Un événement attendu depuis un siècle s'est ouvert au Petit Palais à Paris, l’exposition Worth, inventer la haute couture, consacrée à Charles Frederick Worth, créateur visionnaire et fondateur de la maison qui a imposé la haute couture telle que nous la connaissons. Réalisée avec le Palais Galliera, cette rétrospective est la première du genre à Paris. Comme le souligne le documentariste Loïc Prigent, qui a suivi les coulisses du montage : « On n’a jamais vu ça ! »

Le père de la haute couture
Né en 1825 dans l’est de l’Angleterre, Charles Frederick Worth arrive à Paris, sans ressources, en 1846. Après un apprentissage chez Gagelin, il fonde sa maison de haute couture en 1858 au 7 rue de la Paix, avec le Suédois Otto Bobergh. Dès ses débuts, il rompt avec la tradition, il impose ses modèles à ses clientes, introduit le mannequin vivant pour les défilés, invente les collections saisonnières et appose sa griffe, comme un peintre signant son tableau. Sa muse et épouse, Marie Vernet, joue un rôle essentiel dans ce parcours fulgurant.

Une exposition exceptionnelle
L’exposition réunit près de 400 œuvres, dont 80 costumes, des accessoires, des peintures, des objets intimes et des parfums. Ce vaste puzzle, selon Loïc Prigent, reconstitue l’univers esthétique et psychologique de Worth. Certaines pièces, comme la robe mythique de la comtesse Greffulhe, sont visibles pour la dernière fois, tant leur fragilité empêche de futures expositions.
Les équipes du Palais Galliera et de Paris Musées ont réalisé un travail de restauration remarquable. Les robes sont minutieusement ajustées sur des mannequins sur-mesure, parfois rembourrés pour recréer la silhouette de l’époque. Des décorations florales, comme les hortensias d’une cape du soir datant de 1895, sont restaurées pétale par pétale.

La transmission et le culte de la personnalité
Charles Frederick Worth a instauré un véritable culte de la personnalité, rare à son époque dans le monde de la couture. Après lui, ses fils Gaston et Jean-Philippe ont repris l’entreprise de haute couture, puis ses petits-enfants, jusqu’à la fermeture de la maison en 1952. Chantal Trubert-Tollu, son arrière-arrière-petite-fille, grande collectionneuse et auteure d’un ouvrage sur la maison, a contribué à l’exposition par ses prêts et son expertise.

Des clientes mythiques et une vision du monde
Les créations Worth ont séduit les femmes les plus influentes d’Europe et des États-Unis, dont la fameuse comtesse Greffulhe, muse de Proust. Une salle entière lui est dédiée. Parmi les pièces phares : une robe byzantine portée lors du mariage de sa fille en 1904, un caftan ouzbek transformé en cape, ou encore la somptueuse « robe aux lys », restaurée à partir d’analyses radiographiques.
L’exposition interroge aussi le dialogue entre cultures, le rôle des femmes dans la maison Worth et la relation entre couturier et cliente. Comme l’a résumé Sonia Patricelli pour France 24 : « La haute couture française a peut-être été inventée par un Anglais, mais elle a grandi avec le savoir-faire parisien. »

À voir jusqu’en septembre 2025
L’exposition est visible au Petit Palais jusqu’au 7 septembre 2025. Pour celles et ceux qui ne pourraient s’y rendre, le catalogue de l’exposition offre un accès privilégié à cet hommage vibrant à celui qui a littéralement inventé la mode moderne.
Source : Loïc Prigent, réalisateur de la vidéo documentaire sur l’exposition, Sonia Patricelli, journaliste France 24 et le Palais Galliera, Paris Musées.
Soutenez notre média par un don ! Dès 1€ via Paypal ou carte bancaire.
