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Histoire. Les guerres de Vendée peuvent interpeller notre présent

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Alors que la Révolution bouleversait Paris, la Vendée connaissait une existence harmonieuse jusqu’au tournant du 4 août 1789. À cette date clé, l’Assemblée nationale abolit les droits et privilèges féodaux, une décision semble-t-il impulsée par la crainte des représailles aristocratiques, qui commençait à se propager dans les campagnes. Ce moment marque le début des guerres de Vendée.

Dans cette région profondément pieuse, le respect mutuel et l’art de vivre ensemble étaient les piliers de la société. Les conventions sociales telles que la politesse, le respect des institutions et du droit divin restaient incontestées. Malgré les épreuves de l’époque, les Vendéens menaient une vie paisible, marquée par une coexistence harmonieuse.

Les guerres de Vendée peuvent interpeller notre présent
Le 4 août 1789, date historique durant laquelle l’Assemblée nationale supprime les droits et privilèges féodaux. (Image : wikimedia / Charles Monnet / Isidore Helman (graveur) / Domaine public)

Chronologie annonçant les guerres de Vendée

Reynald Secher, un historien spécialisé dans les guerres de Vendée, lors d’un débat sur la Terreur pendant les révolutions françaises, évoque l’importance cruciale de la nuit du 4 août 1789. Il souligne que cette soirée, au cours de laquelle les députés de l’Assemblée nationale ont voté pour l’abolition des privilèges féodaux, marque un tournant décisif : il y a un avant et un après. Selon Secher, cet événement symbolise la volonté de bâtir une société nouvelle, s’éloignant d’un ordre centré sur le divin et Dieu, caractéristique de la France de l’époque, pour se tourner vers un idéal où l’homme, et non plus Dieu, est au centre de la société. Cette transition vers l’humanisme, bien que théoriquement ancrée dans les Lumières, pose la question de sa mise en application pratique. Comment instaurer cette nouvelle société ? La réponse de Secher réside dans la singularité de la Révolution française, qui aspire à être à la fois une, indivisible, et universelle - les trois piliers de cette période révolutionnaire.

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Le 12 juillet 1790 marque une étape cruciale avec la nationalisation des biens de l’Église. (Image : wikimedia / Jacques-Louis David / Domaine public)

Le 12 juillet 1790 marque une étape cruciale avec la nationalisation des biens de l’Église et l’obligation faite aux prêtres de prêter allégeance au gouvernement, en échange d’un salaire. Désormais, les prêtres ou curés sont désignés par les électeurs de la paroisse, indépendamment de leur confession religieuse. Cette mesure provoque une vive opposition en Vendée, déclenchant un soulèvement. La tension entre les fidèles et les gardes nationaux s’intensifie. Face à cette situation, les autorités décident de substituer les curés par des prêtres assermentés, nommés directement par l’État. Les catholiques perçoivent cette action comme une agression et se mobilisent pour défendre leurs curés réfractaires. Nombre de ces prêtres seront contraints à l’exil, tandis que d’autres, pour continuer à célébrer la messe, devront se cacher.

Le 20 avril 1792 marque un tournant décisif lorsque la France déclare la guerre à l’Autriche. L’Assemblée législative initie les hostilités en déclarant la guerre à l’Empire d’Autriche, visant le « roi de Bohême et de Hongrie », un conflit qui s’intensifie en juillet avec l’alliance du royaume de Prusse à l’Autriche.

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L’exécution du roi Louis XVI, décidée par une marge étroite de seulement 26 voix. (Image : wikimedia / Musée Carnavalet / Domaine public)

Le 21 janvier 1793 est une date sombre dans l’histoire de France avec l’exécution du roi Louis XVI, décidée par une marge étroite de seulement 26 voix. Jean-Clément Martin, dans son ouvrage, L’exécution du roi : 21 janvier 1793 : la France entre République et Révolution, souligne que les débats furent intenses jusqu’à la dernière minute, et que tout fut mis en œuvre pour éviter toute effusion de violence. Toutefois, la mort du roi marque un nouveau tournant pour la Révolution. Il révèle que la moitié des députés souhaitait mettre un terme à la révolution, maintenir la République tout en épargnant la vie du roi, mettant en lumière les divisions profondes au sein de l’Assemblée législative.

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Les paysans vendéens refusent les décisions de Paris et prennent les armes. (Image : wikimedia / Evariste Carpentier / Domaine public)

L’insurrection, début des guerres de Vendée

Un mois plus tard, le 24 février 1793, la France est secouée par une insurrection. La Convention nationale décide de renforcer les armées, requérant 300 000 hommes sélectionnés par tirage au sort, une mesure qui soulève l’indignation des paysans à travers le pays. De multiples régions, du nord de Toulouse à la Bourgogne, de l’Orléanais à l’Alsace, en passant par les Flandres jusqu’aux Pyrénées et en Vendée, sont le théâtre d’émeutes. Une large part du territoire se révolte contre la Convention pour diverses raisons.

Monsieur Secher souligne l’opposition spécifique des jeunes de l’ouest de la France, réfractaires à l’idée de participer à une révolution source de désillusions et de contraintes. Ce phénomène, présent dans tout le pays, mène à l’instauration du système de la Terreur en réponse au refus de la conscription. Si la plupart des foyers de résistance s’éteignent en avril 1793, la Vendée fait exception. Là, 110 000 hommes prennent les armes, dont 70 000 engagés activement dans le combat. Ces paysans, devenus soldats sans uniforme, forment une troupe volatile, se rassemblant au signal d’un moulin ou d’un clocher, armés de fusils et de canons capturés à l’ennemi, malgré leur manque d’entraînement militaire. La principale armée vendéenne, de confession catholique et de tendance royaliste, est dirigée par de nombreux chefs, parmi lesquels figurent François Athanase Charette de la Contrie, Jacques Cathelineau, Charles Melchior Artus de Bonchamps, Maurice Gihost d’Elbée et Henri du Vergier de La Rochejacquelein, rejoints plus tard par Jean-Nicolas Stofflet et Louis de Salgues de Lescure, dont les noms restent gravés dans la mémoire vendéenne.

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Cette politique d’extermination se concrétise avec les instructions données au général Turreau de dévaster la Vendée. (Image : wikimedia / Louis Hersent / Domaine public)

Les guerres de Vendée, une série de conflits entre les royalistes de l’Ouest de la France, surnommés « les Blancs », et les républicains, appelés « les Bleus », marquent l’histoire de cette région. Ces soulèvements s’étalent de 1793 à 1799, avec des répercussions en 1815 et 1832. Reynald Secher explique que la Révolution française s’appuie sur la loi, en particulier la Déclaration des droits de l’Homme, affirmant que l’homme est naturellement enclin au progrès. Toutefois, la situation en Vendée soulève un débat : un Vendéen, perçu comme appartenant à un passé révolu, est-il considéré comme un homme à part entière ? La réponse tragique se traduit par la loi du 1er août 1793 : « Détruisez la Vendée et la République sera sauvée », entraînant la nationalisation des terres vendéennes.

Monsieur Secher ajoute que la période de 1793 à 1799 est marquée par une politique d’extermination orchestrée par le Comité de salut public, soutenue par l’Assemblée nationale. Cette stratégie, visant à éliminer une partie de la population non pour ses actes mais pour son identité, est une première dans l’histoire de l’humanité.

Cette politique d’extermination se concrétise avec les instructions données au général Turreau de dévaster la Vendée. Il mobilise alors vingt-quatre « colonnes infernales » composées de 80 000 hommes, dont les atrocités leur vaudront cette appellation. Le 28 février 1794, en une seule journée, ces troupes massacrent 563 femmes, enfants et vieillards au Luc-sur-Boulogne.

Le 13 mai 1794, Turreau est destitué, la Convention ayant besoin de toutes ses forces aux frontières. Les Bleus se retirent de la Vendée, permettant à la région de respirer. La chute de Robespierre le 27 juillet 1794, suivie de son exécution le lendemain, marque la fin de la Terreur et, symboliquement, celle de la Révolution française.

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Reynald Secher trouve un carton oublié où il y avait les ordres autographiés signés par Robespierre, qui commandent d’exterminer la Vendée. (Image : wikimedia / Chris93 / CC BY-SA 3.0)

Des preuves trouvées aux archives nationales

Reynald Secher trouve un carton oublié où il y avait les ordres autographiés signés par Robespierre, qui commandent d’exterminer la Vendée. Des secrétaires de l’époque notaient cela sur des bouts de papier et les faisaient signer. Lors de l’effondrement du système totalitaire de Robespierre, ces documents ont été jetés par brassée dans des malles. C’est Napoléon 1er qui les a fait classer et monsieur Secher les a tous photographiés et sortis de l’oubli.

La convention se lasse d’une guerre civile qui n’a plus de motif. Elle veut conclure une trêve auprès du Général Charette. Après plusieurs jours de négociations, un traité de paix est conclu au manoir de La Jaunaye, près de Nantes, le 17 février 1795. C’est une paix précaire acceptée par Charette mais refusée par Stofflet.

Les Vendéens obtiennent le droit de pratiquer le culte catholique et sont dispensés de tout devoir militaire envers la République. On promet aussi de leur rendre les biens qui leur avaient été confisqués. Les paysans vendéens, qui ont retrouvé leurs églises et leurs curés, n’ont plus envie de se battre. Mais Charette, quant à lui, se prend au jeu, peut-être ému par la mort du malheureux Louis XVII dans la prison de temple le 8 juin 1795.

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La quatrième guerre de Vendée est un conflit qui opposa les bonapartistes et les royalistes en mai et juin 1815, pendant les Cent-Jours. (Image : wikimedia / inc / Domaine public)

Depuis 1801 à aujourd’hui

Bonaparte en est conscient, la paix sera religieuse ou ne sera pas. La signature du concordat, une négociation avec le pape qui s’achève le 15 juillet 1801, le catholicisme romain est reconnu par la majorité des Français.

Il y aura encore une quatrième guerre en 1815 et une cinquième tentative menée par la Duchesse de Berry en 1832, pour renverser la monarchie de Juillet (1830 et 1848). Elle succède à la restauration.

Les victimes de ces guerres sont estimés à environ 200 000 morts, dont environ 170 000 pour les habitants de la Vendée militaire, soit entre 20 et 25 % de la population du territoire insurgé.

Reynald Secher estime que « L’arme de la révolution française est la Loi basée sur la déclaration des droits de l’Homme. Avec cette loi, on décide que l’homme ne peut être que progressif. Les mots sont toujours les mêmes, que ce soit aujourd’hui ou hier. »

À l’époque, si un citoyen contestait les lois, il était mis hors la loi, perdait sa personnalité morale et juridique. Il ne pouvait plus être propriétaire, donc on va nationaliser les terres de Vendée par une loi créée le 1er Août 1793.

De nos jours, les lois sont de plus en plus complexes, pouvant même mener à des absurdités. Les personnes qui s’y opposent sont muselées, ridiculisées voire amendées, comme ce fût le cas durant la Covid. Et pourtant, une démocratie est censée écouter les citoyens, avoir de vrais débats avant de prendre une décision. Cela permet d’éviter bien des tourments.

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Le cœur de Vendée est le signe de ralliement des Vendéens durant la guerre. (Image : wikimedia /  This W3C-unspecified vector image was created with Inkscape . / CC BY-SA 3.0)

Le coeur des Vendéens toujours présent

Le site Vendée Tourisme explique que, à l’origine, ce cœur ajouré était en argent et porté en épingle sur le col par les hommes du Bas Poitou. Par la suite, les femmes l’ont adopté et enrichi d’une couronne évoquant le mariage, ainsi que d’une croix sous forme de broche, symbolisant l’amour et la fidélité. En 1793, durant les guerres de Vendée, les Vendéens se sont distingués par leur cocarde blanche et le cœur symbolisant le Sacré-Cœur sous forme de scapulaire, utilisé comme emblème pour leur protection et leur fidélité au catholicisme.

Un cœur en tissu rouge, plein et surmonté d’une croix, était cousu à gauche sur le revers de la veste en signe de ralliement. Le général Cathelineau portait ce cœur en signe de reconnaissance des combattants vendéens, surnommés les « blancs », en opposition aux républicains, appelés les « bleus ».

Le blason de la Vendée a évolué. En 1943, il adopta la devise UTRIQUE FIDELIS, signifiant « Fidèle à l’un et à l’autre », représenté par un double cœur surmonté d’une couronne et d’une croix. En 1989, le logo du département de la Vendée a été créé à partir de ce blason, représentant un double cœur rouge et blanc. Ce logo reflète encore aujourd’hui l’identité forte de la Vendée, une région bienveillante, accueillante et unificatrice, chère aux cœurs des Vendéens.

Collaboration Evelyne Boilève

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