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Nature. Le processus fascinant à l’origine de la beauté des fibres naturelles : l’abaca (6/6)

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Comme nous l’avons vu dans les premières parties de cette série, les fibres naturelles proviennent d’un large éventail de sources. Des cocons de chenilles à la toison animale en passant par les tiges de plantes et les gousses de graines, le monde naturel nous fournit le matériau idéal pour fabriquer des vêtements, des cordages, du papier, des textiles et d’innombrables autres articles utiles. Aujourd’hui, nous allons nous pencher sur un type inhabituel de fibre végétale provenant du faux-tronc de la plante abaca.

La plante abaca

Plante tropicale originaire des Philippines, l’abaca est cultivée aussi en Equateur, au Costa Rica, en Indonésie et dans d’autres régions tropicales. Les deux plus gros producteurs au monde sont les Philippines et l’Equateur. En 2020, la production pour les Philippines était de 67 388 tonnes et pour l’Equateur de 36 634 tonnes.

L’abaca ressemble beaucoup à sa parente, la banane, sans en avoir les fruits comestibles. Elles appartiennent toutes deux au même genre (Musa), qui comprend environ 70 espèces de plantes ressemblant au bananier et ayant une multitude d’applications utiles. Cette plante herbacée vivace (Musa textilis) est cultivée pour les fibres longues et solides que l’on trouve dans le pétiole de ses grandes feuilles.

Les fibres des feuilles sont connues pour leur résistance et leur rigidité, et sont particulièrement adaptées à la fabrication de cordages et d’articles ménagers. Comme l’a rapporté un prêtre espagnol en 1521, les fibres d’abaca sont également tissées depuis longtemps pour fabriquer des tissus utilisés dans les vêtements traditionnels des Philippines.

Le processus fascinant à l’origine de la beauté des fibres naturelles : l’abaca
Les plantes d’abaca poussent en touffes à partir d’une racine enchevêtrée. (Image : wikimedia / John Washington, CC BY-SA 4.0)

Bien que l’abaca puisse atteindre plus de 6 mètres de haut, il ne s’agit pas d’un arbre. Le « tronc » apparent est constitué de plusieurs couches de tiges de feuilles qui poussent à partir d’une tige charnue, mesurant seulement deux pouces de diamètre. Le faux-tronc, ou stipe (non ligneux), pouvant atteindre 40 centimètres de diamètre, est formé par les pétioles qui se chevauchent.

Les plantes sont multipliées à partir d’un porte-greffe mature, qui émet une touffe de tiges. Lorsqu’une tige arrive à maturité - ce qui peut prendre jusqu’à deux ans - une hampe florale se forme au sommet, portant des grappes de petites fleurs. Les fruits qui en résultent ressemblent à des bananes, mais ne sont pas comestibles, et les tiges sont généralement récoltées avant la formation des fruits.

Seules quelques tiges arrivent à maturité en même temps, et on les récolte en les coupant près du sol au moment de la floraison. Une fois la plante établie, trois ou quatre tiges entourées de pétioles peuvent être récoltées tous les quatre à six mois, jusqu’à ce que la plante soit finalement remplacée au bout d’une dizaine d’années.

La fibre de feuille d’abaca

Les pétioles, ou tiges des feuilles, partent de la base et émergent successivement aux points les plus élevés du stipe, ce qui place les pétioles les plus anciens à l’extérieur. Les pétioles internes, plus jeunes, sont plus clairs et les pétioles externes sont plus foncés, tout comme la fibre qu’ils produisent. Les fibres les plus précieuses sont de couleur beige clair, lustrées et fines.

Le processus fascinant à l’origine de la beauté des fibres naturelles : l’abaca
Fibre d’abaca tissée. (Image : wikimedia / Øyvind Holmstad / CC BY-SA 4.0)

L’abaca a une forte teneur en lignine (15 %). Ce polymère naturel présent dans les parois cellulaires de la plante confère résistance et rigidité à la fibre. La fibre d’abaca est également exceptionnellement longue (jusqu’à trois mètres) et résistante au sel. Naturellement adapté aux besoins maritimes tels que la toile et le cordage, l’abaca est devenu un produit commercial important, souvent connu sous le nom de « chanvre de Manille ».

Les fibres de feuilles - obtenues à partir des feuilles des plantes monocotylédones - sont classées comme des fibres dures, par opposition aux fibres molles obtenues à partir des tiges des plantes dicotylédones. Le sisal et le henequen, tous deux membres de la sous-famille des agaves, sont d’autres types de fibres de feuilles.

La récolte et le traitement de l’abaca

Les fibres des feuilles étant déjà parfaitement alignées, leur traitement est un peu plus simple que celui des autres fibres, mais il n’en demande pas moins de travail.

Le processus fascinant à l’origine de la beauté des fibres naturelles : l’abaca
Tissage de fibres d’abaca dans une plantation aux Philippines. (Image : wikimedia / Øyvind Holmstad / CC BY-SA 4.0)

Le nettoyage est la première étape de la préparation de la récolte. La zone autour de la plante est débarrassée des feuilles mortes et des herbes envahissantes afin que la plante reste en bonne santé après la récolte.

L’étêtage vient ensuite. À l’aide d’un couteau tranchant fixé à une longue perche, les feuilles et les fleurs sont enlevées pour faciliter la récolte et éviter d’endommager les plantes environnantes lors de l’étape suivante.

Ensuite les tiges sont abattues à l’aide d’un grand couteau tranchant appelé bolo. Les tiges sont coupées à quelques centimètres du sol et empilées.

Le processus fascinant à l’origine de la beauté des fibres naturelles : l’abaca
À l’aide d’outils rustiques et d’une grande force, les fibres d’abaca sont traitées et nettoyées. (Image : wikimedia / BANANATEX / CC BY-SA 4.0)

Extraction de la fibre et séchage

L’étape suivante consiste à retirer les fibres de la tige. À l’aide d’un couteau spécial, les couches de gaines de feuilles sont détachées à la base, puis retournées d’un coup sec pour les séparer de la tige. Ces rubans détachés, appelés tuxies, sont ensuite nettoyés de leur pulpe.

La fibre est ensuite séparée des autres éléments de la feuille. Cette opération peut être réalisée manuellement ou à l’aide d’une machine à effeuiller motorisée.

Le processus fascinant à l’origine de la beauté des fibres naturelles : l’abaca
Fibre d’abaca séchant dans une plantation d’abaca. (Image : wikimedia / John Washington / CC BY-SA 3.0)

Les brins dénudés sont amenés dans un endroit ouvert pour être séchés. Ils peuvent être suspendus à des tiges de bois ou à des cordes pour sécher au soleil, ou séchés à l’air dans une structure ombragée. Selon les conditions météorologiques, le séchage peut prendre des heures ou des jours. Lorsque le taux d’humidité atteint 12 à 14 %, les fibres peuvent être mises en bottes et stockées dans un endroit bien ventilé.

Le processus fascinant à l’origine de la beauté des fibres naturelles : l’abaca
Tapis fabriqué à partir de fibres d’Abaca tissées. (Image : wikimedia / Obsidi♠nSoul / Domaine public)

Les diverses utilisations de la fibre d’abaca

La fibre d’abaca est très durable et convient aux utilisations intérieures et extérieures. Si elle n’est pas transformée en cordage, la fibre transformée est tissée en une variété de textiles ou réduite en pâte pour fabriquer des papiers spéciaux - notamment des enveloppes manille robustes, des sachets de thé et même de la monnaie !

Si vous trouvez des ficelles, des tapis, des bagages, des moquettes, des tissus d’ameublement, des filtres ou des géotextiles fabriqués en abaca, vous saurez qu’ils ont été conçus pour durer. Les fibres les plus fines peuvent être tissées pour obtenir des étoffes légères et respirantes pour des vêtements confortables. Il existe également un intérêt croissant pour les fibres d’abaca, plus légères et plus durables, en remplacement des fibres de verre dans les matériaux composites utilisés pour les automobiles et les bateaux.

Le processus fascinant à l’origine de la beauté des fibres naturelles : l’abaca
Le festival de T’nalak, ou festival de Tinalak, se déroule chaque année au mois de juillet, Le nom du festival provient du tissu coloré tissé par les femmes d’une tribu de la région, les T’boli. (Image : wikimedia / Constantine Agustin / CC BY-SA 2.0)

Rédacteur Albert Thyme

Source : The Fascinating Process Behind the Beauty of Natural Fibers (Part VI): Abaca

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