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Monde. L’Occident face à la nature du Parti communiste chinois

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En 2020, le monde démocratique a compris que « le Parti communiste chinois (PCC) est un virus qui met le monde en danger »

« L’année 2020 a vu un changement fondamental dans l’attitude du monde démocratique envers le Parti communiste chinois. (…) la nouvelle vision populaire est que le PCC est le virus qui met en danger le monde », a écrit Peter Van Praagh en préface du rapport La Chine et les démocraties - le plus grand jeu du siècle. (Image : Capture d’écran / YouTube)

Le Forum international d’Halifax sur la sécurité, un rassemblement annuel au Canada de repésentants de différents pays démocratiques, a publié ce week-end un rapport intitulé La Chine et les démocraties - le plus grand jeu du siècle. Dans la préface du rapport, le président du forum, Peter Van Praagh, a écrit : « L’année 2020 a vu un changement fondamental dans l’attitude du monde démocratique envers le Parti communiste chinois. Plus précisément, si la vision traditionnelle du passé était qu’une Chine économiquement prospère apporterait en fin de compte plus de liberté à son peuple, la nouvelle vision populaire est que le PCC est le virus qui met en danger le globe ».

Ce rapport rassemble les points de vue de plus de 250 experts du monde entier. Il utilise des preuves détaillées pour mettre en évidence, sous plusieurs angles, la menace que la Chine représente pour les démocraties, notamment la domination à l’interne du Parti communiste, son offensive contre les démocraties, l’autoritarisme technologique de la Chine et sa planification stratégique.

La pandémie mondiale a réveillé les démocraties

Le rapport indique que l’agression de la Chine contre les démocraties et la démocratie en général, dure depuis des années, elle a commencé bien avant que l’administration Trump des États-Unis ne change de position à l’égard de la Chine. Ce n’est que lorsque l’épidémie due au coronavirus a éclaté que le monde a commencé à prendre réellement conscience de la menace posée par la Chine. « Il n’aurait probablement pas fallu une épidémie mondiale pour réveiller le monde, mais, finalement, ils se sont réveillés », précise le rapport.

Le rapport souligne que l’Organisation Internationale du Travail, l’OIT, craint depuis longtemps que le libre-échange déséquilibré avec la Chine ne détruise la production nationale, n’appauvrisse la classe ouvrière et ne réduise à néant les communautés ouvrières dans le monde. Mais l’épidémie du coronavirus a réveillé les pays et les a exhorté à agir.

Le rapport révèle que : « la plupart des pays ont réalisé qu’ils dépendent dangereusement des fabricants chinois pour les médicaments et les équipements de protection individuelle de base, tels que les masques et les gants, ainsi que pour les équipements médicaux plus sophistiqués comme les respirateurs. Lorsque les entreprises chinoises expédient des millions de dispositifs médicaux défectueux dans le monde entier, l’indignation mondiale face à la fragilité de la chaîne d’approvisionnement s’intensifie ».

À la fin du printemps 2020, l’ancien Premier ministre japonais Shinzo Abe a annoncé un plan de 2,2 milliards de dollars pour rapatrier la production de la Chine vers le Japon. (Image : wikimedia / Prime Minister of Japan Official / CC BY 4.0)
À la fin du printemps 2020, l’ancien Premier ministre japonais Shinzo Abe
a annoncé un plan de 2,2 milliards de dollars pour rapatrier la production
de la Chine vers le Japon.
(Image : wikimedia / Prime Minister of Japan Official / CC BY 4.0)

Ainsi, à la fin du printemps 2020, l’ancien Premier ministre japonais Shinzo Abe a annoncé un plan de 2,2 milliards de dollars pour rapatrier la production de la Chine vers le Japon.

Même si un « découplage » complet est improbable, selon le rapport, les efforts de diversification en cours dans les principales économies d’Amérique du Nord, d’Europe et d’Asie afin d’isoler l’économie chinoise, pourraient nuire à la croissance de la Chine.

De plus, en 2020, alors que les pays sont occupés à répondre à l’épidémie de coronavirus, l’approche agressive de la Chine à Taïwan, à Hong Kong, dans la mer de Chine méridionale et le long de la frontière indienne est des plus alarmantes pour l’Occident.

Aux États-Unis, il existe un consensus bipartisan croissant sur le fait que le Parti communiste chinois est désormais le principal challenger du monde démocratique et de ses valeurs. Des signes d’un réveil similaire apparaissent également chez les fidèles alliés traditionnels des États-Unis qui sont le Canada et le Royaume-Uni. Il existe un consensus similaire dans l’Union européenne. L’Inde prend actuellement des mesures importantes pour recalibrer sa politique envers son voisin de l’Est et le Japon s’est toujours méfié de la Chine.

Un autre signe de cette prise de conscience est que les entreprises technologiques chinoises sont de plus en plus considérées comme des « parias » en Occident. Un nombre croissant de pays ont annoncé qu’ils excluaient la 5G de Huawei de la construction de leurs propres systèmes de télécommunications.

Une alliance autrefois en difficulté - le dialogue quadrilatéral pour la sécurité Quadrilateral Security Dialogue ou Quad, États-Unis-Japon-Inde-Australie - a été relancée. (Image : wikimedia / CC BY-SA 3.0)
Une alliance autrefois en difficulté - le dialogue quadrilatéral pour la sécurité Quadrilateral Security Dialogue ou Quad, États-Unis-Japon-Inde-Australie - a été relancée. (Image : wikimedia / CC BY-SA 3.0)

Une alliance autrefois en difficulté - le dialogue quadrilatéral pour la sécurité, Quadrilateral Security Dialogue ou Quad, États-Unis-Japon-Inde-Australie - a été relancée. La réunion s’est déroulée à Tokyo le 6 octobre 2020 et a porté sur la sécurité maritime, les questions cybernétiques et la connectivité régionale. Selon le rapport, la renaissance du mécanisme de dialogue quadripartite peut être considérée comme la première étape concrète des efforts déployés par l’Occident pour faire connaître clairement les intentions de la Chine et pour les contenir.

Alors que la Chine est confrontée à l’Occident, Xi Jinping frappe « trop vite et trop fort »

Le leader chinois, Xi Jinping, a créé à lui seul une confrontation entre la Chine et les démocraties du monde en agissant « trop vite et trop fort », selon le rapport.

L’approche agressive de la Chine envers les démocraties ces dernières années serait due en grande partie à « Xi Jinping, qui est désireux d’établir sa place dans l’histoire ». « Quelle que soit la source de cette agressivité, il est clair que la Chine et les démocraties du monde sont maintenant enfermées dans une impasse de plus en plus antagoniste », mentionne le rapport.

Contrairement à la perception de certains en Chine, selon laquelle l’Occident s’oppose à la Chine pour contenir son ascension, le rapport souligne spécifiquement que la nécessité du pluralisme et du découplage de la Chine ne serait pas apparue sans les différentes actions du PCC dans les démocraties. Le PCC est « autosuffisant ».

Une telle confrontation n’est pas inévitable dans l’ascension d’une nation. Après la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis ont connu une croissance économique rapide, mais cela n’a pas conduit à une forte confrontation avec les autres pays. Le Japon, la Grande-Bretagne, l’Australie et les sociétés transnationales n’ont pas cherché à se diversifier et à se découpler lorsque les États-Unis sont devenus économiquement puissants, spécifie le rapport.

Il précise par ailleurs que l’Occident n’a pas le choix dans son approche, du moins pas avec Xi Jinping à la tête du parti communiste. Il affirme que le PCC ne tolère aucune dissidence et est hostile à la démocratie en théorie et en pratique.

Carte de l’indice de démocratie par l’Economist Intelligence Unit de 2019 : plus le pays est vert, plus il est considéré démocratique. (Image : wikimedia / Original world map made by CanuckGuy / CC BY-SA 4.0)
Carte de l’indice de démocratie par l’Economist Intelligence Unit de 2019 : plus le pays est vert, plus il est considéré démocratique. (Image : wikimedia / Original world map made by CanuckGuy / CC BY-SA 4.0)

Les démocraties sont visées et l’Occident ne fait pas preuve de la « diligence requise » à temps

Les démocraties du monde entier, y compris les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni, l’Allemagne, le Japon, l’Inde et l’Australie, sont depuis longtemps la cible des attaques du Parti communiste, Hong Kong et Taïwan étant les plus touchées, indique le rapport en avertissant que : « Sous la direction de Xi Jinping, le Parti communiste chinois vise à transformer le monde en un tremplin pour l’autoritarisme. Xi et le PCC l’ont démontré non seulement en paroles, mais aussi en actes ».

Le PCC ne semble pas soutenir ouvertement ou secrètement les partis des travailleurs dans les démocraties étrangères. Le rapport met en évidence que le PCC utilise divers « instruments de pouvoir » pour forcer le monde à se « soumettre » à sa volonté et à réaliser ses ambitions en matière de politique étrangère.

Ces « instruments de pouvoir » comprennent le Département du travail du Front uni du PCC, l’espionnage économique et technologique, l’Institut Confucius, et même la « prise d’otages », comme ce fut le cas lorsque la Chine a inculpé deux citoyens canadiens pour espionnage en juillet 2020. Une « manœuvre politique flagrante » pour l’utiliser comme monnaie d’échange, afin de tenter de forcer le Canada à libérer la directrice financière de Huawei, Meng Wanzhou, qui a été détenue et placée en résidence surveillée à Vancouver en 2018 pour avoir violé les sanctions contre l’Iran.

Les autorités chinoises utilisent la puissance économique de la Chine pour contraindre d’autres pays et entreprises à « se conformer », selon le rapport.

« La Chine sape l’ordre démocratique, par exemple en soutenant activement les gouvernements autoritaires, en créant un système parallèle de gouvernance mondiale et en façonnant l’ordre international à l’image de la Chine, ou du moins dans son intérêt. La Chine rejoint également activement les organisations internationales existantes, dans l’espoir de saper l’ordre démocratique de l’intérieur du système, entre autres choses ».

L’influence de la Chine au sein de l’Organisation mondiale de la santé est encore plus alarmante. En janvier 2020, le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom, a loué la réaction de la Chine face au nouveau coronavirus. (Image : wikimedia / ITU Pictures from Geneva, Switzerland / CC BY 2.0)
L’influence de la Chine au sein de l’Organisation mondiale de la santé
est encore plus alarmante. En janvier 2020, le directeur général de l’OMS,
Tedros Adhanom, a loué la réaction de la Chine face au nouveau coronavirus.
(Image : wikimedia / ITU Pictures from Geneva, Switzerland / CC BY 2.0)

L’influence de la Chine au sein de l’Organisation mondiale de la santé est encore plus alarmante. En janvier 2020, selon le rapport, le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a loué la réaction de la Chine face au nouveau coronavirus (également connu sous le nom de virus communiste chinois, Covid-19), tout en ignorant le fait que la Chine dissimulait la crise virale en supprimant ses propres médecins et en cachant à l’OMS des informations vitales sur le virus.

Michael Auslin, chercheur à la Hoover Institution de l’Université Stanford et analyste politique pour l’Asie, a récemment écrit dans The National Interest que la politique d’engagement de l’Occident avec la Chine n’était pas mauvaise au départ, ce qui était mauvais, c’était l’incapacité de l’Occident à faire preuve de la diligence nécessaire à l’égard des ambitions de la Chine, ce qui a engendré le problème actuel.

La faiblesse des démocraties permet à la Chine de faire ce qu’elle veut

Le rapport affirme qu’il est temps pour le monde démocratique de revoir calmement ses politiques en réponse aux défis de la Chine. Les démocraties doivent réfléchir profondément et se défendre avec force, comme la Chine de Xi Jinping l’a fait elle-même. Les démocraties doivent forcer le parti communiste à reconsidérer ses ambitions mondiales et à prendre du recul par rapport à son assaut continu contre les démocraties du monde.

Les États-Unis restent le leader naturel des démocraties et leur puissance, leur richesse et leur technologie, combinées au déploiement efficace de leurs nombreux alliés mondiaux, permettront de contenir les ambitions de la Chine, selon le rapport.

En travaillant ensemble les démocraties du monde ont un avantage écrasant que la Chine ne peut pas avoir, selon le rapport. Le défi pour les démocraties du monde n’est plus de savoir comment essayer de travailler avec une Chine montante sous une dictature autoritaire : le véritable défi que représente la Chine pour les démocraties est de savoir comment elles peuvent travailler efficacement les unes avec les autres.

Le rapport montre que « la faiblesse et l’indécision des démocraties ont encouragé les partisans de la ligne dure en Chine et leur ont laissé une porte à enfoncer. Si les démocraties du monde avaient adopté une position unifiée il y a dix ans, soutenue par une dissuasion significative et crédible, Xi Jinping aurait-il eu l’audace de sévir contre Hong Kong, questionne le rapport. C’est à cause de notre laxisme que la Chine est si libre de faire ce qu’elle veut ».

Le défi que la Chine pose aux démocraties du monde est non seulement différent de celui de l’Union soviétique, mais aussi plus difficile à relever car la Chine est un concurrent plus grand et plus riche.

Nouveaux principes pour les démocraties traitant avec la Chine

Le rapport se termine par la présentation des principes régissant les relations futures du monde démocratique avec la Chine, intitulés « Principes envers la Chine ». A travers ces principes le monde démocratique s’engage à s’abstenir de plusieurs actions, afin de défendre ses valeurs et son mode de vie contre toute atteinte.

Le monde démocratique s’engage à s’abstenir de : 

  • Ignorer les tentatives de la Chine d’interférer dans les sociétés démocratiques.
  • Se soumettre et de coopérer à la censure ou à l’autocensure de la Chine en ce qui concerne les opinions, les écrits, les œuvres artistiques ou les déclarations relatives à la Chine.
  • S’engager dans toute activité ou échange commercial ou technologique qui contribue à l’oppression de la Chine sur son propre peuple.
  • Ignorer les tentatives de la République populaire de Chine d’établir une gouvernance mondiale de l’Internet et des normes techniques qui soient conformes à ses propres valeurs et ambitions autoritaires.
  • Soutenir ou participer à toute forme de punition et de sanction imposée par la Chine à quiconque qui critique la Chine.
  • De ne pas soutenir les démocrates et les gouvernements du monde entier qui subissent des pressions et des intimidations de la part de la République populaire de Chine.
  • Soutenir l’achat ou le commerce de produits ou de services chinois en sachant qu’ils sont produits avec du travail forcé ou à la suite d’activités criminelles telles que la contrefaçon ou le vol de propriété intellectuelle.

Rédacteur Charlotte Clémence

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