Depuis l’Antiquité, les familles chinoises accordent une grande importance à l’éducation morale et au développement personnel. Parmi les nombreux ouvrages qui guidaient la conduite des foyers, les Instructions familiales de Zhu Xi, du grand érudit confucéen de la dynastie Song (1130-1200), se distinguent comme l’un des plus intemporels.

Écrit à l’intention de ses enfants et de ses descendants, ce texte offre des conseils concis mais profonds sur la gratitude, la diligence, l’humilité et l’intégrité : des valeurs destinées à préserver l’harmonie familiale et la vertu personnelle.
L’objectif était d’inculquer la gratitude et la simplicité de cœur. Cultiver un esprit reconnaissant et satisfait est non seulement une marque de bonté, mais aussi le fondement d’un bon caractère. La sagesse de ces maximes continue de rayonner à travers les siècles, offrant des leçons intemporelles pour cultiver l’épanouissement personnel et familial.
Cinq des proverbes les plus éclairants de Zhu Xi

1. À chaque bol de bouillie, à chaque repas, pensez aux efforts déployés pour l’obtenir. À chaque demi-fil, à chaque demi-brin, souvenez-vous toujours de la difficulté de produire des biens matériels
Lorsqu’un repas nous est servi, prenons un instant pour réfléchir aux efforts qu’il a nécessité : les agriculteurs qui ont labouré la terre, les mains qui l’ont préparé, la chance qui nous permet de le savourer en toute tranquillité. Même pour une demi-fibre ou un demi-brin de tissu, souvenons-nous des innombrables labeurs qui ont permis sa confection. Les anciens nous rappellent souvent qu’il faut savoir se contenter de ce que l’on a et chérir ses bienfaits.
Le caractère chinois pour bénédiction (福) incarne à lui seul cette sagesse. Il contient « 口 » (bouche), « 衣 » (vêtements) et « 田 » (champ) : symbolisant la nourriture, la chaleur et les moyens de subsistance. Celui qui a de quoi manger, se vêtir et vivre possède déjà une grande fortune.
Aujourd’hui, avec l’élévation du niveau de vie, de nombreux enfants grandissent dans l’aisance et l’abondance, à l’abri des difficultés. N’ayant jamais manqué de rien, il devient facile de tenir le confort pour acquis : on jette les aliments qui ne plaisent pas et on se débarrasse des vêtements légèrement démodés. Pourtant, la pensée bouddhiste nous rappelle que la fortune n’est pas éternelle. Les bienfaits sont comme l’eau d’un puits : puisés avec soin, ils peuvent nous nourrir longtemps ; gaspillés, ils s’assèchent rapidement. La gratitude et la modération sont ce qui empêche le puits de se vider.
Il est donc essentiel d’apprendre aux jeunes à apprécier ce qu’ils possèdent, à être diligents et frugaux, et à vivre avec un cœur reconnaissant. La gratitude n’est pas une simple politesse : c’est une force tranquille qui préserve les bienfaits et approfondit la joie et la paix intérieure.
2. Ne convoitez pas les richesses soudaines, ne consommez pas d’alcool avec excès

Ne courez pas après les gains inattendus, car ils apportent souvent des problèmes à la famille ; ne buvez pas excessivement, car cela pèse sur le corps et l’esprit. Comme le dit un vieux proverbe, un homme de bien apprécie la richesse, mais l’acquiert honnêtement. La richesse et la prospérité sont des aspirations naturelles, mais lorsqu’elles sont acquises malhonnêtement, même l’argent en main apporte peu de satisfaction.
On n’est pas malheureux parce qu’on manque de choses, mais parce que nos désirs sont trop nombreux. Les gâteaux ne tombent pas du ciel : la richesse inattendue peut être facile à acquérir, mais vivre dans la crainte ou l’inquiétude constantes à son sujet en vaut rarement la peine.
De même, la consommation d’alcool requiert de la modération. L’enseignement bouddhiste nous rappelle que l’alcool est à l’origine de nombreux maux ; ceux qui savent s’en abstenir évitent d’innombrables méfaits. L’ivresse nuit au corps, trouble l’esprit et ouvre la porte au malheur : accidents, querelles et perte de maîtrise de soi en découlent trop souvent. La modération protège la santé et l’harmonie, et permet de préserver les bienfaits d’une vie sage.
3. Lors du mariage d’une fille, choisissez un bon gendre ; n’exigez pas de dot importante. Lors du mariage d’une fille, recherchez une femme vertueuse. Ne tenez pas compte de l’épaisseur de la dot

Lorsqu’on marie une fille, le critère le plus important est le caractère de son époux ; la dot ou les cadeaux ne devraient pas primer. De même, lorsqu’on accueille une belle-fille dans la famille, ce qui compte le plus, c’est sa vertu et sa capacité à tenir un foyer, plutôt que la richesse qu’elle apporte. Dans la formation d’un mariage, l’éducation, les valeurs et les traditions familiales de l’autre famille doivent être prioritaires. La richesse est extérieure et éphémère. Une vie passée avec une personne compétente, responsable et bienveillante est infiniment plus précieuse que le confort matériel.
Même une grande fortune familiale ne peut survivre à l’imprudence de descendants ingrats. Comme le dit le proverbe : « Une lignée sans bonnes épouses pendant une génération manquera de bons fils pendant dix générations. » Assurer à ses enfants un mariage judicieux et vertueux profite à trois générations – grands-parents, parents et petits-enfants – garantissant ainsi la prospérité et l’harmonie de la famille pour les années à venir.
4. Même si les ancêtres sont loin, les sacrifices doivent être sincères. Même si nos descendants sont peu doués, il est essentiel de lire les classiques

Bien que nos ancêtres soient décédés depuis longtemps, nous devons les honorer en nous souvenant de nos racines et en préservant les traditions familiales. De même, même si nos descendants font preuve de capacités naturelles modestes, nous devons les encourager à étudier avec assiduité. L’héritage d’une famille ne se mesure pas uniquement à la richesse, mais aussi aux valeurs, au savoir et au caractère transmis de génération en génération.
Dans les anciennes familles de lettrés, les aînés privilégiaient l’apprentissage et le développement moral au gain matériel. Comme le dit le proverbe : « Économiser n’est pas aussi important qu’instruire ses enfants ; ne rien faire n’est pas aussi enrichissant que lire des livres. » Même si le talent inné d’un enfant est limité, un environnement favorable et une bonne éducation peuvent forger la vertu et la sagesse. Aucune richesse ne saurait se comparer à un seul rouleau de classiques ; transmettre le savoir à la génération suivante est le meilleur moyen de garantir la pérennité de l’héritage familial.
5. Lors d’une dispute, comment savoir si vous n’êtes pas en tort ? Il est indispensable de prendre le temps de réfléchir calmement et en privé
Les conflits sont inévitables dans tout foyer, mais notre façon d’y réagir détermine la force et l’harmonie familiales. Face aux désaccords, il est facile de rejeter la faute sur autrui. La sagesse de Zhu Xi nous invite à faire une pause et à nous recentrer sur nous-mêmes : examiner attentivement si nous partageons une part de responsabilité. Une introspection sereine n’est pas un signe de faiblesse, mais une marque de sagesse et de maturité.

Une famille s’épanouit lorsque ses membres font preuve de patience, d’humilité et de compréhension. Les querelles fréquentes et la colère non maîtrisée érodent peu à peu la confiance, fragilisent les liens affectifs et rendent les relations instables. En examinant d’abord notre propre comportement, nous évitons que les petits différends ne se transforment en ressentiment durable. Comme l’enseignaient les anciens : « Face à un problème, réfléchissez-y à trois fois ; face à la colère, il vaut mieux céder. » Céder ici ne signifie pas renoncer à ses principes, mais privilégier la réflexion à l’impulsion et l’harmonie à l’orgueil.
La pratique de l’introspection en temps de conflit nourrit le caractère individuel et le bien-être collectif de la famille. Elle transforme les foyers ordinaires en espaces où s’épanouissent la compréhension, le respect et l’amour, créant un héritage de sagesse émotionnelle qui profite non seulement à la génération présente, mais aussi aux générations futures. Ainsi, le simple fait de s’arrêter un instant et de se recentrer sur soi préserve l’unité familiale et renforce les fondements moraux sur lesquels elle repose.
Instructions familiales de Zhu X et le concept de vie réussie
Ces cinq maximes montrent qu’une vie réussie ne repose ni sur la richesse ni sur le confort, mais sur une attention particulière portée à nos actions, à nos relations et aux valeurs que nous transmettons.
Zhu Xi enseigne que le caractère se forge dans les moments ordinaires : dans la manière dont nous utilisons ce que nous avons, dans le choix de nos compagnons, dans la façon dont nous guidons la génération suivante et dans la maîtrise de nos propres impulsions. En pratiquant ces principes, nous cultivons une force tranquille qui nous soutient, nous et ceux qui nous entourent.
La sagesse du passé devient un guide vivant, façonnant les familles et les communautés, nourrissant l’harmonie et inspirant la vertu à travers les générations.
Rédacteur Charlotte Clémence
Source : Living Wisely: 5 Proverbs From Zhu Xi’s Family Instructions
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