Appuyez sur “Entrée” pour passer au contenu

Tradition. Lao Tseu, Le Livre de la voie et de la vertu : revenir à sa vraie nature

CHINE ANCIENNE > Tradition

PODCAST

Lao Tseu, auteur du livre Dao De Jing (Le Livre de la voie et de la vertu) et grand savant taoïste chinois ayant vécu pendant la période des Printemps et des Automnes (722-476 av. J.-C.), a expliqué dans son livre comment l’homme peut revenir à sa vraie nature.

Lao Tseu, de son vrai nom Li Er (李耳) (dates de naissance et de décès inconnues), prénom social Boyang (伯陽), est également célèbre sous le nom de Lao Dan (老聃) pendant la période des Printemps et des Automnes (722-476 av. J.-C.). Les générations suivantes l’ont vénéré sous le nom de Lao Tseu.
Un bref résumé de la vie de Lao Tseu, tiré de l’histoire officielle, indique qu’il a d’abord été bibliothécaire de la dynastie Zhou orientaux (770-256 av. J.-C.), puis que Confucius a demandé à Lao Tseu des conseils sur les rites à trois reprises. Lao Tseu a écrit Dao De Jing (Le Livre de la voie et de la vertu) puis a emmené ses disciples vers l’ouest en chevauchant un bœuf noir. Plus tard, les gens croiront qu’il est devenu immortel.

Le Dao De jing, dont les principes de la « Voie » et de la « Vertu » constituent la trame, utilise les exemples de gouvernance du pays, de l’utilisation de l’armée entre autres, pour expliquer comment l’homme peut trouver la juste voie pour revenir à sa vraie nature.

Ce livre a exercé une profonde influence sur les générations futures et existe en de nombreuses langues dans le monde, devenant ainsi une merveille dans les échanges culturels entre l’Orient et l’Occident.

Les générations suivantes se sont inspirées du Dao De jing de diverses manières, certaines pour se cultiver, d’autres pour diriger le pays, d’autres encore comme code de conduite pour les êtres humains et ainsi de suite.

En examinant la vie de Lao Tseu, il faut se placer dans la perspective d’une personne qui transmet la voie permettant à l’homme de revenir à son origine céleste, afin de décoder une grande partie des incompréhensions liées au Dao De Jing.

Le monde traite Lao Tseu souvent comme un philosophe, ce qui est une mauvaise interprétation et même un grand irrespect de Lao Tseu. Car l’une des idées essentielles du Dao De Jing est justement de ne pas accorder trop d’importance à ce qui existe dans le monde humain. Prendre la parole d’une personne éclairée, autrement dit d’un éveillé qui a compris le mystère du ciel et de la terre, comme une connaissance ordinaire humaine et en faire une discipline d’étude est en soi un blasphème et une déformation de la Voie si précieuse transmise par Lao Tseu.

Lao Tseu, Le Livre de la voie et de la vertu : revenir à sa vraie nature
Le Livre de la voie et de la vertu en français. (Image : wikimedia / CC BY-SA 3.0)

L’homme qui vit dans ce monde d’illusions accorde beaucoup d’importance à ce qu’il possède ou peut posséder, alors que Lao Tseu préconise au contraire la « simplicité » pour vivre en paix et en harmonie. Les Chinois lui ont souvent reproché son obscurantisme, en quoi consiste alors le concept de « simplicité » de Lao Tseu ?

Depuis les temps anciens jusqu’à aujourd’hui, beaucoup de gens pensent que les idées de Lao Tseu ont des avantages et des inconvénients, et que les gouverneurs s’en sont servi pour pratiquer l’obscurantisme afin de dominer le peuple chinois.

En fait, ce genre d’argument ne concerne que l’apparence et les phénomènes qui se manifestent dans la société. Il ne s’appuie pas sur l’objectif et le sens profond du Dao De Jing de Lao Tseu.

Tout d’abord, il faut se projeter à l’époque où vivait Lao Tseu : la dynastie Zhou était dans une période de déclin et différentes idées se croisaient. Après les trois dynasties Xia (夏), Shang (商) et Zhou (周), la pensée du peuple chinois avait pris forme. À cette époque, diverses écoles de pensée ont progressivement émergé, et nous citerons le texte original du Dao De Jing pour découvrir les vrais propos de Lao Tseu.

CHAPITRE III

En n’exaltant pas les sages, on empêche le peuple de se disputer.
En ne prisant pas les biens d’une acquisition difficile, on empêche le peuple de se livrer au vol.
En ne regardant point des objets propres à exciter des désirs, on empêche que le cœur du peuple ne se trouble.
C’est pourquoi, lorsque le saint homme gouverne, il vide son cœur, il remplit son ventre (son intérieur), il affaiblit sa volonté, et il fortifie ses os.
Il s’étudie constamment à rendre le peuple ignorant et exempt de désirs.
Il fait en sorte que ceux qui ont du savoir n’osent pas agir.

CHAPITRE LXV

Dans l’Antiquité, ceux qui excellaient à pratiquer le Tao ne l’employaient point à éclairer le peuple, ils l’employaient à le rendre simple et ignorant.
Le peuple est difficile à gouverner parce qu’il a trop de prudence.
Celui qui se sert de la prudence pour gouverner le royaume est le fléau du royaume.
Celui qui ne se sert pas de la prudence pour gouverner le royaume fait le bonheur du royaume.
Lorsqu’on connaît ces deux choses, on est le modèle (de l’empire).
Savoir être le modèle (de l’empire), c’est être doué d’une vertu céleste.
Cette vertu céleste est profonde, immense, opposée aux créatures.
Par elle on parvient à procurer une paix générale.

CHAPITRE LXXX

(Si je gouvernais) un petit royaume et un peuple peu nombreux, n’eût-il des armes que pour dix ou cent hommes, je l’empêcherais de s’en servir.
J’apprendrais au peuple à craindre la mort et à ne pas émigrer au loin.
Quand il aurait des bateaux et des chars, il n’y monterait pas.
Quand il aurait des cuirasses et des lances, il ne les porterait pas.
Je le ferais revenir à l’usage des cordelettes nouées.

Il savourerait sa nourriture, il trouverait de l’élégance dans ses vêtements, il se plairait dans sa demeure, il aimerait ses simples usages.
Si un autre royaume se trouvait en face du mien et que les cris des coqs et des chiens s’entendissent de l’un à l’autre, mon peuple arriverait à la vieillesse et à la mort sans avoir visité le peuple voisin.

En apparence, ces trois chapitres parlent de la gouvernance de l’État, mais en réalité, Lao Tseu voulait rappeler qu’il faut voir au-delà de toute chose apparemment belle et précieuse, y compris la connaissance, la sagesse voire la vertu humaine, parce que celles-ci ont tendance à évoquer les désirs humains et à faire oublier à l’homme son origine.

Lao Tseu, Le Livre de la voie et de la vertu : revenir à sa vraie nature
Le Livre de la voie et de la vertu en chinois, édition du Royaume Wei (445/443 av. J.-C. – 225 av. J.-C.). (Image : wikimedia / Domaine public)

Le taoïsme consiste à « revenir à sa vraie nature », ce qui signifie que le vrai bonheur et l’éternité de l’homme proviennent de l’indifférence à l’égard de tout ce qui se passe dans ce monde et de la juste compréhension du Tao qui a créé tout ce qui existe dans le ciel et sur la terre.

Tout ce qui existe dans le monde humain, peu importe ce que l’on pense, n’est rien comparé au Tao. En apparence, c’est pour « rendre le peuple idiot », mais en fait, c’est pour lui permettre de rester dans un état sans désir ni envie, afin de faire l’expérience du mystère et de l’éternité du Tao qui constituent toutes les choses du ciel et de la terre.

Revenir à sa propre nature pure et authentique, afin d’atteindre véritablement l’éternité et le bonheur, telle est la destination ultime d’une vie. En clair, c’est : abandonner tous les attachements de l’être humain pour obtenir le « Tao », afin de pouvoir se détacher complètement de ce monde, d’exister librement entre le Ciel et la Terre, et d’aller au-delà des neuf cieux.

Rédacteur Jessica Wang

Soutenez notre média par un don ! Dès 1€ via Paypal ou carte bancaire.