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Culture. Alexandre Soljenitsyne et l’Archipel du Goulag : une vie et un roman (2/2)

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En 1956, Alexandre Soljenitsyne fut libéré de son exil par le gouvernement soviétique. En 1962, Nikita Khrouchtchev, chef du parti communiste de l’Union soviétique (PCUS), ordonna la publication de la série d’ouvrages de Soljenitsyne décrivant la vie dans les camps de travail, afin d’utiliser son œuvre pour renverser Staline.

Toutefois, cette initiative fut de courte durée. Nikita Khrouchtchev perdit le pouvoir et les œuvres de Soljenitsyne furent rapidement interdites de publication en Union soviétique. À cette époque, des copies du manuscrit circulaient déjà dans des publications clandestines parmi le peuple russe. Elles se répandirent même en dehors de l’Union soviétique, dans d’autres pays.

En 1970, malgré l’ingérence soviétique, le comité de sélection du prix Nobel a décerné à Alexandre Soljenitsyne le prix Nobel de littérature.

L’Archipel du Goulag, un chef-d’œuvre écrit entre 1958 et 1967 et publié à l’étranger en 1973, dévoile les dessous du système soviétique des camps de travail. (Image : wikimedia / Archivi Mondadori / CC BY-SA 4.0)

L’Archipel du Goulag

C’est en 1973 que L’Archipel du Goulag, un chef-d’œuvre écrit entre 1958 et 1967, et qui dévoile les dessous de tout le système soviétique des camps de travail, fut publié à l’étranger.

Cet ouvrage irrita profondément les autorités soviétiques. Ainsi, en février 1974, le secrétaire général du PCUS, Leonid Brejnev, signa l’ordre de déchoir Alexandre Soljenitsyne de sa nationalité, de le faire monter de force dans un avion et de l’expulser. Il s’exila aux États-Unis dix mois plus tard, et s’installa finalement dans la campagne du Vermont, où il vécut pendant près de vingt ans.

Le prix Nobel de littérature fut décerné à Alexandre Soljenitsyne pour son roman Une journée dans la vie d’Ivan Denissovitch, qui décrit la vie dans un camp de travail forcé. Dans ce roman, le protagoniste Ivan, tout au long de sa journée, résiste aux tentatives des autorités de le déshumaniser.

Il souligne le fait que, même si la brutalité despotique peut dégrader les gens, elle ne peut pas détruire la nature humaine, car la grâce de Dieu peut racheter l’humanité détruite.

Alexandre Soljenitsyne pensait que le rétablissement des fondements moraux ne pouvait se faire que par la foi. Celle-ci, à son tour, ouvrait la voie à l’épanouissement de vertus, contribuant ainsi à mener la société sur une voie plus favorable. (Image : wikimedia / Bert Verhoeff for Anefo / CC0)

Les hommes ont oublié Dieu

On dit que « la conscience est plus importante et plus précieuse que la vie elle-même ».

Alexandre Soljenitsyne n’avait pas l’intention de renverser le parti communiste ou de révolutionner le système. Dans des œuvres telles que L’Archipel du Goulag et Le Pavillon des cancéreux, il ne se concentrait pas sur les maux politiques, mais sur la corruption morale du communisme.

Alexandre Soljenitsyne pensait que le rétablissement des fondements moraux ne pouvait se faire que par la foi. Celle-ci, à son tour, ouvrait la voie à l’épanouissement des vertus divines telles que l’amour, la miséricorde, la justice et le pardon, contribuant ainsi à mener la société sur une voie plus favorable.

« J’ai passé près de cinquante ans à étudier l’histoire de notre révolution et à recueillir des témoignages. Si je devais énoncer brièvement les causes de cette révolution catastrophique qui a coûté la vie à soixante millions de concitoyens, je pense que rien ne serait plus juste que de répéter la phrase suivante : " Les hommes ont oublié Dieu, c’est pourquoi tout cela est arrivé " », a-t-il affirmé.

En fin de compte, Alexandre Soljenitsyne considérait le déclin de la morale et de la spiritualité de l’humanité comme les facteurs fondamentaux qui ont nourri les atrocités du régime soviétique.

Dieu dirige la plume d’Alexandre Soljenitsyne

En 1990, Alexandre Soljenitsyne retrouve sa citoyenneté et, en 1994, après 20 ans d’exil, il quitte le Vermont pour revenir en Russie. Sa première étape fut la Sibérie, au camp de travail forcé où il fut d’abord détenu. À son retour dans son pays natal, face à une foule nombreuse et accueillante, son premier geste a été de se pencher et de toucher de ses mains le sol de la Sibérie.

Lors de sa rencontre avec le nouveau président russe, Alexandre Soljenitsyne n’afficha guère d’expression cordiale, bien que Boris Eltsine l’ait salué et lui ait fait honneur. Clairement, il reprocha à la Russie d’avoir abandonné la voie communiste, sans pour autant avoir purgé le pays de ses rebuts maléfiques.

Contrairement à l’Allemagne, qui fit un bilan complet du nazisme, la Russie ne fit pas d’efforts pour abolir les méfaits du parti autoritaire. Selon Alexandre Soljenitsyne, cet oubli avait conduit à une privatisation bâclée, à une descente vers l’oligarchie et à la destruction de la morale culturelle aboutissant à une seconde exploitation du peuple.

Boris Eltsine répondit, déconcerté : « Dieu dirige la plume de Soljenitsyne ».

Alexandre Soljenitsyne critiquait aussi ouvertement le libéralisme occidental. Selon lui, l’Amérique avait largement dégénéré en une société de consommation matérialiste et vulgaire.

Alexandre Soljenitsyne confia au sujet de la vie que : « Le sens de l’existence terrestre ne réside pas, comme nous avons pris l’habitude de le penser, dans la prospérité, mais dans le développement de l’âme ». (Image : wikimedia / М.А.Фёдоров / CC BY-SA 3.0)

La vision d’Alexandre Soljenitsyne sur l’Occident

Alexandre Soljenitsyne voyait essentiellement deux facettes distinctes de l’Occident : l’une était un Occident conservateur qui privilégiait les valeurs traditionnelles et mettait l’accent sur le christianisme. L’autre, parallèlement, était un Occident qui mettait l’accent sur l’athéisme et encourageait l’indulgence, sous la bannière de la liberté.

Selon lui, ces deux forces opposées, l’une de gauche et l’autre de droite, se livraient une lutte acharnée dans la domination de l’idéologie, de la pensée et du discours. À travers le prisme de sa foi chrétienne, il observa que l’Occident avait subi une érosion progressive des valeurs morales au fil du temps, sous l’influence de l’athéisme et du libéralisme.

Alexandre Soljenitsyne passa le reste de sa vie dans son pays d’origine. À partir de 2003, il résida dans une datcha près de Moscou, où il restait à l’intérieur en raison de problèmes de santé. Malgré son état de santé précaire, il continua de travailler quotidiennement à son bureau.

Le 3 août 2008, Soljenitsyne fut victime d’une crise cardiaque. Le grand écrivain russe, conscience de l’humanité, s’éteint à l’âge de 89 ans.

Un jour, Alexandre Soljenitsyne confia au sujet de la vie : « Le sens de l’existence terrestre ne réside pas, comme nous avons pris l’habitude de le penser, dans la prospérité, mais dans le développement de l’âme ».

La vie et l’œuvre d’Alexandre Soljenitsyne témoignent de son engagement à élever l’âme au-dessus de tout, laissant derrière lui un héritage durable qui continue à susciter l’autoréflexion et à promouvoir l’esprit humain.

Rédacteur Albert Thyme

Source : Aleksandr Solzhenitsyn and the Gulag Archipelago (Part 2)
www.nspirement.com

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