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Tradition. Les six jeux chinois traditionnels qui animaient les banquets en Chine ancienne

CHINE ANCIENNE > Tradition

Les Français aiment partager de bons petits plats avec les amis, discuter ou raconter des blagues à table pour passer de bons moments ensemble. Les Chinois de l’Antiquité faisaient de même : ils jouaient souvent à divers jeux pour animer leurs banquets. Aujourd’hui, nous allons vous présenter six jeux chinois traditionnels pratiqués lors des banquets dans la Chine ancienne.

« Jeu de lancer », jeu chinois traditionnel 

Le « jeu de lancer » chinois (Tou Hu) trouve son origine dans les rites de tir à l’arc de la Chine ancienne. Les gentlemen de l’Antiquité devaient maîtriser six arts, dont l’un était le tir à l’arc. Sous la dynastie Zhou (environ du XIe siècle av. J.-C. à 256 av. J.-C.), les érudits-fonctionnaires devaient inviter leurs invités à tirer à l’arc lors des banquets. Plus tard, les gens ont progressivement remplacé le tir à l’arc par le lancer de flèches dans un récipient à vin, ce qui est devenu le « jeu de lancer » chinois. 

Confucius a décrit en détail le déroulement du jeu dans le Li Ji • Tou Hu. Avant de lancer, il fallait désigner un arbitre. Les participants devaient lancer des flèches en bois sans pointe dans le récipient à vin et le nombre de flèches lancées dans le récipient déterminait le vainqueur. Une fois tous les lancers effectués, l’arbitre annonçait le nom du vainqueur et « le vainqueur faisait boire le perdant » en ordonnant de jouer de la musique. Il n’est pas difficile de voir que le « jeu de lancer » fait partie du rituel chinois de l’époque et qu’il s’agit d’une activité se déroulant dans une ambiance assez solennelle.

Les six jeux chinois traditionnels qui animaient les banquets en Chine ancienne
 L’empereur Xuan Zong de la dynastie Ming jouait à un « jeu de lancer » lors de la fête des lanternes. (Image : wikimedia / See page for author / Domaine public)

D’après l’Ancien Livre des Tang: « Les lettrés des générations précédentes, lors de banquets organisés à des moments propices, discutaient, composaient des poèmes, jouaient au " jeu de lancer " et chantaient des chansons élégantes, s’offraient des coupes de vin, sans jamais tomber dans l’excès. » Lors de ces banquets, les lettrés chinois jouaient au « jeu de lancer » et composaient des poèmes dans une ambiance harmonieuse, ce qui permettait d’éviter les excès d’alcool et les comportements inconvenants. C’était l’une des raisons pour lesquelles les Chinois avaient instauré le « jeu de lancer » traditionnel.

Comme il s’agit d’un jeu, il y avait forcément des experts. Selon la légende, Guo She, un courtisan de la dynastie Han (206-220 av. J.-C.), était capable de lancer une flèche dans le récipient, de la faire rebondir dans sa main, puis de la relancer. Su Xuanfu, de la dynastie Ming (1368–1644), était encore plus doué : il pouvait lancer une flèche dans le récipient les yeux fermés et atteindre sa cible à chaque fois. Il pouvait même lancer trois flèches simultanément et atteindre trois récipients différents, ce qui était tout simplement incroyable.

« L’eau courante et les coupes flottantes »

Le jeu « l’eau courante et des coupes flottantes » (Qu Shui Liu Shang) vient de la réunion au Pavillon des orchidées (Lan Ting) au cours de la neuvième année de l’ère Yonghe de la dynastie des Jin de l’Est (317-420). En 353, Wang Xizhi, Xie An et d’autres lettrés de la dynastie des Jin se sont réunis au Pavillon des orchidées, sur le mont Kuaiji, pour célébrer la fête de Shangsi.

Les convives s’asseyaient au bord d’un cours d’eau sinueux, dans le jardin, et attendaient que les coupes de vin flottent sur le courant. Lorsque celles-ci arrivaient devant eux, ils devaient les prendre, boire le vin, puis composer un poème. Au total, 37 poèmes ont vu le jour au cours de cette beuverie, qui ont été rassemblés dans le Recueil du pavillon des Orchidées. Wang Xizhi a écrit une préface pour ce recueil, qui est restée célèbre à travers les âges sous le titre la Préface au recueil du pavillon des Orchidées.

Les six jeux chinois traditionnels qui animaient les banquets en Chine ancienne
« L’eau courante et les coupes flottantes », Cérémonie de purification au Pavillon des Orchidées, par Li Zongmo, dynastie Ming. (Image : Musée national du Palais Taipei / CC BY 4.0 @ www.npm.gov.tw)

Sous la dynastie Tang (18 juin 618 - 1er juin 907), ce type de banquet était tellement apprécié des lettrés que de nombreux endroits ont construit des bassins pour faire couler les coupes de vin afin d’organiser ce type de banquet. Il s’agit d’un mariage parfait de la poésie et du vin et qui a donné naissance à de nombreux poèmes sublimes et éternels.

Il est à noter que lorsque ce jeu a été introduit au Japon, il a immédiatement séduit la noblesse japonaise, qui a développé un modèle unique : au cours du banquet, les poètes s’asseyaient au bord du cours d’eau sinueux et composaient des poèmes tout en buvant du vin dans les coupes flottantes. Des musiciens professionnels jouaient des morceaux traditionnels japonais et, une fois les poèmes terminés, ils étaient lus par des spécialistes. Cette pratique a conservé les caractéristiques de la culture chinoise tout en s’imprégnant du charme japonais, témoignant ainsi de la fusion des cultures des deux pays.

Jeu à boire « aux fleurs volantes »

Le jeu à boire traditionnel chinois, empreint de poésie, est un élément important de la culture traditionnelle chinoise. Il s’agit d’un jeu destiné à animer les banquets et à divertir les convives. Il trouve son origine dans les rites confucéens et est apparu pour la première fois sous la dynastie Zhou. Il s’agit d’un jeu qui est à la fois l’expression de la tradition d’hospitalité des Chinois anciens et le fruit de leur art de boire et de leur sagesse.

Le jeu à boire « aux fleurs volantes » (Fei Hua Ling) est un jeu à boire unique aux Chinois, dont le nom venait d’un vers du célèbre poème Festival de la nourriture froide (Han Shi) du poète Han Hong (vers 729-788) de la dynastie Tang : « Au printemps, il n’y a pas un endroit dans la ville où les fleurs ne volent pas ». C’était l’un des jeux à boire préférés des Tang (618-907).

Il existait plusieurs façons de jouer à ce jeu. La première consistait à convenir à l’avance que chaque participant doit réciter un vers de poésie contenant un certain caractère chinois, par exemple « fleur ». Le caractère chinois « fleur » devait alors apparaître à un endroit précis. Si la première personne a dit « Combien de fleurs sont tombées ? », la personne suivante devait réciter un autre vers contenant le caractère chinois « fleur » dans une autre position dans l’ordre des mots, par exemple « Au printemps, il n’y a pas un endroit dans la ville où les fleurs ne volent pas », et ainsi de suite. C’est là que résidait la difficulté de ce jeu.

Les six jeux chinois traditionnels qui animaient les banquets en Chine ancienne
Jeu à boire « aux fleurs volantes ». (Image : Musée national du Palais Taipei / CC BY 4.0 @ www.npm.gov.tw)

La deuxième façon de jouer était plus simple : l’ordre des caractères chinois n’avait pas d’importance. Lorsqu’un joueur récitait un vers de poésie contenant le caractère chinois « fleur », l’invité assis à la position correspondante devait boire un verre de vin. Prenons l’exemple de « Combien de fleurs sont tombées ? », c’est l’invité assis en troisième position qui devait boire un verre. Le jeu continue jusqu’à ce que tous les participants aient récité un vers contenant le caractère chinois « fleur » et bu leur verre. Le jeu pouvait alors prendre fin.

La troisième méthode consistait à demander à chaque invité de réciter à tour de rôle un vers de poème contenant le caractère chinois « fleur », sans tenir compte de l’ordre des mots. Celui qui ne parvenaient pas à réciter un vers devait boire un verre. 

Pour participer au jeu à boire « aux fleurs volantes », les participants devaient avoir une grande connaissance de la poésie, c’est pourquoi ce jeu de mots était très apprécié des lettrés dans la Chine ancienne, mais il était toutefois beaucoup moins difficile à jouer que « l’eau courante et les coupes flottantes ».

« Battre le tambour et passer la fleur » 

Le jeu de « battre le tambour et passer la fleur » (Ji Gu Chuan Hua) était très populaire lors des banquets dans la Chine ancienne. Il était joué lors de banquets ou simplement pour se divertir lorsque l’on était nombreux. Il pouvait convenir à tous et perdure jusqu’à nos jours. 

Cette tradition aurait été inventée par Ouyang Xiu (6 août 1007 - 8 septembre 1072) durant la dynastie Song. Lorsqu’il était gouverneur de Yangzhou, dans la province du Jiangsu, Ouyang Xiu a fait construire le célèbre pavillon Ping Shan Tang. Chaque été, il y invitait ses amis pour un banquet et demandait à un serviteur d’aller cueillir 100 fleurs de lotus au lac pour les répartir dans les quatre coins de la salle de réception. 

Au début du jeu, les musiciens jouaient de la musique et les serveurs distribuaient une fleur de lotus aux invités qui se la passaient l’un après l’autre. Lorsque la musique s’arrêtait, celui qui tenait la fleur devait boire et composer un poème.

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Le banquet du soir chez Han Xizai, par Tang Yin, dynastie Ming.
Crédit : Musée national du Palais Taipei. (Image : Musée national du Palais Taipei / CC BY 4.0 @ www.npm.gov.tw)

Le joueur de tambour devait également faire preuve de l’habileté, jouant tantôt rapidement, tantôt lentement, pour créer un suspense qui intensifiait l’excitation dans la salle. Dès que le tambour s’arrêtait, tous les regards se tournaient vers la personne qui tenait la fleur et tout le monde éclatait de rire, apaisant l’ambiance. La personne qui tenait la fleur devait alors boire. Si la fleur se trouvait entre deux personnes, celles-ci pouvaient déterminer le gagnant et le perdant en jouant à « pierre-papier-ciseaux » ou par un autre moyen. 

« Cacher le crochet »

L’origine du jeu « cacher le crochet » (Cang Gou) est très intéressante. Selon la légende, lorsque l’empereur Han Wudi (30 juillet 157 av. J.-C. – 29 mars 87 av. J.-C.) passait par Hejian, son géomancien chargé de vérifier le Feng Shui a découvert une femme qui pourrait donner naissance à un empereur. L’empereur a donc convoqué cette femme.

Cette femme était très mystérieuse : depuis son enfance, elle ne pouvait pas ouvrir les mains, jusqu’à sa rencontre avec l’empereur Han Wudi qui a réussi à lui ouvrir les mains. L’empereur a constaté qu’un crochet en jade était caché dans les mains de cette jeune femme. Il l’a épousée et l’a nommée concubine Zhao. Le couple a eu un fils qui est devenu plus tard l’empereur Han Zhaodi. Le jeu « cacher le crochet » tire justement son origine du miracle de cette femme. 

Le but du jeu était de deviner dans quelle main le crochet en question était caché. Les joueurs étaient divisés en deux équipes : celle qui cachait et celle qui cherchait. Les deux équipes étaient généralement assises face à face. L’équipe qui cachait le crochet se le passait entre les équipiers ou faisait semblant de le passer, tandis que l’autre équipe devait deviner qui tenait le crochet dans la main.

Les six jeux chinois traditionnels qui animaient les banquets en Chine ancienne
Un banquet littéraire sous la dynastie Tang. (Image : Musée national du Palais Taipei / CC BY 4.0 @ www.npm.gov.tw)

Le nombre de participants au jeu était illimité. Plus les participants étaient nombreux, plus il était difficile de deviner. Les morceaux divers de Youyang (酉陽雜俎) de Duan Chengshi (800-863) de la dynastie Tang (618-907) raconte qu’à l’époque, un candidat aux examens impériaux nommé Gao Ying et un ermite nommé Shi Min étaient tous les deux très doués pour ce jeu.

Une fois, Duan Chengshi jouait au « cacher le crochet » avec Gao Ying et d’autres personnes. Chaque équipe était composée d’une cinquantaine de joueurs, mais Gao Ying arrivait à deviner où se trouvait le crochet presque à chaque fois. Une autre fois, c’était Shi Min qui faisait ce jeu avec deux frères. Où que ces derniers cachaient le crochet, que ce soit dans le chapeau ou dans le turban, Shi Ming pouvait toujours gagner. Plus tard, lorsque Duan Chengshi a fait la connaissance de Shi Ming et il demandait souvent à Shi Ming les astuces pour deviner.

Ce jeu était très populaire dans la Chine ancienne, quelle que soit la dynastie. Cai lan za zhi, un roman écrit avant la dynastie Ming, rapporte que les femmes jouaient au « cacher le crochet » le dix-neuvième jour de chaque mois lunaire et pouvaient y passer toute la nuit, ce qui montre bien à quel point ce jeu était apprécié. De plus, ce jeu n’était pas seulement apprécié par le peuple, mais également très populaire parmi les courtisanes de la cour impériale.

Deviner l’objet caché

En parlant de « cacher le crochet », il est impossible de ne pas mentionner un autre jeu similaire : deviner l’objet caché. Il s’agit de couvrir un objet avec un récipient, comme une coupe ou un bol et de demander aux autres de deviner quel est l’objet caché. En chinois, ce jeu s’appelle « She Fu » 

Cependant, comparé au jeu de « cacher le crochet », ce jeu très difficile était plutôt pratiqué par les pratiquants de la spiritualité dans l’Antiquité ou par ceux qui étudiaient le Yi Jing ou la divination. Dans la Chine ancienne, il y avait de nombreux pratiquants de la spiritualité et même parmi ceux qui ne pratiquaient pas la spiritualité, nombreux étaient ceux qui étudiaient le Zhouyi et s’adonnaient à des arts tels que la divination ou la chiromancie.

Selon la légende, Dongfang Shuo (vers 160 av. J.-C. - vers 93 av. J.-C.) était un maître du jeu de She Fu. D’après le Livre des Han, l’empereur a couvert un lézard sous une coupelle. Puis il a fait deviner ce qui était caché à plusieurs maîtres de technique prodigieuse mais personne n’a réussi à trouver la réponse. 

Dongfang Shuo s’est alors avancé pour demander s’il pouvait essayer. Une fois autorisé, il utilisa ses outils de divination pour deviner : « Cela ressemble à un dragon, mais n’a pas de cornes, si on l’appelle serpent, il a des pattes, il est doué pour grimper aux murs, c’est soit un lézard, soit une salamandre ». L’empereur a dit « Bravo » avant d’offrir dix rouleaux de soie à Dongfang Shuo. Par la suite, l’empereur Han Wudi a fait deviner plusieurs autres objets cachés à Dongfang Shuo, qui les a trouvés à chaque fois, et l’empereur lui a offert de nombreux cadeaux en soie. Cet événement montre que Dongfang Shuo était doué pour l’art divinatoire.

Les six jeux chinois traditionnels qui animaient les banquets en Chine ancienne
Deviner ce qui est caché dans une boite. Extrait de l’album, Le rêve dans le pavillon rouge, peint par Sun Wen au XIXe siècle. (Image : wikimedia / Sun Wen (1818-1904) / Domaine public)

En réalité, le jeu de deviner l’objet caché était très répandu, même dans la vie quotidienne des Chinois anciens. Un jour, l’empereur Tang Xuanzong (8 septembre 685 - 3 mai 762) souhaitait nommer un chancelier. Il a écrit le nom des candidats sur des feuilles de papier, les a recouverts d’un couvercle en or, puis il a demandé à son fils, le prince, de deviner qui il avait choisis. Le prince a correctement deviné qu’il s’agissait de Cui Lin et Lu Cong.

Ce jeu n’était pas accessible à tout le monde : les personnes qui ne maîtrisaient pas l’art divinatoire ou qui n’avaient pas de dons de voyance ne pouvaient que se fier à leur intuition, ce qui rendait le jeu beaucoup moins intéressant. C’est pourquoi, au fil du temps, il est devenu un jeu de devinettes écrit, consistant à deviner des mots à partir de phrases liées entre elles.

Si le devin est incapable de deviner ou se trompe, ou si celui qui cache ne comprend pas les explications du devin, ils doivent boire une gorgée de vin. Ce jeu amélioré peut être considéré comme l’ancêtre des devinettes de lanternes.

Conclusion

Après toutes ces présentations, quel jeu vous convient le mieux ? Pourquoi ne pas les essayer avec votre famille et vos amis pendant les vacances d’été ? Peut-être découvrirez-vous un nouveau plaisir dans ces jeux chinois traditionnels.

Rédacteur Yi Ming

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