Récemment, Hu Haifeng, fils de l'ancien président chinois Hu Jintao et vice-ministre des Affaires civiles, a participé au Forum Lujiazui 2025 à Shanghai, où il a inauguré l'Académie chinoise des marchés financiers (中国资本市场学会) en compagnie de Chen Jining, membre du Politburo, et d'autres dirigeants. Cette initiative a ramené Hu Haifeng, qui s'était longtemps tenu à l'écart de la scène publique, sous les feux de la rampe, suscitant de vifs débats sur son rôle politique et la légitimité du Parti communiste chinois (PCC).
Le rôle de Hu Haifeng et la légitimité du Parti communiste chinois
Hu Haifeng, le fils de l'ancien président chinois Hu Jintao, a été nommé vice-ministre des Affaires civiles de la République populaire de Chine le 16 janvier 2024. Il est chargé de l'administration des organisations sociales et supervise l'enregistrement et la gestion des associations nationales, des fondations et des organisations non gouvernementales privées. Selon la réglementation chinoise relative à l'enregistrement des associations, toutes les organisations sociales doivent être enregistrées auprès du ministère des Affaires civiles chinois, sous peine d'être considérées comme illégales.
Cependant, le Parti communiste chinois (PCC), parti au pouvoir, et les huit partis démocratiques qui le soutiennent ne se sont jamais enregistrés auprès du ministère des Affaires civiles, ce qui constitue une lacune juridique controversée depuis longtemps.
Dès 2016, Wang Xiuying, une octogénaire de Pékin, a publiquement remis en question la légitimité du Parti communiste chinois, soulignant qu'il n'était pas enregistré auprès du ministère des Affaires civiles, contrairement aux dispositions du règlement sur l'enregistrement et la gestion des organisations sociales. Elle a demandé sans détour si le PCC, en tant qu'organisation non enregistrée, était une « organisation illégale ».
Cette question a été largement débattue dans les milieux juridiques chinois, mais n'a jamais reçu de réponse officielle. En 2000, le ministère des Affaires civiles a publié une liste des organisations exemptées d'enregistrement, comprenant les syndicats, la Ligue de la jeunesse communiste et la Fédération des femmes, mais pas le PCC ni les partis démocratiques, laissant le statut juridique de ces organisations dans le flou.
Le commentateur Du Wen a souligné dans son émission From an internal perspective, looking at Chinadiffusée sur les réseaux sociaux que Hu Haifeng, en tant que vice-ministre chargé des organisations sociales, avait en théorie le pouvoir d'enregistrer ou de dissoudre les organisations sociales nationales. Si l'on s'en tient strictement à la loi, le ministère des Affaires civiles aurait le droit de considérer le PCC non enregistré comme une organisation illégale et pourrait même prendre des mesures pour le dissoudre.
Cependant, Du Wen estime que cette possibilité est pratiquement nulle dans la réalité. Hu Haifeng, fils de l'ancien secrétaire général du Parti communiste chinois Hu Jintao, doit sa carrière et sa vie politique au système du PCC. Espérer qu'il remette en cause la légitimité du Parti communiste chinois revient à « demander à un méchant de sacrifier ses propres intérêts ». Il décrit ce paradoxe comme « l'humour noir » de la politique chinoise, qui reflète l'impuissance de la loi face au pouvoir.
D'un point de vue international, la gestion des partis politiques dans les pays démocratiques obéit à un cadre juridique clair. Par exemple, les partis politiques allemands sont enregistrés conformément à la loi sur les partis politiques et leur légalité est déterminée par la Cour constitutionnelle ; les partis politiques américains sont protégés par le premier amendement de la Constitution et doivent uniquement déclarer leurs finances électorales à la Commission électorale fédérale, au Japon et en Corée du Sud, l'enregistrement des partis politiques est assuré par des organismes électoraux indépendants, et l'administration n'a pas le droit d'intervenir.
En revanche, le Parti communiste chinois, non enregistré auprès du ministère des Affaires civiles, monopolise le pouvoir et jouit d'un statut particulier de « privilège extra-légal », ce qui est contraire au principe de « gouvernement selon la loi » qu'il prône.
Du Wen souligne en outre que cette lacune juridique non seulement révèle la crise de légitimité du Parti communiste chinois, mais ébranle également les fondements de son pouvoir. Comment une organisation non enregistrée peut-elle détenir le pouvoir militaire, le pouvoir financier et le pouvoir politique ? Cette question, que personne n'ose aborder dans la réalité politique chinoise, est pourtant au centre des discussions dans la société ordinaire.
En 1998, le Parti démocratique chinois a tenté de se faire enregistrer conformément à la loi, mais il a été interdit par les autorités au motif qu'il s'agissait d'une organisation illégale et ses principaux initiateurs ont été condamnés à des peines de prison, ce qui contraste fortement avec le fait que le PCC lui-même n'est pas enregistré mais continue d'exercer ses activités en toute impunité. La loi n'est pas ici une norme universelle, mais un instrument d'application sélective.
Le rôle de Hu Haifeng pousse ce paradoxe à un niveau inédit. En tant que vice-ministre des Affaires civiles, il pourrait en théorie exiger du PCC qu'il procède à l'enregistrement ou qu'il déclare l'organisation illégale, mais dans les faits, le PCC exerce un pouvoir absolu sur l'appareil d'État, dont le ministère des Affaires civiles n'est qu'un organe subordonné. Selon Du Wen, la carrière de Hu Haifeng dépend de sa loyauté envers le PCC plutôt que de son respect de la loi, et son rôle est davantage celui d'un figurant dans la structure politique que d'un acteur du changement.
Wu Jianmin, commentateur politique résidant à l'étranger, a déclaré dans sa chronique Jianmin Lun Tui Qiang consacrée à l'actualité politique chinoise que Xi Jinping était confronté à une pression exercée par les anciens dirigeants du Parti communiste chinois et que son pouvoir était progressivement retiré.
Wu Jianmin a souligné que Xi Jinping serait absent du sommet des BRICS qui se tiendra au Brésil les 6 et 7 juillet prochains et qu'il serait remplacé par le Premier ministre Li Qiang, rompant ainsi avec une habitude qu'il avait prise depuis son arrivée au pouvoir en 2012, à savoir assister à tous les sommets des BRICS. Pour Wu, il s'agit là d'un indicateur important pour évaluer la stabilité du pouvoir de Xi Jinping.
En outre, Wu Jianmin a cité des rumeurs circulant sur Internet selon lesquelles la 16ème session de la 14ème Assemblée populaire nationale, qui s'est tenue du 24 au 27 juin, pourrait révoquer le mandat de représentant à l'Assemblée populaire nationale de He Weidong, vice-président de la Commission militaire centrale, et démettre Wang Xiaohong de ses fonctions de ministre de la Sécurité publique. He Weidong est « introuvable » depuis le 11 mars et a été absent de plusieurs événements importants. Wang Xiaohong pourrait être remplacé par Yin Hong, secrétaire du Comité du Parti communiste chinois de la province du Jiangxi et le directeur du Bureau des affaires spéciales du ministère de la Sécurité publique pourrait être remplacé par Yang Weiln, directeur de la Sécurité publique de la province du Guangxi, promu par Hu Jintao.
Wu Jianmin estime que cela montre que le système de sécurité publique, sous le contrôle de Xi Jinping, est désormais aux mains de la faction de Hu Jintao, ce qui affaiblit encore davantage son pouvoir. L'absence de Chen Yixin, ministre de la Sécurité publique, à la conférence marquant le dixième anniversaire du ministère de la Sécurité publique est également considérée comme un signe de la perte d'influence des proches de Xi Jinping.
La crise profonde de la structure politique chinoise
Le rôle de Hu Haifeng et les rumeurs sur la dynamique du pouvoir de Xi Jinping mettent en évidence les contradictions profondes de la structure politique chinoise. D'une part, la question de la légitimité du PCC révèle la réalité que « le Parti communiste chinois est au-dessus de la loi », celle-ci étant réduite à un outil politique. D'autre part, les rumeurs sur la destitution forcée des anciens dirigeants et la perte d'influence des proches de Xi Jinping témoignent de l'intensification des luttes de pouvoir au sein du PCC.
Du Wen estime que la crise de légitimité du PCC ébranle ses fondements, tandis que Wu Jianmin ajoute à cette crise le contexte d'une succession au pouvoir, dont la véracité reste toutefois à vérifier.
Récemment, les apparitions publiques de Hu Haifeng et les rumeurs sur le transfert du pouvoir à Xi Jinping ont mis en évidence l'absurdité et la crise de la politique chinoise. Un parti au pouvoir depuis 74 ans dont le statut juridique reste flou, un dirigeant suprême dont le pouvoir pourrait être mis hors- jeu.
Ces phénomènes ne sont pas seulement le reflet d'une paradoxale institution, ils annoncent également les incertitudes politiques à venir en Chine. À l'approche de la grande parade militaire du premier octobre et du quatrième plénum du Comité central du Parti communiste chinois, il convient de suivre de près l'évolution du rôle de Hu Haifeng et du pouvoir de Xi Jinping.
Rédacteur Yi Ming
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