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Nature. Le processus fascinant à l’origine de la beauté des fibres naturelles : la laine (2/4)

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Poursuivant notre exploration des fibres naturelles, nous allons nous pencher sur un autre grand classique : la laine, c’est-à-dire les poils récoltés sur les animaux - principalement les moutons, mais aussi un nombre surprenant d’autres mammifères. La laine est une fibre de base depuis plusieurs milliers d’années. Elle fournit des textiles chauds, ignifuges et hypoallergéniques pour tous les types de vêtements, de tapis, de tapisseries, etc.

Chaque race a une qualité de laine particulière qui sera plus adaptée pour certaines utilisations. (Image : Gilmer Diaz Estela / pexels)

La laine de mouton

Les moutons ont été parmi les premiers animaux domestiqués, élevés principalement pour leur viande, leur lait et leur peau dès 11 000 ans av. J.-C. en Mésopotamie. Bien qu’il soit difficile de trouver des spécimens conservés de cette matière biodégradable, il existe des preuves que l’homme a transformé la laine à peu près à la même époque.

À la fin de l’âge de pierre, au cours de la période néolithique, les modes de vie sont passés de la chasse à la cueillette à l’agriculture et à l’élevage sur des sites. Des moutons ont été élevés dans le Sud de la France dès 6 000 ans avant notre ère. Au fur et à mesure du développement de la civilisation, les moutons ont été élevés pour obtenir des toisons plus abondantes et des qualités distinctives.

Les moutons Shetland d’Écosse, par exemple, produisent une laine épaisse et robuste utilisée dans le classique pull-over des îles Aran, traditionnellement porté par les fermiers et les pêcheurs d’Écosse et d’Irlande. Il reste encore aujourd’hui un classique de la mode.

La laine est l’une des fibres naturelles les plus utilisées dans le monde. (Image : Freddy / Pixabay)

Le Romney est une race populaire dans le monde entier, tant pour sa viande que pour sa fibre. Sa laine longue et grossière peut être blanche, grise, argentée, brune ou noire. Elle a un aspect naturel et terreux et convient mieux aux vêtements d’extérieur, aux tapis et aux tapisseries.

La plupart des moutons élevés pour leur laine fine sont des races à base de mérinos. Les moutons mérinos sont originaires d’Espagne, où la famille royale possédait un troupeau très prisé. Cette race était tellement appréciée pour la douceur de sa toison - comparable à la laine d’agneau - que l’exportation des moutons était passible de la peine de mort. Toutefois, après 1765, la monarchie a jugé bon de faire don de petits troupeaux à des pays alliés et à des éleveurs sélectionnés, permettant ainsi à d’autres de produire de la laine mérinos de qualité.

En France, on compte une soixantaine de races ovines dont beaucoup sont rattachées à une région spécifique. Chaque race a une qualité de laine particulière qui sera plus adaptée à certaines utilisations : vêtements, chaussons, tapis, rideaux, literie, panneaux d’isolation thermique, etc. Il y a de nombreuses utilisations possibles de cette matière généreuse pour notre bien-être.

À mesure que l’élevage de moutons s’est répandu, la laine est devenue l’une des fibres naturelles les plus utilisées dans le monde. Aujourd’hui, la Chine et l’Australie sont les principaux producteurs de laine de mouton. Leur petit voisin, la Nouvelle-Zélande, occupe une impressionnante troisième place, avec une production supérieure à la moitié de celle de l’Australie, un pays presque trente fois plus grand qu’elle.

Les chèvres du Cachemire ont un poil grossier auquel s’ajoute une fibre extrêmement fine et chaude. (Image : Alexa / Pixabay)

Autres fibres naturelles animales

Si les moutons sont de loin la première source de laine au monde, de nombreux animaux produisent de la laine, chacun avec ses propres qualités.

Les chèvres produisent du mohair et du cachemire. Les chèvres mohair sont généralement tondues deux fois par an, pour leur poil épais et brillant, appelé mohair. Après la tonte d’automne, elles peuvent avoir besoin d’être protégées du froid jusqu’à ce que leurs poils repoussent.

Les chèvres du Cachemire ont un poil grossier (le jarre) auquel s’ajoute une fibre extrêmement fine et chaude qui les protège des températures glaciales de leur habitat himalayen.

La fibre de cachemire est obtenue par peignage des chèvres ou par la tonte au printemps.

Les lapins angoras, issus d’une mutation génétique, avec leurs poils longs et creux, fournissent peut-être la fibre la plus fine, la plus chaude et la plus légère, appelée laine angora. Les éleveurs d’angoras peignent leurs lapins tous les jours pour éviter que leurs poils s’emmêlent. La toison est récoltée par épilation au peigne, trois ou quatre fois par an, ou par tonte.

L’élevage de lapins angoras s’est beaucoup développé dans les dernières décennies en Chine au détriment d’autres pays comme l’Allemagne ou la France. Les méthodes chinoises d’élevage de lapins angora et de récolte de la fourrure sont très controversées car elles engendrent beaucoup de souffrance animale.

Cette laine délicate est souvent mélangée à d’autres fibres pour améliorer sa durabilité ou pour ajouter de la douceur à d’autres tissus.

La laine de chameau est souvent laissée dans sa couleur naturelle, le 
« camel », pour un look classique dans les vêtements d’extérieur. (Image : Maria / Pixabay)

Les camélidés comme les alpagas, les lamas et les chameaux ont également des poils creux qui sont particulièrement légers et chauds. Les alpagas, originaires d’Amérique du Sud, sont tondus à la main (avec des ciseaux) chaque printemps pour leur laine très douce, mais durable.

Les lamas ne sont tondus que tous les deux ans, et les poils les plus grossiers, qui conviennent aux tapis et aux tapisseries, sont séparés du poil laineux, plus précieux.

La toison des chameaux est souvent recueillie par peignage, ou ramassée au printemps, lors de la mue des animaux.

Le bison possède également une toison incroyablement douce, semblable au mohair par sa texture et au cachemire par sa chaleur.

Le yak fournit une laine très appréciée. (Image : wikimedia / Shameer Thajudeen / CC BY-SA 4.0)

Un autre bovidé de l’Himalaya, le yak, fournit une laine très appréciée. Ces caractéristiques sont les mêmes que celles de la laine de bison, du chameau, ou encore du cachemire.

Le traitement de la laine

À l’exception de la laine angora - les lapins étant des animaux très propres - la plupart des laines nécessitent un traitement important avant que les fibres ne soient prêtes à l’emploi.

La toison des moutons, par exemple, passe par un certain nombre d’étapes avant d’être filée. Non seulement leur laine recueille de nombreux débris et du fumier, mais elle contient également de la lanoline, une substance grasse qui peut rendre les fibres collantes.

Poursuivant notre exploration des fibres naturelles, nous allons nous pencher sur un autre grand classique : la laine, c'est-à-dire les poils récoltés sur les animaux - principalement les moutons, mais aussi un nombre surprenant d'autres mammifères. La laine est une fibre de base depuis plusieurs milliers d'années.
La tonte annuelle est bénéfique pour les moutons comme pour les éleveurs. (Image : Sabine Löwer / Pixabay)

Étape 1 - La tonte

Le processus commence par la tonte annuelle, le plus souvent effectuée à l’aide de tondeuses électriques. Les fibres sont généralement suffisamment entremêlées pour que la toison reste intacte en un seul morceau et ressemble à une fourrure.

Cette « récolte » annuelle permet non seulement d’obtenir des fibres chaudes et laineuses, mais elle est également bénéfique pour les moutons. La tonte permet d’éviter la surchauffe des moutons pendant l’été, d’éloigner les parasites et d’alléger leur charge.

Étape 2 - Le tri de la laine

Le tri permet de séparer les zones inutilisables de la toison. Bien que la totalité de la toison soit tondue, la toison du ventre et des pattes - qui contient les fibres les plus courtes et les plus sales - est généralement jetée. Les zones présentant un excès de débris, de nœuds ou de lanoline sont également éliminées à ce stade.

Diverses caractéristiques déterminent la qualité d'une laine. (Image : wikimedia / CSIRO / CC BY 3.0)

Étape 3 - Le classement

Après avoir été triée, la laine est classée en fonction de son épaisseur et de sa propreté afin que les acheteurs puissent juger la qualité de leur achat. La race du mouton, la longueur de fil qui peut être filée à partir d’un kilo et le diamètre moyen des fibres (mesuré en micromètres) sont également des éléments à prendre en compte dans le classement.

Étape 4 - La mise en ballots

La laine d’un seul animal est appelée « toison ». Dans le commerce, ces dernières, après avoir été pliées, sont mises en ballots. Un ballot peut peser entre 200 et 300 kg et contenir de 60 à 300 toisons individuelles suivant les races de moutons et l’état des toisons.

Étape 5 - Le mélange

Les toisons triées et classées peuvent être mélangées. Le fait de classer les toisons et de combiner la laine de différents ballots permet d’obtenir un produit uniforme. Le mélange peut également être effectué à d’autres étapes.

Étape 6 - Le lavage

Le lavage commence par un long trempage à froid pour éliminer les débris et les sels (de la sueur). Afin d’éviter le feutrage, le lavage n’est pas agité.

Toisons lavées suspendues pour sécher à Muş, en Turquie. (Image : wikimedia / Dosseman / CC BY-SA 4.0)

Le lavage suivant s’appelle le dégraissage : la toison est placée dans un bain chaud avec du détergent pour extraire les impuretés restantes et la lanoline grasse. La lanoline est un émollient efficace pour apaiser les peaux sèches et gercées. Dans le commerce, elle est extraite par centrifugation et utilisée dans de nombreux produits de santé et de beauté.

Dans les cas où des matières végétales - telles que les graines et les brindilles - sont présentes en quantités importantes, les installations de production à grande échelle utilisent également un processus appelé carbonisation, qui consiste à utiliser de l’acide sulfurique pour dissoudre les matières étrangères qui seraient traditionnellement éliminées au cours des étapes suivantes.

La laine propre est rincée abondamment et séchée sur des claies.

Étape 7 - Le défibrage

La laine propre et sèche est étirée pour séparer les fibres, détacher les débris collés et préparer le cardage. Pour de petites quantités, cette étape peut se faire à la main ou à l’aide de peignes. Au cours de cette opération, la laine peut être mélangée, triée et nettoyée. Le défibrage peut être réalisée bien à l’avance et facilite grandement l’étape suivante, le cardage.

Étape 8 - Le cardage

Le cardage consiste à démêler les fibres, traditionnellement à l’aide de deux grandes brosses rigides appelées cardes. Vous commencez à l’extrémité et vous descendez le long de la laine défibrée placée sur la première cardeuse. Après quelques coups de brosse, la laine est transférée sur la deuxième cardeuse et le processus est répété sur l’envers de la laine. Lorsque la laine est lâche, duveteuse et sans nœuds, les cardes sont utilisées pour rouler la laine souple en cylindre.

Le cardage à la main est un travail long et exigeant, c’est pourquoi les installations commerciales utilisent des machines à carder, mais la qualité de la laine cardée à la main est toujours appréciée. La laine est maintenant prête à être filée.

Étape 9 - Le filage

D’anciens vestiges de cordes et de cordons suggèrent que le filage primitif a commencé il y a des dizaines de milliers d’années, le rouet en bois ne faisant son apparition que dans la seconde moitié du premier millénaire. Le rouet était suffisamment petit et bon marché pour être utilisé par tous, et avant la révolution industrielle, il était courant d’avoir un rouet à la maison.

Le filage de la laine au rouet est presque devenu un art perdu. (Image : Michel Rohan / Pixabay)

Le filage de la laine à la main est un long processus d’extraction progressive des fibres, petit à petit, au fur et à mesure qu’elles sont étirées et tordues en un fil fin et enroulées sur une bobine - qui peut mettre plusieurs heures à se remplir. Ce fil peut être combiné à d’autres fils - tordus dans le sens inverse - pour former un fil plus épais et plus résistant à la traction, ou il peut être utilisé directement pour tisser des textiles.

Avec l’avènement des fibres synthétiques et des usines textiles, le filage au rouet est presque devenu un art perdu, mais des éleveurs de moutons et d’autres personnes aimant cette matière naturelle ont relancé cette pratique au cours des dernières décennies.

Bien que la laine soit 100 % naturelle, biodégradable et renouvelable, cette matière durable, confortable et belle est rapidement remplacée par des fibres synthétiques. John Roberts, directeur général de Woolmark, estime que « dans dix ans à peine, 73 % de l’ensemble du marché de l’habillement sera fabriqué à partir de fibres synthétiques, directement dérivées des combustibles fossiles », et met en garde contre l’impact à long terme de cette tendance.

Rédacteur Albert Thyme

Source : The Fascinating Process behind the Beauty of Natural Fibers – Part II: Wool

À suivre...

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