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Monde. Le Prince Group, relais d’infiltration du Parti communiste chinois au Cambodge

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Un ancien agent secret chinois, Eric, dévoile comment l’escroquerie au Cambodge est orchestrée par le Parti communiste chinois (PCC) à travers le Prince Group. Les États-Unis ont inculpé Chen Zhi, le patron sino-cambodgien du conglomérat, pour crimes transnationaux incluant traite d’êtres humains et blanchiment de milliards de dollars. Un rescapé sud-coréen témoigne avoir vu ses ravisseurs armés discuter avec le commissaire de police à Phnom Penh, révélant un système protégé par le PCC et la corruption locale.

Un Sud-Coréen dévoile la collusion entre police et mafia

L’affaire récente d’un ressortissant sud-coréen enlevé et torturé au Cambodge par un réseau d’escrocs a attiré l’attention internationale, mettant en lumière les liens profonds entre l’industrie criminelle d’Asie du Sud-Est et le Parti communiste chinois (PCC).

Selon le quotidien sud-coréen Chosun Ilbo, un homme d’affaires d’une vingtaine d’années spécialisé dans les pièces automobiles s’était rendu au Cambodge l’année dernière pour un déplacement professionnel. Il y a reçu une offre commerciale alléchante promettant « un déstockage de pièces à prix réduit », avec prise en charge des frais de voyage.

Mais dès son arrivée à l’aéroport international de Phnom Penh, les personnes venues l’accueillir, un Chinois et un Cambodgien, ont changé brusquement d’attitude. Le Chinois l’a menacé, arme au poing : « Ferme-la et reste tranquille. » Ce jeune homme a compris alors qu’il venait de tomber dans un piège.

Durant sa détention, deux Chinois armés de couteaux et de pistolets le surveillaient 24 heures sur 24, l’obligeant à ouvrir des comptes bancaires à son nom et à celui de ses proches et à exiger des virements de sa famille en Corée. La moindre résistance entraînait électrocutions et passages à tabac. Après plus de dix jours de torture, il présentait des brûlures graves sur tout le corps et des lésions cornéennes. Il a été finalement secouru grâce à l’aide de la diaspora locale.

Mais le plus choquant est survenu après son évasion. Alors qu’il attendait les représentants de l’ambassade de Corée du Sud au commissariat de Phnom Penh, il a vu les membres du gang chinois qui l’avaient enlevé entrer et sortir librement du poste de police, armes à la vue, fumant et plaisantant avec le commissaire. « J’étais pétrifié de terreur », se souvient-il. Cette scène révèle la collusion profonde entre les forces de l’ordre et les organisations criminelles.

Washington inculpe le patron du Prince Group, Londres sanctionne le conglomérat

Le 14 octobre dernier, les autorités américaines ont rendu public un acte d’accusation contre Chen Zhi, âgé de 38 ans, patron sino-cambodgien du Prince Group. Le fondateur et président de ce conglomérat cambodgien est inculpé de conspiration en vue de commettre une fraude électronique et de conspiration de blanchiment d’argent. S’il est reconnu coupable, il encourt jusqu’à 40 ans de prison. Chen Zhi reste introuvable.

Simultanément, les États-Unis et le Royaume-Uni ont imposé des sanctions massives contre le Prince Group et son réseau. La liste américaine comprend 146 cibles, incluant le Prince Group lui-même, Chen Zhi, ainsi que 117 entités affiliées, dont trois ressortissants taïwanais et neuf sociétés enregistrées à Taïwan. Le Royaume-Uni a sanctionné six personnes et six entités liées au conglomérat.

Selon l’acte d’accusation américain, Chen Zhi aurait dirigé des opérations de camps de travail forcé à travers le Cambodge, où des centaines de personnes victimes de traite étaient détenues contre leur volonté. Ces individus, souvent attirés par de fausses promesses d’emplois bien rémunérés, étaient forcés, sous la menace de violence, à perpétrer des escroqueries aux cryptomonnaies à travers les jeux de séduction. Ces arnaques ont permis de voler des milliards de dollars à des victimes aux États-Unis et dans le monde entier.

Le département américain de la Justice a également annoncé la plus importante saisie d’actifs de son histoire : plus de 14 milliards de dollars en bitcoins auraient été confisqués dans le cadre de cette affaire.

Originaire de Chine, Chen Zhi a renoncé à sa nationalité chinoise et possède désormais plusieurs nationalités, dont britannique et cambodgienne. Il s’est vu décerner le titre honorifique de neak oknha, l’équivalent d’un titre de noblesse, par le gouvernement cambodgien. Il a servi comme conseiller du Premier ministre Hun Manet ainsi qu’à son père, l’ancien Premier ministre Hun Sen. Cette position privilégiée lui aurait permis de mener ses activités illégales en toute impunité dans le royaume.

Un ex-agent secret dévoile : le Prince Group, relais du Parti communiste chinois

Le 16 octobre, un ancien agent secret chinois sous le pseudonyme d’Eric a publié un long article sur X, révélant les dessous du Prince Group et de Chen Zhi. Eric affirme avoir été agent infiltré du ministère chinois de la Sécurité publique avant de faire défection en Australie et expose depuis 2024 les activités d’espionnage chinoises en Asie du Sud-Est.

L’ex-espion révèle avoir travaillé pour le Prince Group comme couverture pour ses activités de renseignement. L’une de ses missions principales consistait à collaborer avec le conglomérat pour aider le Parti communiste chinois à capturer des dissidents exilés. Il dit même avoir rédigé les statuts de la Prince Charity Foundation et participé à une tentative d’enlèvement du caricaturiste dissident chinois Rebel Pepper, de son vrai nom Wang Liming.

Eric affirme sans détour que Chen Zhi constitue l’un des agents les plus importants de Pékin en Asie du Sud-Est et que le Prince Group peut mener impunément ses activités illégales précisément parce qu’il effectue les « basses œuvres » du régime en échange de sa protection. Le conglomérat entretient des liens étroits avec le système de sécurité politique du ministère chinois de la Sécurité publique. Un certain M. Li, qui « travaillait » pour le Prince Group, était en réalité un cadre d’une brigade sous la direction de l’équipe de sécurité politique de Chongqing.

D’un côté, le Prince Group multiplie les œuvres « caritatives » pour dissimuler ses crimes et finance des élections locales. De l’autre, il investit dans l’immobilier, les médias culturels, la finance, le tourisme, et emploie même des équipes de hackers. Eric souligne que nombre de ces activités ne visent pas le profit mais servent au blanchiment d’argent.

L’ancien agent révèle un détail stupéfiant : pour piéger un dissident résidant aux États-Unis, le Prince Group avait exposé ses œuvres lors d’un événement et lui avait envoyé des photos. Bien que cette tentative ait échoué, Chen Zhi aurait déclaré avec désinvolture à M. Li que si l’affaire était découverte, il suffirait de rejeter la faute sur les subalternes.

L’infiltration géopolitique du Prince Group aux Palaos

La journaliste économique taïwanaise Hu Caiping révèle que le Prince Group ne se limite pas au blanchiment d’argent et aux arnaques en ligne : il constitue également un outil stratégique du Parti communiste chinois dans le Pacifique. Après que les Palaos ont refusé de rompre leurs relations avec Taïwan sous la pression de Pékin, le régime chinois aurait ordonné au Prince Group d’y ouvrir des casinos pour blanchir de l’argent.

Le conglomérat a acquis d’importantes parcelles de terres près du port, de l’aéroport et des stations radar des Palaos, avec des baux de 99 ans, des positions stratégiques permettant à du personnel militaire chinois de collecter des renseignements. Des officiers de la marine chinoise ayant des liens avec l’Armée populaire de libération ont effectivement créé des sociétés aux Palaos pour mener des opérations politico-commerciales.

Hu Caiping dénonce : « Ils utilisent ces méthodes pour forcer les Palaos à rompre avec Taïwan. Si tu ne veux pas m’épouser, je détruis ta maison, c’est du chantage pur et simple. » Elle estime que les services de renseignement taïwanais ont considérablement aidé Washington dans cette opération contre le Prince Group.

L’escroquerie au Cambodge : un système protégé par Pékin

Sihanoukville, ville côtière du sud-ouest du Cambodge construite dans les années 1950 comme projet de port en eaux profondes planifié durant la période coloniale française, est devenue l’épicentre de la criminalité chinoise.

Dans la nuit du 4 octobre dernier, une violente émeute a éclaté dans le complexe de « Chinatown ». Des escrocs chinois qui employaient des travailleurs indiens, bangladais et pakistanais pour arnaquer leurs compatriotes ont déclenché la révolte de centaines d’employés, excédés par les impayés et l’ingérence dans leur pratique religieuse. Ils ont saccagé les bureaux des dirigeants.

Face à la répression accrue en Chine continentale, les réseaux d’escroquerie dirigés par des Chinois ne peuvent plus recruter massivement de ressortissants chinois et se tournent vers les pays voisins, forçant ces travailleurs à escroquer leurs compatriotes ou d’autres nationalités.

Sihanoukville était autrefois une charmante station balnéaire dotée du seul port en eaux profondes du Cambodge. Mais depuis que le gouvernement cambodgien a rejoint l’initiative chinoise des Nouvelles routes de la soie en 2015, la ville s’est transformée en un gigantesque « Chinatown » grouillant de bases criminelles dédiées au trafic d’êtres humains, aux jeux d’argent en ligne et aux réseaux d’escroquerie, désormais classée zone dangereuse par plusieurs organisations et gouvernements internationaux.

Ces complexes, entourés de murs de trois à quatre mètres surmontés de barbelés et de tessons de verre, fonctionnent comme de véritables camps de travail forcé. Les fenêtres des étages inférieurs sont barricadées de barreaux métalliques pour empêcher les captifs de sauter dans une tentative d’évasion. Des gardes armés surveillent l’unique entrée, contrôlant minutieusement chaque visiteur et véhicule.

Un système criminel transnational orchestré par le PCC

Selon les statistiques, les organisations internationales d’escroquerie aux télécommunications utilisent le Cambodge comme base arrière, attirant de jeunes Sud-Coréens par de fausses offres « d’emplois à l’étranger » et de « postes bien rémunérés ».

Récemment, les méthodes des escrocs se sont sophistiquées : les cas d’enlèvement, de séquestration et de torture d’entrepreneurs sud-coréens par de fausses publicités commerciales se multiplient, utilisant des comptes bancaires coréens pour blanchir l’argent et transférer le produit des escroqueries à l’étranger.

Les Nations unies estiment qu’environ 100 000 personnes sont maintenues en esclavage au Cambodge, dans le cadre d’un phénomène plus large en Asie du Sud-Est responsable d’environ 40 milliards de dollars volés chaque année. Les victimes américaines seules auraient perdu au moins 10 milliards de dollars en 2024 face aux opérations d’escroquerie basées en Asie du Sud-Est, soit une augmentation de 66 % par rapport à l’année précédente.

Eric affirme que si le Prince Group mène impunément ses activités criminelles, c’est précisément grâce à sa collusion avec l’appareil secret du Parti communiste chinois. En accomplissant les basses œuvres du régime, enlèvement de dissidents, espionnage, infiltration politique, le conglomérat s’est assuré une protection au plus haut niveau. L’escroquerie au Cambodge opère ainsi sous le parapluie du PCC, formant un vaste réseau criminel protégé par les plus hautes sphères du pouvoir cambodgien et chinois.

Cette série d’événements dessine clairement le réseau de pouvoir complexe derrière l’industrie de l’escroquerie en Asie du Sud-Est : le Parti communiste chinois contrôle les organisations criminelles par l’intermédiaire d’agents locaux et exploite les forces corrompues sur place pour assurer leur protection, formant ainsi un système tripartite de criminalité transnationale, de collecte de renseignements et d’infiltration politique. Alors que les États-Unis, le Royaume-Uni et d’autres pays intensifient leur répression, ce vaste réseau noir s’expose progressivement aux yeux de la communauté internationale.

Eric met en garde : « Beaucoup de Chinois ne reconnaissent pas encore la nature maléfique du PCC, simplement parce que ce régime n’est pas encore tombé. Le jour où le régime communiste chinois sera définitivement jugé, tous ces crimes seront révélés au grand jour. »

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