Selon le calendrier en usage, nous entrons dans la période du « carême », période comprise entre le mercredi des Cendres et le Vendredi saint. Si le carême traditionnel est de moins en moins observé, le jeûne proprement dit semble susciter de plus en plus d’engouement.
Il serait intéressant de comprendre pourquoi le jeûne séduit davantage.
Le jeûne, pratique ancestrale
En quoi consiste le jeûne ? C’est la privation volontaire partielle ou totale de nourriture pendant une durée déterminée. Cette pratique existerait depuis des temps immémoriaux.
« Bien que le jeûne soit à la mode, il est pratiqué depuis des milliers d’années, que ce soit à travers les religions et les cultures du monde entier », explique Laura Azenar, naturopathe à Lyon, dans un article de son blog intitulé : « L’histoire du jeûne ».
Le jeûne se situe au cœur des trois religions monothéistes : judaïsme, islam, christianisme. Il correspond à une recherche de purification spirituelle. À travers le jeûne, le fidèle se rapproche de Dieu et développe sa spiritualité.
Ainsi, le jeûne fait partie intégrante de la pratique de certaines religions comme Yom Kippour, Ramadam et Carême.
En ce qui concerne le terme Carême, il provient du latin « quadragesima (dies) », qui signifie « quarantième jour » (en ancien français, on le traduisait par « quaresme »). Il s’agit d’une référence aux quarante jours pendant lesquels Jésus a jeûné dans le désert, tout comme Moïse a jeûné sur le mont Sinaï selon la tradition juive.
Les premiers chrétiens observaient le jeûne le mercredi et le vendredi ainsi qu’une semaine avant Pâques. A partir du IVe siècle après Jésus-Christ cette période d’une semaine s’est étendue à quarante jours avant Pâques. « C’est le carême, un temps de prière, de partage et d’abstinence auquel les fidèles sont censés se livrer sans ostentation, de même, l’aumône et la prière sont à observer en secret », selon le témoignage de Sylvie Briet, journaliste scientifique, dans la revue « Sciences et Avenir » du 26 février 2020.
Au fil du temps, la pratique du jeûne s’est quelque peu allégée. De nos jours, l’Eglise demande aux fidèles d’observer un jeûne le mercredi des cendres et le vendredi saint, et de faire preuve d'une certaine frugalité à tous égards pendant ces quarante jours.
Afin de mieux comprendre le processus du jeûne, tâchons de répondre à la question suivante :
Que se passe-t-il quand nous jeûnons ?
Le jeûne peut faciliter l’élimination des toxines. Nous nous débarrassons des déchets et « bagage inutiles ». (Image : andreas160578 / Pixabay)
En cas de jeûne, l’abstinence de nourriture entraîne l’arrêt de la digestion. L’organisme allégé de sa fonction digestive, qui consomme énormément d’énergie, peut dès lors se consacrer davantage aux fonctions d’élimination. Les toxines peuvent être éliminées plus facilement. On pourrait parler d’une forme de « nettoyage ». En quelque sorte, nous nous débarrassons des déchets et « bagages inutiles ».
Par ailleurs, le corps, privé de nourriture, va au fil des jours épuiser ses réserves en sucre. Le foie transforme nos graisses en cétones, qui servent de « carburant alternatif » : c’est le phénomène de la cétose. Découvrons cet extrait de la revue Nutrition, intitulé «Les cétones, l’autre carburant du cerveau», écrit par Priscille Tremblais, journaliste scientifique : « Lorsque les taux de glucose sont bas, le foie synthétise des corps cétoniques à partir des graisses (acides gras). Les corps cétoniques peuvent contribuer jusqu’à 60% des besoins énergétiques du cerveau. Ce carburant alternatif est particulièrement intéressant en cas de jeûne (…) car il maintient la fonction cérébrale tout en épargnant les protéines et donc les muscles ».
Détail surprenant : un individu de poids normal est programmé pour fonctionner en cétose pendant quarante jours !
Les organes vitaux tels que le cœur, le cerveau, les poumons continuent à fonctionner en utilisant les réserves de l’organisme.
Que nous apporte le jeûne ?
Le jeûne aurait-t-il donc des effets bénéfiques sur notre santé ?
De nombreuses études rapportent les bienfaits et les propriétés curatives du jeûne, reconnues dès l’Antiquité, chez les Grecs et les Romains notamment.
« Lorsque le corps est chargé d’humeurs impures, faites-lui supporter la faim, elle assèche et purifie », disait Hippocrate en 370 avant Jésus-Christ.
Plus près de nous, nombre de médecins contemporains ont prôné les avantages de l’auto-guérison, du jeûne et de la naturopathie.
En 1953, le Dr Otto Buchinberg a fondé en Allemagne, une clinique où la pratique du jeûne, associée à l’activité physique, s’avère efficace dans certains traitements. Des années auparavant il avait lui-même obtenu la guérison d’un rhumatisme articulaire aigu grâce au jeûne.
Depuis quarante ans, des recherches dans le domaine de la santé publique ont été réalisées en Russie sur les effets salutaires du jeûne,.. Cependant, les résultats sont restés méconnus en Occident.
En France les bienfaits du jeûne sur la santé sont contestés par la communauté scientifique. En revanche la pratique gagne en popularité.
Le jeûne : un succès croissant
Le jeûne produit une régénérescence comparable à la renaissance de la nature au printemps. (Image : Gaby Stein / Pixabay)
Les recherches médicales récentes axées sur l’auto-guérison, ou autres thérapies plus respectueuses de la nature, ont fait rebondir le nombre d’adeptes du jeûne. Thérapeutes et guides s’ingénient à initier à « l’art de jeûner en toute sécurité ». Le jeûne se décline sous des formes variables et modulables, par exemple :
- Jeûne complet ou jeûne hydrique : absence complète de nourriture où seule l’eau est autorisée.
- Jeûne intermittent ou partiel : période où jeûne et alimentation normale sont alternés.
En l’occurrence, le jeûne est considéré par ses partisans comme une véritable « cure de désintoxication ».
Le Dr Paolo Cataldi, médecin italien, fervent défenseur du jeûne, déclare dans une étude intitulée : Le jeûne, une philosophie de vie
« Gardons toujours à l’esprit que le jeûne n’est pas un remède, ni une simple thérapie, mais une mentalité, une philosophie de vie ». Puis il fait état de « son énorme potentiel régénérateur ».
Il conseille de le « considérer comme un moyen très puissant de rééduquer son corps et son esprit ».
Certes, comme nous l’avons souligné en préambule, l’observance du carême traditionnel est en perte de vitesse, mais est-ce vraiment le cas ?
Des observateurs n’ont pas manqué de relever le point suivant : le carême selon le calendrier se situe généralement entre la fin de l’hiver et le début du printemps. Au cours du carême, le chrétien va se recentrer sur lui-même et s’élever spirituellement en se connectant au divin. Le jeûne produit une régénérescence comparable à la renaissance de la nature au printemps.
Voilà une conclusion qui rejoint les thèses des spécialistes du jeûne.
Tradition et modernité auraient trouvé un terrain d’entente.
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