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Culture. Citadelle de Saint Exupéry : un livre philosophique intemporel

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PODCAST

Cette œuvre posthume inachevée fut publiée en 1948, quatre ans après sa mort. Antoine de Saint Exupéry la commença dès 1936 et continua son élaboration tout au long de sa vie, jusqu’à sa disparition le 31 juillet 1944.

 Ce livre rassemble les pensées de toute une vie 

Ni retouché, ni mis en ordre ni retravaillé, le texte nous est livré tel quel, à l’état de « brouillon » et c’est peut-être justement ce qui le rend si particulier. Ces mots recèlent cette exceptionnelle saveur de l’authentique, on n’y sent pas ce vernis, cette retouche finale du « prêt à être lu », et c’est aussi ce côté brut qui le rend si touchant.
    
Considéré souvent comme son plus beau livre, un véritable monument (et ceci malgré l’incontournable succès de son livre : Le Petit Prince, qui est après La Bible, le livre le plus lu dans le monde), Citadelle n’est ni un recueil de poèmes en prose, ni un conte, ni un essai, il n’y a d’ailleurs pas de réel fil narratif. Parfois comparé à une Bible, ce livre d’environ 500 pages est effectivement un mélange de paraboles et de réflexions philosophiques.
  
Saint Exupéry nous emmène dans un surprenant et éblouissant voyage où se développent, au travers de ses pensées, tous les thèmes chers à son cœur. La relation à la vie, à la mort, à l’homme et au divin, avec omniprésente cette sagesse, ce sens du devoir et de la responsabilité. Ce livre est hors de toute classification politique, car il est avant tout un livre spirituel.
  
Il s’agit d’un souffle lyrique où les sentiments s’expriment avec une pudeur et une poésie métaphorique unique par sa justesse et sa splendeur. 

Citadelle est un livre précieux car il nourrit le cœur et l’âme

Il nous élève. Pas seulement par l’émerveillement des images qu’il nous donne à voir, ou les élans jubilatoires qu’il provoque, mais essentiellement par la consistance et la perspicacité de ses réflexions.

Certains passages pourront sembler inaccessibles à la première lecture, et nécessiteront de trouver un rythme qui convient. Citadelle ne s’engloutit pas comme un roman.

Présentation de l’œuvre

Au crépuscule de sa vie, un roi berbère tente de transmettre à son fils et successeur au trône, ses valeurs, croyances et préceptes.

 Antoine de Saint Exupéry n’avait pas d’enfant, et Citadelle est peut-être le testament qu’il nous lègue, un peu comme ce roi berbère transmet à son fils l’empire qu’il a fondé.

 Voici pour finir quelques citations de Citadelle, qui vous donneront une idée plus claire du livre.

« Je suis lourd de trésors inutiles comme d’une musique qui jamais ne sera comprise. »

« Mais n’espère rien de l’homme s’il travaille pour sa propre vie et non pour son éternité. »

« Tu veux qu’ils s’aiment ? Ne leur jette point le grain du pouvoir à partager. Mais que l’un serve l’autre. Et que l’autre serve l’empire. Alors ils s’aimeront de s’épauler l’un l’autre et de bâtir ensemble. »

« La pierre n’a point d’espoir d’être autre chose qu’une pierre. Mais de collaborer, elle s’assemble et devient temple. »

 « Je te l’ai déjà dit. Erreur de l’un, réussite de l’autre, ne t’inquiète point de ces divisions. »

« Il n’est de fertile que la grande collaboration de l’un à l’autre. Et le geste manqué sert le geste qui réussit, montre le but qu’ils poursuivaient ensemble à celui qui a manqué le sien. »

« Je ne me préoccupe point, répondit mon père, de courir après le vent pour en faire des provisions, car si je le tiens immobile, le vent n’est plus. »

« Je renie celui qui renie sa femme ou sa ville ou son pays. Tu es mécontent d’eux. Tu en fais partie. Tu es d’eux. Ce qui pèse vers le bien.  Tu dois entrainer le reste, non les juger de l’extérieur. »

« Je vous le dis, vous n’avez le droit d’éviter un effort qu’au nom d’un autre effort, car vous devez grandir. »

« La paix que je médite se gagne à travers la souffrance. J’accepte la cruauté de mes nuits blanches car je suis en marche vers toi qui es énoncé, effacement des questions et silence. Je suis arbre lent mais je suis arbre.  Et grâce à toi je drainerai les sucs de la terre. »

« L’humilité n’est point soumission aux hommes mais à Dieu. »

Couverture du livre Citadelle de Saint Exupéry. (Image : Capture d’écran / shop.labourseauxlivres.fr)

Dans sa lettre à un général, Saint Exupéry écrivait :

« Aujourd’hui, je suis très profondément triste pour ma génération, qui est vide de toute substance humaine… Je hais mon époque de toutes mes forces. L’homme y meurt de soif […] il n’y a qu’un problème, un seul de par le monde : rendre aux hommes une signification spirituelle. Faire pleuvoir sur eux quelque chose qui ressemble à un chant grégorien. […] Ils auraient tant besoin d’un Dieu ! […] Quand [la France] sera sauvée, alors se posera le problème fondamental de notre temps, qui est celui du sens de l’homme et auquel il n’est point proposé de réponse, et j’ai l’impression de marcher vers les temps les plus noirs du monde. »

Cela dénote un regard plutôt pessimiste sur l’homme moderne. Car pour Saint Exupéry, être un homme n’a de sens que si celui-ci est capable de se dépasser lui-même, de se transcender en servant une cause supérieure. C’est en plaçant sa mission, son devoir et ses responsabilités avant lui et au-dessus de lui que l’homme se révélera à lui-même dans une évidence spirituelle.

Pour Saint Exupéry, ce qui donne son sens au monde et à l’homme, c’est d’abord le spirituel. Il écrit d’ailleurs dans sa lettre à un otage :

« Les craquements du monde moderne nous ont engagés dans les ténèbres. Une politique n’a de sens qu’à condition d’être au service d’une évidence spirituelle. »

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