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France. La liberté individuelle est-elle un leurre ?

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Au sein d’une société démocratique et libre, les droits individuels sont respectés par le gouvernement, cependant, il existe des limites inhérentes à l’exercice de la liberté individuelle. Mais, la démocratie garantit la préservation des libertés individuelles, empêchant ainsi toute à classe sociale, politique ou religieuse de monopoliser le pouvoir.

Néanmoins, les récentes vagues de manifestations en France, accompagnées de violences démesurées, suscitent une réflexion : est-ce que ces troubles résultent d’une violation des libertés des citoyens ?

Les droits et libertés garantis par la Constitution

Le droit à la vie, à la liberté, à la sécurité d’une personne, mais aussi celui du respect de la vie privée, la liberté d’expression, de pensée, de conscience et de religion sont les principes fondamentaux : des droits et libertés garantis par la Constitution, au sein du « bloc de constitutionnalité », c’est-à-dire au sein des normes de valeur constitutionnelle.

Mais si ces libertés chères à la nation sont globalement consacrées par les textes auxquels renvoie le Préambule de la Constitution de 1958, c’est-à-dire : la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen(DDHC) du 26 août 1789, le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et la Charte de l’environnement de 2004, il n’en demeure pas moins que l’article 4 de la DDHC annonce que « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi ».

Cet article 4 affirme qu’un individu doit pouvoir exercer sa liberté individuelle sans pour autant attenter à celle des autres. Peut-on y voir l’origine de cette maxime : La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres, souvent attribuée à John Stuart Mill (1806 – 1873). Cet adage est devenu une vérité dans la conscience populaire. Mais, il semble que la société des temps présents mette à mal ce dicton, empreint de civisme, de moralité et de bon sens.

Il convient de faire une distinction entre un droit et une liberté. La liberté individuelle donne à un individu la capacité d’agir ou de s’abstenir, alors que le droit est une obligation incombant à un citoyen. Bien souvent ces deux notions sont confondues, on dit avoir des droits dans un domaine précis, par exemple aller et venir, se réunir ou manifester et en même temps exercer sa liberté, cela implique que de l’exercice de toute liberté doit s’accompagner de la responsabilité du citoyen envers les droits des autres.

Face aux manifestations persistantes en France, une interrogation surgit : sont-elles motivées par des violations substantielles des libertés individuelles ? Pourquoi ce pays, longtemps considéré comme le bastion des droits de l’homme, est-il secoué par de tels bouleversements ?

La liberté individuelle est-elle un leurre
« La violence, d’où qu’elle vienne, ne saurait en aucun cas être utilisée comme un moyen de résoudre une crise sociale et/ou politique », a déclaré la Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, Dunja Mijatović. (Image : wikimedia / Antoine Oury / CC BY-SA 4.0)

L’équilibre fragile entre Démocratie et liberté individuelle

Pour pouvoir vivre ensemble, les individus s’unissent par un contrat social en donnant à un tiers le droit de gouverner. Dans son ouvrage Du Contrat Social, Jean-Jacques Rousseau (1712 -1778) disait à ce sujet que « Chacun de nous met en commun sa personne et toute sa puissance sous la suprême direction de la volonté générale ; et nous recevons en corps chaque membre comme partie indivisible du tout ».

La question de savoir si les libertés publiques ont reculé a suscité de nombreuses réflexions et le Sénat dans sa revue Actualité libertés publiques, apporte son point de vue. Dans la série, Les libertés publiques ont-elles reculé sous Macron ? publiée le 12 août 2021, il est dit que la loi permet l’usage des libertés qu’elle garantit pour tous : « C’est ce qu’on appelle l’État de droit dans la mesure où toutes nos libertés sont réglementées. Au quotidien, la loi intervient pour réglementer, et donc limiter, nos libertés ».

Il est vrai que dans certains cas, l’État peut faire obstacle à la liberté s’il a pour finalité la sécurité. Cela a été le cas avec le passe vaccinal qui a été vu par les syndicats, certains partis politiques, les associations et les familles, comme une atteinte réelle aux libertés individuelles, comme on a pu le lire dans l’article Le passe vaccinal est-il une atteinte disproportionnée aux libertés ? paru dans le quotidien La Croix, en décembre 2021.

Dans sa décision n° 2021-824 DC du 5 août 2021, le Conseil Constitutionnel a jugé, du reste, qu’en limitant l’accès à certains lieux, le passe sanitaire portait atteinte à la liberté d’aller et venir.

D’autres mesures comme les lois sur la sécurité, la surveillance de masse par intelligence artificielle, l’affaiblissement des libertés associatives pour lutter contre l’islamisme radical, mais aussi, la liberté d’expression, la liberté de manifester, la liberté de la presse semblent liberticides. Car, le gouvernement accroît de plus en plus son arsenal répressif pour maintenir l’ordre, et exercer ainsi son pouvoir régalien, quitte à porter atteinte aux fondements de l’État de droit.

Réclamations sociales et impacts sur la liberté individuelle

« Les conditions dans lesquelles les libertés d’expression et de réunion trouvent à s’exercer en France dans le cadre de la mobilisation sociale contre la réforme des retraites sont préoccupantes » avait alerté la Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, Dunja Mijatović, dans une déclaration publiée en mars 2023, Manifestations en France : les libertés d’expression et de réunion doivent être protégées contre toute forme de violence.

« La violence, d’où qu’elle vienne, ne saurait en aucun cas être utilisée comme un moyen de résoudre une crise sociale et/ou politique » avait aussi déclaré la Commissaire, regrettant que des personnes aient été blessées parmi les manifestants et les forces de l’ordre, ainsi que le retour de pratiques qui avaient suscité son inquiétude en 2019, lors du mouvement des « gilets jaunes », avait elle aussi précisé.

Suite au décès d’un adolescent de 17 ans, tué par un policier à Nanterre lors d’un contrôle routier, de nombreuses villes en France sont devenues de véritables chantiers de la violence et du pillage.

Ces dernières années, en particulier depuis l’émergence du mouvement des « gilets jaunes », les rassemblements protestataires ont pris une tournure extrêmement violente, engendrant des conséquences préjudiciables pour de nombreux citoyens. Certains d’entre eux ont dû faire face au saccage de leurs commerces, à l’incendie de véhicules et à des agressions lors de ces manifestations.

Les fauteurs de troubles, appelés black blocs, se présentent sous la forme d’un « cortège de militants révolutionnaires habillés en noir susceptibles de recourir à l’action directe », a expliqué le politologue Francis Dupuis-Deri, dans un article publié dans Les Échos. Ces blacks blocs vont jusqu’à endommager les édifices publics, les autobus, à incendier les bennes à ordures et tout équipement public. Lorsque les forces de l’ordre interviennent, elles sont confrontées à des jets de projectiles et constatent que de nombreux jeunes pillent en emportant des appareils électroménagers.

Le défi consiste à exprimer ses revendications avec vigueur sans porter atteinte aux droits fondamentaux des autres. Comment trouver l’équilibre entre une voix collective puissante et la préservation de la tranquillité des citoyens ordinaires ? Comment amener le gouvernement à répondre aux besoins des citoyens tout en maintenant l’intégrité de l’environnement social ? Ces questions demeurent essentielles pour guider une société en évolution tout en respectant les principes démocratiques et les libertés individuelles.

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