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Chine. Loi sur la sécurité nationale : Hong Kong condamne des militants

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Hong Kong condamne des militants pro-démocraties pour avoir violé la loi de sécurité nationale

Le 2 décembre, un tribunal de Hong Kong a condamné les dirigeants pro-démocratie Joshua Wong, Ivan Lam et Agnes Chow Ting à respectivement ,13 mois et demi, 7 mois et 10 mois de prison. (Image : Capture d’écran / YouTube)
 

Le 2 décembre, un tribunal de Hong Kong a condamné les dirigeants pro-démocratie Joshua Wong, Ivan Lam et Agnes Chow Ting à respectivement, 13 mois et demi, 7 mois et 10 mois de prison, avec pour chefs d’inculpation l’incitation d’organisation et de participation à des rassemblements non autorisés.

Les trois accusés étaient d’anciens membres du parti politique Demosisto, qui s’est dissous suite à l’adoption de la loi de sécurité nationale par la Chine communiste en juin dernier.

Selon Stand News, le tribunal de première instance de West Kowloon à Hong Kong leur a refusé la possibilité d’un appel ou d’une mise en liberté sous caution, le 2 décembre.

Joshua Wong, 24 ans, qui s’est rendu célèbre en tant que leader adolescent du Mouvement des parapluies en 2014, avait été arrêté et condamné précédemment pour sa participation à cet événement. Il était secrétaire général de Demosisto. Agnes Chow, alors âgée de 23 ans, était son adjointe, et Ivan Lam, âgé de 26 ans, présidait le parti.

Avant de quitter le tribunal, Joshua Wong a dit : « Je sais que c’est dur, mais je vais m’accrocher », et Ivan Lam est resté calme. Les sympathisants qui ont assisté au procès ont encouragé les trois militants à « poursuivre leurs efforts ».

Des millions d’habitants de Hong Kong se sont rassemblés contre le PCC en 2019 et 2020 pour dissuader Pékin d’imposer la loi de sécurité nationale. (Image : Studio Incendo / flickr / CC BY 2.0)
Des millions d’habitants de Hong Kong se sont rassemblés contre le PCC en 2019 et 2020 pour dissuader Pékin d’imposer la loi de sécurité nationale. (Image : Studio Incendo / flickrCC BY 2.0)
 

À partir du printemps 2019, les Hongkongais se sont rassemblés contre les initiatives du Parti communiste chinois (PCC) visant à intégrer plus étroitement l’ancienne colonie britannique au continent autoritaire. L’élément déclencheur des protestations était une proposition de loi d’extradition qui aurait permis au PCC d’arrêter toute personne soupçonnée de crimes à Hong Kong et de la faire juger par des tribunaux de Chine continentale. Les 9 et 12 juin, sur les 7 millions de personnes que compte la ville, des millions ont participé à des marches pour s’opposer à cette loi.

Les autorités ont réprimé les manifestations, qui se sont rapidement transformées en un véritable appel à la réforme démocratique, à la démission de Carrie Lam, directrice générale pro-PCC de Hong Kong, et à d’autres objectifs connus sous le nom de « cinq revendications ».

Aucun regret

L’adoption de la loi de sécurité nationale est intervenue dans le contexte de la pandémie de Covid-19 et les mesures qui s’en sont suivies ont encore affaibli les protestations après la violente répression policière de l’année précédente.

Alors que la pression politique augmentait, Agnes Chow a été arrêtée le 11 août, en même temps que le magnat des médias pro-démocratie Jimmy Lai. La salle de rédaction de l’Apple Daily de Jimmy Lai a également été perquisitionnée. Les deux militants ont rapidement été libérés sous caution.

Toutefois, les autorités ont continué d’intensifier la répression de la dissidence dans la ville, arrêtant et intimidant les politiciens pandémocrates. En raison de la Covid-19, les élections législatives prévues début septembre ont été reportées indéfiniment. Plus de 1 000 personnes ont été détenues ou arrêtées depuis l’entrée en vigueur de la Loi sur la sécurité nationale.

Les trois militants se sont entretenus avec les journalistes avant d’aller au tribunal. Joshua Wong, qui, comme Ivan Lam, avait déjà été arrêté et condamné, a confirmé qu’il prévoyait de prendre la « mesure technique » consistant à plaider coupable, après avoir examiné toutes les preuves présentées par l’accusation et consulté des avocats.

Ils ont exprimé leur inquiétude quant à la manière dont Agnes Chow serait traitée en prison.

Agnes Chow a demandé à ses alliés de penser à ceux qui ont souffert davantage qu’elle. (Image : wikimedia / Honcques Laus / CC0)
Agnes Chow a demandé à ses alliés de penser à ceux qui ont souffert davantage qu’elle. (Image : wikimedia / Honcques Laus / CC0)
 

Agnes Chow, surnommée la « déesse de la démocratie » par ses sympathisants au Japon et dans d’autres régions d’Asie, a déclaré aux observateurs que, bien qu’elle soit inquiète pour son avenir, beaucoup avaient souffert davantage qu’elle.

À titre d’exemple, elle a mentionné les 12 Hongkongais arrêtés et privés d’une représentation légale adéquate après avoir tenté de s’échapper en bateau vers l’état démocratique de Taiwan.

Stand News a rapporté qu’Agnes Chow était émue et en larmes lors de sa condamnation, qui a eu lieu la veille de son 24ème anniversaire. Elle a déclaré qu’elle ne regrettait pas sa décision de participer au mouvement démocratique, même si cela signifiait qu’elle pouvait être incarcérée en Chine continentale.

Sa déclaration reflète les soupçons largement répandus selon lesquels, bien que le projet de loi sur l’extradition ait été abandonné en octobre dernier, un grand nombre des manifestants arrêtés ont été secrètement envoyés dans des prisons de Chine continentale.

La loi sur la sécurité nationale a entraîné une réaction brutale de la part des États-Unis. Le secrétaire d’État Mike Pompeo et le président Donald Trump ont rapidement condamné la loi alors envisagée. En août, 11 dirigeants de Hong Kong, dont Carrie Lam, ont été sanctionnés par le ministère du commerce.

Le 27 novembre, Carrie Lam a révélé qu’elle n’avait « aucun service bancaire à sa disposition », en raison des sanctions, et a laissé entendre qu’elle craignait que les sanctions ne découragent les gens de travailler pour le service public.

Carrie Lam n’a nulle part où déposer son salaire dû au respect des sanctions américaines par les banques de Hong Kong. (Image : Capture d’écran / YouTube)
Carrie Lam n’a nulle part où déposer son salaire dû au respect des sanctions américaines par les banques de Hong Kong. (Image : Capture d’écran / YouTube)
 

Activisme des jeunes

Bien que Hong Kong ait été rendue à la Chine par la Grande-Bretagne en 1997, la ville avait été autorisée à conserver son état de droit constitutionnel. En 1984, le dirigeant chinois de l’époque, Deng Xiaoping, avait promis que Hong Kong conserverait une autonomie fonctionnelle dans le cadre de l’accord « un pays, deux systèmes », jusqu’en 2047.

Cependant, les Hongkongais ne se sont vu accorder que des droits démocratiques limités, la scène politique de la ville étant fortement dominée par des fonctionnaires et des intérêts commerciaux favorables à Pékin. En réponse à plusieurs tentatives détournées du PCC d’empiéter sur l’autonomie de Hong Kong, les Hongkongais ont participé à plusieurs mouvements de masse pour résister à Pékin - les premiers étant les vigiles annuelles toujours en cours pour commémorer le massacre de la place Tiananmen en 1989, et les manifestations de 2003 contre la tentative du Parti de mettre en œuvre l’article 23, une législation qui fonctionne de manière similaire à la loi de sécurité nationale actuelle.

Joshua Wong, Agnes Chow et Ivan Lam sont impliqués dans la scène pro-démocratique depuis des années, Joshua Wong et Agnes Chow étaient tous deux mineurs lors du « mouvement des parapluies » de l’été et de l’automne 2014. Avant cela, ils ont pris part au mouvement d’opposition au programme d’« éducation patriotique » visant à inculquer aux jeunes de la ville une pensée et des valeurs pro-communistes.

En 2011, le gouvernement de Hong Kong a lancé une consultation publique sur « l’éducation morale et patriotique ». Cette initiative a été largement perçue comme une tentative du PCC d’inculquer ses récits sur l’identité et l’histoire chinoises aux habitants de Hong Kong, qui étaient habitués à la culture traditionnelle chinoise et aux libertés politiques du modèle occidental.

Les Hongkongais se rassemblent pour une veillée aux chandelles afin de commémorer le massacre de la place Tiananmen, dans le parc Victoria, à Hong Kong, le 4 juin 2020. Depuis plus de 30 ans, les Hongkongais ont ressenti une certaine affinité avec les étudiants protestataires tués par l’APL à Tiananmen lors du mouvement pro-démocratique de 1989. (Image : Song Bilung / The Epoch Times)
Les Hongkongais se rassemblent pour une veillée aux chandelles afin de commémorer le massacre de la place Tiananmen, dans le parc Victoria, à Hong Kong, le 4 juin 2020. Depuis plus de 30 ans, les Hongkongais ont ressenti une certaine affinité avec les étudiants protestataires tués par l’APL à Tiananmen lors du mouvement pro-démocratique de 1989. (Image : Song Bilung / The Epoch Times)
 

Joshua Wong et Ivan Lam, qui étaient alors au collège, ont formé une organisation d’étudiants du nom de « Scholarism ». L’organisation a joué un rôle crucial dans la protestation contre le programme d’« éducation patriotique » en 2012, les protestations du public ayant contraint le directeur général Leung Chun-ying à mettre cette politique en veilleuse.

Le rôle de Scholarism dans le mouvement anti « éducation nationale » a été crucial : en 2012, Scholarism a organisé plusieurs marches et rassemblements impliquant des dizaines de milliers de personnes, avec plusieurs leaders étudiants menant une grève de la faim. En septembre de la même année, le chef de l’exécutif de Hong Kong de l’époque, Leung Chun-ying, a été contraint d’annoncer un moratoire sur cette politique.

En 2014, le Mouvement des parapluies a fait campagne pour le « double suffrage universel », qui fait référence au droit des Hongkongais de voter à la fois pour leurs législateurs et pour le chef de l’exécutif, comme le stipule la loi fondamentale. Les universitaires ont également pris part à cette campagne, Joshua Wong étant devenu une figure majeure des protestations.

En 2016, Scholarism s’est transformé en un parti politique, « Demosisto », qui a fait pression pour plus de droits démocratiques.

Lors des manifestations anti-extradition de 2019, Agnes Chow, autodidacte parlant couramment le japonais, a fait la promotion du mouvement pro-démocratique au Japon, où elle a gagné de nombreux partisans. Le gouvernement japonais a également exprimé son soutien au mouvement.

Espoir pour Hong Kong

Agnes Chow a fait part des inquiétudes de la population lorsqu’elle a parlé aux journalistes de l’avenir de Hong Kong dans le cadre de la loi sur la sécurité nationale.

Elle a fait remarquer qu’après l’adoption de cette loi, elle a été harcelée peu avant son arrestation en août par des hommes qui semblaient être des policiers en civil - un type de harcèlement courant que connaissent les dissidents sur le continent.

« C’était comme un système de quart, quatre personnes attendaient pendant quelques heures, puis une voiture venait les chercher, et ensuite trois ou quatre autres hommes venaient », a-t-elle déclaré aux journalistes.

S’adressant à Apple Daily avant d’aller au tribunal, Agnes Chow a déclaré qu’elle comprenait qu’aller en prison « est en effet un processus difficile ».

Mais le plus pénible a été la loi de sécurité et son impact durable sur l’expression politique à Hong Kong. Avec la répression croissante de la dissidence, a-t-elle dit : « Mon avenir aussi me sera enlevé. »

Agnes Chow est toujours remplie d’espoir. « L’histoire nous dit que lorsqu’une dictature ou un régime totalitaire est renversé, personne ne peut prédire la réforme à l’avance. Elle encourage les habitants de Hong Kong à « se souvenir des valeurs qu’ils défendent », même lorsqu’ils sont confrontés à une dictature.

Rédacteur Gabriel Olamsaint

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