierge Marie est un être préservé de la corruption de la nature humaine dans la religion catholique. Ainsi, elle aurait été préservée du péché originel, selon la Constitution apostolique Ineffabilis Deus du pape Pie IX qui a proclamé le 8 décembre 1854 : « Par l'autorité de Notre Seigneur Jésus-Christ, des bienheureux Apôtres Pierre et Paul, et par la Nôtre, Nous déclarons, prononçons et définissons que la doctrine selon laquelle la bienheureuse Vierge Marie fut dès le premier instant de sa Conception, par une grâce et un privilège spécial de Dieu tout-puissant, en vue des mérites de Jésus-Christ, Sauveur du genre humain, préservée et exempte de toute souillure de la faute originelle, est révélée de Dieu, et que par conséquent elle doit être crue formellement et constamment par tous les fidèles ».
Dans la religion catholique orthodoxe c’est un peu le contraire. Marie, la Mère de Dieu, a sa nature humaine mortelle, liée à la corruption de ce monde après le péché originel. Donc selon les orthodoxes, elle a été ressuscitée par son Fils comme la Mère de Vie : de ce fait, elle est considérée comme participant à la vie éternelle du paradis.
Au-delà de la nature humaine préservée ou non de Marie, Vierge ou Mère, l’un des éléments constants est le fait qu’un être ayant une nature humaine a été élevé et a rejoint la gloire céleste. Car Marie, la Mère de Dieu, a été associée : « à la mission et à l’œuvre du Christ, qui était de donner aux hommes la victoire sur le péché et sur la mort ».
Que pourrait-on retenir de l’Assomption de Marie, cette fête également chômée dans de nombreux pays de tradition catholique comme l’Italie, le Portugal, la Pologne, l’Autriche, etc. ? Selon le Père Laurent de la Villeroché ce serait que : « La prise de conscience de cette histoire peut rappeler aux chrétiens que leur " oui " à Dieu, à l’image de Marie, est toujours à dire au cœur d’un pays précis où ils ont leurs racines et qu’ils sont appelés à servir. Une des manières de servir son pays n’est-elle pas d’y développer le goût de Dieu ? »
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